Plus de 1 000 morts des deux côtés, en 48 heures, suite à l’offensive lancée
par le Hamas ce samedi 7 octobre. Le bilan lourd, preuve que cette guerre entre
Israéliens et Palestiniens a atteint, ces derniers jours, des proportions
inquiétantes, suscitant à travers le monde, une flopée de réactions dont celles
de dirigeants africains qui appellent à la désescalade. En tout cas, par le
biais de cette réflexion, le Professeur titulaire d’Histoire des Relations
Internationales Moritié Camara, affiche une position sans équivoque : il est «
temps de sortir de cette incantation « Israël a le droit de se défendre » pour
évaluer également les droits des Palestiniens et leur octroyer la permission
d’utiliser d’autres moyens pour défendre leurs droits et leur dignité d’homme,
en l’occurrence le droit et la légalité internationale ».
Hier tout observateur attentif
n’a pu qu’être frappé par cette même phrase qui a été prononcée avec ensemble
comme un mantra en guise de réaction au coup d’éclat du Hamas en Israël, par
les dirigeants occidentaux de Biden à Macron en passant par Ursula Van Der Leyen
et Rishi Sunak: «Israël a le droit de se défendre». Comme si quelqu’un lui
déniait « ce droit » ou comme s’il était le seul à avoir « ce droit » sur la
Terre et sur Mars.
Cet élément de langage revient en
effet systématiquement sinon instinctivement depuis plus d’une décennie
maintenant lorsque les dirigeants occidentaux doivent réagir à toute montée de
tension entre Israéliens et Palestiniens. Cependant, lorsque ce type de tension
ou d’événement se produit dans d’autres pays au Mali, au Burkina Faso, en RDC
(République démocratique du Congo, NDLR), en Inde ou encore tout récemment en
Turquie, cette phrase n’apparaît jamais dans les réactions de ces mêmes
dirigeants en dehors de l’expression de « leurs préoccupations » ou des appels
« à toutes les parties à faire preuve de retenue ».
Cette hypocrisie qui ne reconnaît
aucun droit aux Palestiniens qui ne font pourtant que se défendre contre un
occupant au même titre que les Ukrainiens face aux Russes, est sidérante et
contreproductive pour l’image de l’Occident aux yeux du reste du monde qu’il
peut toujours sommer par des menaces et pressions de toutes sortes à se
conformer à son approche du double standard et son narratif qui a valeur
d’évangile dans le traitement des questions et crises internationales.
Israël maintient, depuis 2007,
les quelques deux millions de Palestiniens vivant à Gaza dans une prison à ciel
ouvert semblable aux ghettos créés en Europe durant la Seconde Guerre Mondiale
par le régime du 3ème Reich pour y maintenir les Juifs interdits de tout droit.
Mieux ou pire, toutes les avancées diplomatiques réalisées dans le «règlement»
de la question palestinienne (parce que le droit international n’a jamais été
la référence pour les occidentaux dans le règlement de cette crise) ont été
balayées à moindre frais et conséquences par Benjamin Netanyahou qui se
maintient au pouvoir depuis plus de quinze ans dans le but de limiter la portée
de la justice sur sa personne en alimentant le soutien à son gouvernement par
l’érosion chaque jour davantage du droit des Palestiniens sans qu’aucune voix
hypocrite en Occident ne se lève en dehors des formules diplomatiques convenues
pour lui parler des droits des Palestiniens.
Les Palestiniens ne se battent
pas contre le Tchad ou la Roumanie, mais uniquement contre leurs oppresseurs et
cela heureusement n’échappe qu’aux dirigeants occidentaux.
Un chat ne défend son territoire
qu’avec ses griffes et une poule ses poussins qu’à coups de bec.
Il est donc temps de sortir de
cette incantation «Israël a le droit de se défendre» pour évaluer également les
droits des Palestiniens et leur octroyer la permission d’utiliser d’autres
moyens pour défendre leurs droits et leur dignité d’homme, en l’occurrence le
droit et la légalité internationale.
Netanyahou promet une riposte
jamais vue. Laquelle ? Les destructions aveugles de maisons et de vies ? Les
pénuries de vivres et de médicaments ? Les assassinats ciblés ? Qu’est-ce que
les Palestiniens n’ont jamais vu en plus de 70 ans de négation sans trêve de
leurs droits ? En Côte d’Ivoire, on dit « un cabri mort n’a plus rien à
craindre du couteau et déjà couché on ne peut plus tomber.»
Cette action du Hamas qui restera
dans les annales de l’Histoire, doit être interprétée comme un cri de désespoir
du pauvre peuple palestinien, que la communauté dite internationale ne peut
plus ignorer au nom du « droit d’Israël à se défendre ».
Bien entendu qu’Israël a le droit
de se défendre tout comme les Palestiniens, les Ukrainiens et les Zimbabwéens.
Tous les hommes naissent libres et égaux en droit, c’est le premier principe de
la Déclaration des droits de l’homme. Ce principe les Palestiniens doivent être
autorisés à s’en prévaloir sans condition comme les Israéliens, les Ukrainiens,
les indiens d’Amazonie, les maliens et tous ceux dont l’appartenance à la race
humaine n’a pas été remise en cause officiellement par les maîtres de
l’horloge. Il est temps que le malheur succombe.
Les peuples ne sont jamais
mauvais, seuls les individus le sont parfois. Les punitions collectives comme
l’holocauste et autres génocides ne doivent plus exister en ce 21è siècle. Des
instances et mécanismes mis en place par le droit international veillent à ce
que cela soit ainsi en toute impartialité.
Dès lors, si le « Israël a le
droit de se défendre » des dirigeants Occidentaux est un message subliminal
adressé à la Cour Pénale Internationale pour lui couper l’herbe sous les pieds,
ce serait déloyal et mesquin de la part de ceux qui se sont autoproclamés les
garants du droit et de la légalité internationale.
Moritié Camara, Professeur titulaire d’Histoire des Relations
Internationales