Si Maliens savaient, si CEDEAO pouvait! Ainsi peut se résumer, pour en
emprunter à l’adage, le bras-de-fer entre la junte au pouvoir au Mali et la
Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) depuis le coup
d’Etat du 18 août 2020 qui a déposé l’ancien chef de l’Etat Ibrahim Boubacar
Keïta et provoqué la confiscation, par les militaires de Kati, de la révolution
populaire des Maliens. Les hommes en kaki, pour échapper aux sanctions
appliquées aux putschistes avaient, alors, accepté officiellement une
transition de 6 mois devant déboucher sur des élections en février 2022, et à
la clé, la restitution du pouvoir aux civils. Sauf que le colonel Assimi Goïta
avait son calendrier personnel qu’il entendait dérouler jusqu’au bout. D’où
son deuxième coup d’Etat, en mai 2021, contre la transition, pour demeurer seul
maître à bord. Depuis lors, tout est allé selon la volonté du colonel
putschiste qui, a trouvé l’astuce de mettre à profit la querelle entre la
Russie et le reste de l’Occident, pour accomplir son dessein caché. Le Mali est
ainsi devenu une arène pour les gladiateurs occidentaux qui y combattent, par
junte interposée!
Le sentiment anti-français
s’étant également présenté à lui sur un plateau d’or, Assimi Goïta s’en est
servi comme atout de taille pour mettre dans sa poche, un peuple malien qui,
malgré la présence de la France sur le terrain de la lutte contre le terrorisme,
n’a pas arrêté de pleurer au quotidien ses nombreux morts d’attaques armées. Le
redimensionnement de la force française Barkhane sera le prétexte de plus pour
renforcer la «guerre» contre la présence de la France en terre malienne, alibi
dont useront, et abuseront, Assimi Goïta et son gouvernement de la transition,
pour continuer à jeter en pâture une France qui a le malheur de porter le péché
originel d’ancienne puissance colonisatrice. Fort donc de cette légitimité
populaire apparente, mais limitée à une partie du peuple qui fait plus de bruit
que la majorité silencieuse, le patron de la transition fait feu de tout bois,
encouragé par son partenariat avec la Russie, plus précisément avec Wagner, la
société privée russe de sécurité.
Ce qui se joue au Mali, n’est
rien d’autre que l’aspiration d’une junte militaire à s’éterniser au pouvoir
contre la volonté d’une CEDEAO dont les dirigeants ne veulent plus entendre
parler des putschs militaires. Certains de ceux qui nous dirigent sont de bonne
foi, parce qu’un pays confronté ad vitam aeternam aux humeurs de la
soldatesque, comme le Mali, n’aura jamais l’opportunité de s’assurer un
développement durable et inclusif. Par contre, d’autres gouvernants, ceux qui
sont à l’origine de la sortie des militaires de leur caserne pour arbitrer le
jeu politique et mettre fin aux régimes de fer, ne pensent qu’à sauver leurs
fauteuils menacés. Il importe donc que la CEDEAO, pour sa survie et sa
crédibilité œuvre à devenir une véritable CEDEAO des peuples et non un instrument
de défense des intérêts des chefs de l’Etat, membres de ce «syndicat». Et pour
cela, il ne faut pas attendre les coups d’Eta pour prendre des sanctions qui,
in fine, n’asphyxient que les peuples. Les coups d’Etat militaires sont, pour
la plupart, les fruits des viols de la Constitution.
Les plus longues guerres
finissant presque toutes autour de la table de négociation, pourquoi, pour le
bonheur du peuple malien et même des populations de la sous-région, CEDEAO et
Mali n’essaient-ils pas de trouver une solution qui ramènerait la durée de la
transition, à des proportions vraiment raisonnables, des jurisprudences ayant
existé en la matière sur le continent? A moins que cette proposition
inacceptable et illogique de 5 ans de transition ne soit que subterfuge pour
une junte malienne en quête de longévité au pouvoir.
En tout cas, les passagers au
départ ou à destination du Mali, par les compagnies aériennes de la sous-région
et d’Air France, tout comme les voyageurs par voie terrestre, subissent déjà
les conséquences, ou plus exactement inconséquences, de la fermeture des
frontières décidée par la CEDEAO et le Mali. Comme quoi, «vainqueur ou vaincu,
tout le monde sentira», comme le disait un ancien footballeur, défenseur
rugueux de son équipe à l’époque!