Tiemoko Meyliet Koné nommé vice-président, c’est un fauteuil qui a
enfin trouvé preneur depuis la démission, en 2020, de son locataire, Daniel
Kablan Duncan qui en avait sans doute marre d’inaugurer les chrysanthèmes sans
grand espoir que le «vice» qui précède son «président» disparaisse pour en
faire le successeur de Alassane Ouattara qu’il a servi comme ministre et
Premier ministre avant d’en devenir le vice-président. Le nouveau
vice-président qui se trouvait à Abidjan depuis quelques jours en provenance de
Dakar où il exerçait, excusez du peu, comme gouverneur de la Banque centrale
des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO), poste que son chef avait occupé
d’octobre 1988 à décembre 1993, n’était cependant pas l’un des plus
régulièrement cités comme «vice-présidentiable».
Il faisait juste partie de la
short-list de Wakat-Séra pour succéder au Premier ministre Patrick Achi. «A moins que le chef de l’Etat ne ramène,
déjouant toutes les prévisions des bookmakers politiques, Patrick Achi au
poste», avions-nous écrit. C’est chose faite et c’est en véritable DJ d’une
matinée que Alassane Ouattara a fait l’atalaku* de son désormais vice-président
qu’il a présenté comme «un technocrate hors-pair, un brillant économiste, un
homme compétent et travailleur». Tiemoko Meyliet Koné, c’est donc la surprise
du chef, le chef qui a entretenu un vrai faux suspense, pendant une semaine
avant de reconduire son Premier ministre démissionnaire qui doit rendre public,
au plus tard ce vendredi, un gouvernement resserré d’une trentaine de membres.
Le précédent en comptait 41.
Patrick Jérôme Achi et sa troupe
auront pour tâche de porter les priorités du président ivoirien pour 2022,
actions qui tournent principalement autour de l’accélération de
l’industrialisation et la transformation locale des matières premières, la
poursuite du deuxième programme social du gouvernement, l’emploi des jeunes, et
la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. Sans oublier ce chantier
de la réconciliation nationale qui avance d’un pas et recule de plusieurs
autres. La corvée ne sera pas des plus simples. Le gouvernement amaigri par le
régime d’austérité que lui impose le président de la république pour contenir
la conjoncture économique internationale difficile et ramener le train de vie
de l’Etat à des proportions décentes, ne bénéficiera d’aucun état de grâce de
la part de populations prises à la gorge par la cherté de la vie.
Du reste, quelle sera la
composition de ce gouvernement pour lequel on annonce de nombreux partants,
donc de nouveaux arrivants qui auront peu de temps pour prendre leurs marques,
avant la constitution de l’équipe de combat qui ira à l’assaut de la présidentielle
de 2025?
L’opposition y fera sans douteson
entrée, mais risque de se contenter de la portion congrue. Le Rassemblement des
houphouétistes pour la démocratie et le progrès (RHDP) au pouvoir, se taillera
logiquement la part d’éléphant, pardon du lion. Les portefeuilles stratégiques
comme ceux de l’économie, des ressources minières, des infrastructures
portuaires et routières, sauf miracle ou calcul politicien bien pensé,
resteront dans la famille RHDP. Le maroquin de la Défense, lui, augmentera peut-être
de taille, par rapport à la stature de son détenteur qui n’est autre que le
frère cadet du chef de l’Etat, celui qu’on appelle «Photocopie» et qui se nomme
à l’état civil, Téné Birahima Ouattara. Et à qui sont prêtées beaucoup
d’ambitions.
Question: que devient la jeunesse
à qui promesse avait été faite de passer le témoin du pouvoir par les
dinosaures? En tout cas, dans les dernières nominations des têtes de proue, il
n’y rien de nouveau sur les berges de la lagune Ebrié et les jeunes devront
continuer à ronger leur frein. Surtout que la nouvelle constitution ayant remis
les compteurs à zéro, Alassane Ouattara pourrait bien être candidat à sa propre
succession en 2025.
Et les chances de Alassane
Ouattara, qui demeure le maître du jeu et du temps, de briguer un autre mandat
seront confortées par cette épée de Damoclès judiciaire qui plane encore sur la
tête de son opposant de toujours, Laurent Gbagbo. Ce dernier a été, en effet,
condamné par contumace par la justice de son pays, le 18 janvier 2018, à 20 ans
de prison dans l’affaire dite du «braquage» de l’agence nationale ivoirienne de
la BCEAO, lors de la crise post-électorale de 2010-2011.
Mais beaucoup de surprises
peuvent encore se dresser sur la route qui mène à 2025! Pour le moment, les
Ivoiriens sont en attente du prochain gouvernement de Patrick Achi qui devrait
être dévoilé avant la fin de cette semaine.
W S