Le coronavirus qui provoque le Covid-19 a déjà beaucoup muté depuis son apparition fin 2019 en Chine. En plus de la source initiale, dite « sauvage » qui s’est propagée dans le monde entier en 2020, des variants plus contagieux, parfois plus dangereux ou même pouvant échapper en partie à la vaccination, ont vu le jour. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et les États du monde entier suivent donc avec attention l’apparition de ces variants pour pouvoir adapter la riposte face à la pandémie.
En Afrique, comme il y a peu de laboratoires équipés pour le
séquençage du génome, c’est-à-dire capables de lire le code génétique du virus,
l’OMS a organisé un réseau de laboratoires de référence, qui reçoivent des
échantillons de tout le continent pour surveiller l’apparition de ces virus
mutants. « Jusqu’à présent, 24 000 échantillons ont été séquencés en Afrique »,
explique la directrice de l’OMS Afrique, le docteur Matshidiso Moeti. « On sait
que ce n’est pas assez et que nous devons rapidement augmenter en cadence », à
cause de la montée en puissance de certains variants.
D’après les données déjà collectées par l’OMS, le variant
Alpha, aussi appelé variant anglais, est recensé dans 32 pays d’Afrique. On le
retrouve surtout dans le nord-ouest et la partie centrale du continent. Le
variant Beta, apparu en Afrique du Sud, est, lui, présent dans 27 pays
africains. Il est surtout signalé dans les pays du Sud. « Ces deux variants
sont plus transmissibles que le virus sauvage », explique le docteur Moeti, mais
le variant Delta, le variant indien, l’est encore plus selon elle. À ce jour,
il a été recensé dans 16 pays africains.
En Afrique du Sud, alors que le pays traverse une troisième
vague de Covid-19 encore plus violente que la précédente, il a pris le pas sur
le variant local, le Beta, et est devenu majoritaire. En Ouganda, il représente
désormais 97% des tests effectués et 84% en RDC.
« C’est le variant le plus contagieux à ce jour. Il pourrait
être jusqu’à 60% plus transmissible que les autres variants, précise la
directrice de l’OMS en Afrique. Les premières observations laissent penser que
le variant Delta est lié à des formes plus graves et plus longues de Covid-19.
»
Variants émergents en
Afrique
« Une transmissibilité plus forte, cela veut dire plus de
cas, plus d’hospitalisations et un plus grand risque de submerger les systèmes
de santé », rappelle Matshidiso Moeti.
En plus de ces trois variants considérés comme «
préoccupants » par l’OMS, d’autres variants émergent sur le continent. Ce sont
des variants dits « d’intérêts », « à suivre », car ils se propagent dans
plusieurs pays et peuvent posséder les mêmes mutations retrouvées dans les
variants « préoccupants ». Ils nécessitent encore d’être évalués plus en
détails.
En premier lieu, le variant Eta, aussi appelé variant
nigérian, même si son origine n’est pas clairement prouvée. Apparu en décembre
2020, « il est désormais présent dans 21 à 25 pays d’Afrique, et est devenu le
troisième variant le plus répandu sur le continent, après Alpha et Beta »,
détaille le docteur Nicksy Gumede-Moeletsi, virologue à l’OMS Afrique. « On
commence aussi à observer le variant Kappa, une sous-lignée du variant indien
[variant Delta], observé dans trois pays du continent. Enfin, le variant
Epsilon, connu comme le variant californien, a été observé dans deux pays
d’Afrique. »
Des vaccins efficaces
Tous les virus mutent, l’apparition des variants est donc
normale. Heureusement, pour l’instant, les vaccins sur le marché semblent
efficaces contre ces différentes souches de coronavirus. Même s’ils n’empêchent
pas forcément toutes les contagions et les formes bénignes, les études
réalisées dans les pays où la vaccination est déjà très avancée montrent que
les vaccins limitent le nombre de formes graves et d’hospitalisation selon les
experts de l’OMS. En ralentissant la propagation du virus, les vaccins freinent
aussi l’apparition de nouvelles formes de virus, et donc des variants
dangereux.
« La vaccination est clairement une solution pour en finir
avec cette pandémie, pourtant à peine plus d’1% des Africains sont complètement
vaccinés », déplore Matshidiso Moeti, qui rappelle aussi l’importance des
gestes barrières.
- Qu’est-ce qu’un
variant ?
Tous les virus mutent avec le temps, surtout lorsqu’ils
circulent abondamment dans la population. En se multipliant, de petites erreurs
apparaissent dans le code génétique du virus. C’est ce qu’on appelle les
mutations, qui peuvent changer les propriétés du virus, ou au contraire ne pas
entrainer de changement. Il existe en réalité une multitude de variants, mais
seuls une poignée ont acquis des propriétés plus dangereuses. Ce sont ces
variants qui sont surveillés par les scientifiques et les pouvoirs publics.
- Comprendre les
différentes catégories de variants
Selon la classification de l’OMS les variants sont désignés
par une lettre de l’alphabet grec et peuvent être « d’intérêts » ou considérés
comme « préoccupants ». Les variants « à suivre » ou « d’intérêt » sont ceux
qui se propagent au sein d’une population ou qui sont détectés dans plusieurs
pays. C’est le cas du variant Epsilon, apparu aux États-Unis en mars 2020 par
exemple (le variant californien), ou Thêta, découvert aux Philippines en
janvier 2021. En Afrique, le variant Eta, le variant nigérian fait partie de
cette catégorie.
Les variants sont jugés « préoccupants » lorsque des études
montrent qu’ils se transmettent aussi plus facilement, qu’ils sont plus
virulents, ou qu’ils échappent à l’action des médicaments, des vaccins, ou la
détection par les tests diagnostiques par exemple. Le variant Alpha est aussi
connu comme le variant « anglais » se propage plus vite que la souche sauvage
et l’a remplacée dans de nombreux pays. Le variant Bêta également appelé
variant « sud-africain » ou le variant Gamma, le variant « brésilien »,
possèdent notamment des mutations qui leur permettent d’être moins sensibles aux
vaccins. Le variant Delta, venu d’Inde, reste à ce jour le variant le plus
contagieux, « jusqu’à 60% plus transmissible que les autres », selon les
experts.
Avec RFI