Quitte à paraître peu crédible, le chef de file de l’opposition tient à
se couvrir des lauriers de cette évolution. En témoigne la dernière lettre de
Mamadou Sylla au président de la République. Pourtant, le président Alpha Condé
a écrit son scénario, de sorte que cette libération de détenus politiques ne se
justifie que par son seul libre arbitre. C’est le sens de l’éditorial de Talibé
Barry.
Cette lettre de Mamadou Sylla,
qui a certes le flair d’un félin politique, s’apparente tout de même, à s’y
méprendre, à un bien maigre lot de consolation. En rappelant dans cette missive
datée du 30 juillet, avoir déjà adressé des mémos au président Alpha Condé, en
vue de cette libération, le chef de file de l’opposition admet aussi, que
malgré le climat enthousiaste de sa rencontre avec Alpha Condé à Sekhoutoureah,
son cabinet avait échoué à faire plier le champion du RPG. Le bataillon de
Mamadou Sylla avait dû alors ravaler son amour-propre, pour se contenter d’une
visite aux détenus politiques à la Maison centrale de Conakry.
La ligne dure adoptée, quelques
semaines après, par le président de l’UDG contre le régime Condé, traduisait
éloquemment le goût fielleux de cet échec. Même si la réplique cinglante du
camp présidentiel avait valu à Mamadou Sylla son élimination du cérémonial
d’accueil à l’aéroport de Conakry.
A travers sa lettre au chef de
l’Etat, Mamadou Sylla tente donc de soigner ses meurtrissures nées du fiasco de
sa démarche urbi et orbi en faveur de la libération des détenus politiques.
Pourtant, on n’a guère besoin
d’être un prestidigitateur pour comprendre que le président Alpha Condé avait
réglé comme du papier à musique le processus de libération de ces détenus. Pour
qu’en définitive, il soit le seul à en récolter le bénéfice politique. Puisque
la justice a condamné, seule sa grâce pouvait sortir Grenade et compagnie des
affres de la prison. Une décision qu’il a d’ailleurs prise sur la foi d’excuses
publiques des concernés.
Et puis, en détention prolongée
depuis près de neuf mois, sans la perspective de l’ouverture d’un procès, il
fallait aussi la magnanimité présidentielle pour que quatre responsables de
l’UFDG rentrent à la maison. La semi-liberté accordée à Chérif Bah et Cie par
le directeur de l’administration pénitentiaire, avec la discrète mais
inéluctable instruction ou bénédiction présidentielle, cette semi-liberté donc
s’inscrit manifestement dans la logique de laisser voir la haute et lourde main
présidentielle derrière cette libération, fut-elle conditionnelle.
Autrement dit, pas question de
faire élargir ces responsables de l’UFDG dans le sillage des mémos du chef de
file de l’opposition. Mieux, il fallait aussi opter pour une mesure de l’administration
pénitentiaire, au lieu d’une liberté conditionnelle accordée par un juge,
puisque cela sonnerait comme l’aboutissement des efforts des avocats de ces
détenus politiques. Et le tour est joué.
Au final, l’ombre tutélaire et la
volonté personnelle de notre hyper-président aura été suffisamment affirmés
voire martelée.
Autant dire que Mamadou Sylla et
son cabinet peuvent bien se targuer d’avoir tordu la main au Fama national.
Mais, nul n’est dupe sous les tropiques des ex-Rivières du sud.
En liberté ou en détention, notre
docte Professeur-Président a infailliblement droit de vie et de mort sur chaque
Guinéen, établi sur la moindre portion des 246 Km2 du territoire national.
Talibé Barry