La détention prolongée des leaders du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) est mal perçue dans une frange importante de l’opinion publique. Maître Mohamed Traoré, ancien bâtonnier, regrette l’attitude de la justice dans le traitement de ce dossier. Il l’a dit dans l’émission Mirador de la radio FIM FM ce lundi 1er mai 2023.
« Quand je vois
ce qui se passe actuellement dans le traitement de certains dossiers judiciaires,
je suis très mal à l’aise et je suis terrifié. J’ai un sentiment de frustration
par rapport à tout ce qu’on a connu il y a moins de deux ans. Il vous
souviendra qu’après le 5 septembre, des magistrats ont clairement dit qu’ils
étaient sous pression, qu’il y avait beaucoup d’immixtion dans le
fonctionnement de l’appareil judiciaire et se sont engagés à faire peau neuve
et de regagner la confiance des justiciables. Mais lorsqu’on voit ce qui se
passe actuellement, on a l’impression que rien n’a changé et on a l’impression
que, parfois, la justice est utilisée comme un instrument pour faire taire les
gens », dit d’entrée maître Mohamed Traoré.
Pour ce membre du Conseil national de la transition (CNT), la
gestion du dossier Oumar Sylla (Foniké Menguè), coordinateur national du FNDC
et détenu depuis 9 mois sans jugement, la justice n’a pas sa mue malgré toutes
les annonces. « Je me rappelle que lorsque Foniké Menguè a été arrêté pour
la deuxième fois, nous sommes allés au parquet de Dixinn pour demander à ce
qu’on programme le dossier pour jugement. Ils nous ont dit carrément que le
dossier ne pouvait pas être jugé avant la tenue du référendum et des élections
législatives (du 20 mars 2020, ndlr). Lorsqu’on regarde aujourd’hui ce qui se
passe, on a l’impression que c’est la même chose qui se passe. Lorsqu’on a
besoin de mettre hors d’état de nuire un certain nombre de personnes, on passe
par la justice pour qu’elle entre en jeu. Je pense que tout cela n’est pas bon
l’image de la justice de notre pays. En tant qu’activiste des droits de l’Homme,
on ne peut être que déçu. On ne pouvait pas imaginer qu’avec tout ce qui a été
fait comme mea-culpa, on pouvait encore tomber dans ce genre de situation… »
Poursuivant, maître Mohamed Traoré va demander aux magistrats
de prendre leur courage à deux mains. « Je vous dis clairement, je n’en veux
pas au ministre de la justice, je n’en veux pas à l’exécutif de façon générale.
J’en veux aux magistrats qui ne prennent pas leur responsabilité. Qu’est-ce qui
a fait la notoriété du ministre Charles Wright ? C’est parce qu’à un
moment, il a pris le courage de rendre ses décisions en toute indépendance, en
refusant toute sorte de pression. Qu’un magistrat rende une décision et qu’il
soit suspendu ensuite à cause de cette décision, je pense que ce sont tous les
défenseurs des droits de l’Homme qui vont prendre sa défense. Pour l’instant,
on n’a jamais entendu un magistrat dire qu’il a pris une décision et qu’il a
été sanctionné par la suite. Il appartient aux magistrats eux-mêmes de faire en
sorte que l’indépendance de la magistrature soit une réalité. Il est encore
temps qu’elle nous donne la preuve qu’on peut lui faire confiance »,
a-t-il laissé entendre.
Alpha Mamadou Diallo
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