De retour à Conakry depuis le dimanche dernier, Dr Thomas Boni Yayi, médiateur désigné dans la crise guinéenne par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), est l’objet de toutes les attentions de la part des forces vives, qui compte sur sa sagacité pour vaincre les signes indiens de la discorde entre les parties prenantes au processus de transition. Il s’agit d’un véritable défi herculéen pour l’ancien président béninois. Car rabibocher une junte qui se sent investie d’une mission de démiurge et une classe politique à l’égo surdimensionnée ne sera pas une mince affaire. Si ce n’est d’ailleurs pas à première vue une bouteille à l’encre.
Le retour du médiateur dans la cité, dimanche dernier, s'est
opéré de manière feutrée. Loin des objectifs des caméras et des micros de la
presse privée. Suite à une injonction faite aux reporters déployés sur place,
par la direction de la communication et de l’information de la présidence de la
République, de débarrasser le plancher. Une attitude triviale dont aurait pu se
passer la direction de la DCI. Qui s’est retrouvée de but en blanc sous le feu
des critiques les plus acerbes de la part de la corporation. Ce clivage
entretenu à dessein par la DCI est perçu comme un mauvais signe dans la
perspective de cette médiation. Qui risque à cette allure, d’être réduit dans
le meilleur des cas à un monologue, et dans le pire des cas à une pétaudière.
Soit en porte-à-faux des résultats escomptés.
Les esprits chagrins pensent d’ailleurs que tous les
ingrédients sont réunis pour que le projet de médiation finisse en eau de
boudin. Vu que c’est toujours le statu quo ante qui demeure dans les rapports
entre le pouvoir et les forces vives, où chaque camp campe sur ses positions.
Au fil du temps, la situation n’aura fait qu’empirer, avec
la dissolution du FNDC, et les violences qui en ont découlé. Une atmosphère
apocalyptique dont les échos ont ameuté Mme le Haut-Commissaire des Nations
Unies aux Droits de l'Homme. Qui, dans la foulée, s'est fendue d’une missive au
vitriol, adressée directement au chef de la junte.
Dans ce coup de semonce contre le pouvoir de Conakry,
Michelle Bachelet y va franco, en se disant ‘’profondément préoccupée face à
l’évolution récente de la situation des droits de l’homme en République de
Guinée.’’ Avec une mise en relief ‘’du recours à la force par les forces de
sécurité lors des manifestations des 28 et 29 juillet 2022, qui aurait entraîné
un certain nombre de morts et de blessés. Des actions qui, selon le
Haut-commissaire aux Droits de l’Homme, pourraient constituer des violations
des droits de l’homme, y compris des droits à la vie et à l’intégrité
physique.’’
Last but not least, Mme Bachelet exhorte le ‘’gouvernement à
revenir sur la décision de dissolution du FNDC, et à garantir à tous les
Guinéens les libertés fondamentales contenues dans la Constitution guinéenne et
conventions internationales relatives aux droits de l’homme auxquelles la
République de Guinée est partie’’.
Il y a de quoi échauder le médiateur.
Mamadou Dian Baldé