Le nouvel homme fort de Ouagadougou, le capitaine Ibrahim Traoré
effectue, en principe, ce mercredi, une visite d’amitié et de travail à Bamako.
Sur place, «l’illustre hôte du Mali», comme le qualifie le communiqué du
ministère malien en charge des Affaires étrangères, échangera sur divers sujets
avec son homologue, le colonel Assimi Goïta. Et même si le menu de ce
séjour qui devrait durer de 15h à 17h40 ne le dévoile pas, le plat de
résistance sera probablement la situation sécuritaire qui, loin de s’améliorer
dans les deux pays voisins, inquiète plutôt. Sans aucun doute, la coopération
avec la Russie qui est devenue le sujet de débats le mieux prisé dans les rues
et chaumières de Ouagadougou, s’invitera autour du thé de 16h que partagerons
les jeunes chefs de l’Etat trentenaires. En clair, les deux présidents par
intérim pourront difficilement éluder dans leurs discussions de quelques
heures, les relations avec la Russie.
Certes, personne, encore moins
une norme en matière de relations internationales, n’interdit ou n’impose à un
pays ses partenariats bilatéraux ou multilatéraux. Et la Russie, le pays de
Vladimir Poutine est bel et bien, depuis toujours, en coopération avec le
Burkina Faso et le Mali, tout comme elle l’est avec d’autres pays à travers le
monde. Sauf que la société de sécurité privée russe Wagner, est passée par là!
Foncièrement critiquée dans son mode de fonctionnement décrié par les
organisations de défense et de promotion des droits humains, le groupe dont les
éléments sont régulièrement accusés d’exactions sur les populations civiles
dans les pays où il est implanté, soit la Centrafrique, la Libye et le Mali
pour l’Afrique, Wagner est loin de répondre aux aspirations des populations
confrontées à la plaie de l’insécurité. Pire, malgré la présence de Wagner et
de ses hommes sur les rives du Djoliba, les groupes armés terroristes, que ce
soit l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS), le Groupe de soutien à l’islam et
aux musulmans (Jnim) ou d’autres organisations du même acabit affiliées à al-Qaïda
ou à Daech, n’ont autant semé larmes et désolation au sein des Forces armées
maliennes (FAMa) et des populations civiles qui ne savent plus à quel prophète
protecteur se vouer.
Et le Mali doit bien se chercher
maintenant! Le Mali que ses nouveaux maîtres militaires ont retiré de la force
conjointe du G5 Sahel formée par le ce pays, le Tchad, le Niger, le Burkina
Faso et la Mauritanie, le Mali qui s’est débarrassé des forces française
Barkhane et européenne Takuba au nom d’un sentiment anti-occident savamment
construit et nourri d’infox, le Mali pour qui la MINUSMA (Mission
multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali)
était devenue une cible à abattre, le Mali qui accuse la France de soutenir les
terroristes et a porté plainte contre elle à l’ONU qui attend toujours les
preuves des allégations des autorités de la transition malienne, le Mali qui
retient en otage 46 militaires ivoiriens en mission, etc., en somme, un Mali
dont la junte militaire au pouvoir ne peut qu’éprouver aujourd’hui quelques
regrets. Les dirigeants par intérim savent peut-être, maintenant, qu’ils sont
allés trop loin dans l’exhibition d’un patriotisme, d’une fierté et d’un
nationalisme d’un autre âge. Car, c’est le même Mali qui se rapproche encore de
la MINUSMA et est prêt à reprendre sa collaboration avec la France «à condition
qu’elle respecte la souveraineté du Mali».
C’est comme un air de désillusion
qui s’installe au Mali! En tout cas, le capitaine Ibrahim Traoré qui porte
l’espoir de populations burkinabè dont la seule préoccupation, est,
aujourd’hui, de vaincre l’hydre terroriste et de réinstaller dans leur villages
et villes d’origine son plus du million de Personnes déplacées internes, saura
sans doute faire le bon choix pour le bonheur des siens.
RFI