Plusieurs centaines de détenus dont une soixantaine de jihadistes se sont échappés mardi soir d'une prison située en banlieue d'Abuja, capitale du Nigeria, après une attaque, a affirmé mercredi le gouvernement.
Les 64 jihadistes incarcérés dans cet établissement situé
dans la ville de Kuje se sont évadés, « plus aucun ne se trouve à
l'intérieur », a déclaré mercredi devant la presse le ministre de la
Défense, Bashir Magashi, ajoutant qu'il était "très vraisemblable"
que des combattants de Boko Haram aient mené l'attaque.
L'organisation État
islamique (EI) a, de son côté, revendiqué mercredi l'attaque de la prison.
« Les combattants de l'État islamique ont fait
irruption hier dans une prison du gouvernement nigérian dans la ville de Kuje,
dans la banlieue d'Abuja, après avoir abattu ses murs, et ils ont réussi à
libérer des dizaines de prisonniers », a annoncé EI via son organe de
propagande Aamaq.
Des commandants d'Ansaru, un groupe jihadiste affilié à
Al-Qaïda, dont le chef Khalid Barnawi, étaient détenus dans ce centre
pénitentiaire de moyenne sécurité de Kuje, depuis leur condamnation en 2017.
Des habitants de la région ont rapporté avoir entendu mardi
soir de fortes explosions et des tirs près de la prison située à seulement 40
km de la capitale et de la villa présidentielle.
« On a entendu des coups de feu dans ma rue. On pensait
que c'était des voleurs armés », a affirmé un habitant. « La première
explosion est survenue après les coups de feu. Puis il y en a eu une deuxième
et une troisième ».
Le président Muhammadu Buhari s'est rendu sur place mercredi
après-midi, où les débris calcinés d'un bus et de plusieurs voitures semblaient
comme figés devant une partie détruite de la prison.
« Je suis déçu par le système de renseignement. Comment
des terroristes peuvent-ils s'organiser, disposer d'armes, attaquer une
infrastructure sécuritaire et s'en sortir ? », a déclaré M. Buhari dans un
communiqué.
Le dirigeant nigérian, sous pression en raison de
l'insécurité généralisée qui fait rage dans le pays, devait partir en voyage
officiel au Sénégal peu après avoir visité la prison.
Mercredi, en fin d'après-midi, plus de 600 détenus ont été
"récupérés" et moins d'une centaine d'autres sont toujours dans la
nature, a affirmé le porte-parole des services pénitentiaires, Abubakar Umar. Un
agent de sécurité a été tué dans l'attaque, a-t-il ajouté.
Les responsables de la prison tentent toujours de déterminer
le nombre exact de détenus manquant à l'appel, selon M. Umar.
Dans la matinée, les forces de sécurité ont ramené à la
prison, dans une camionnette noire, une vingtaine de détenus recapturés, a
constaté sur place un correspondant de l'AFP.
L'ancien haut responsable de la police, Abba Kyari, détenu
au Centre pénitentiaire de Kuje dans l'attente de son procès pour trafic de
drogue, est toujours en détention, a-t-il ajouté.
Embuscade
Les forces de sécurité du Nigeria combattent les jihadistes
de Boko Haram et ceux du groupe Etat islamique en Afrique de l'Ouest (Iswap)
dans le nord-est du pays, où un conflit vieux de 13 ans a fait 40.000 morts et
2,2 millions de déplacés.
L'armée est également déployée pour lutter contre des bandes
criminelles lourdement armées, appelées localement "les bandits", qui
terrorisent le nord-ouest et le centre, attaquant les villages et procédant à des
kidnappings de masse.
Quelques heures avant l'attaque du la prison de Kuje, des
hommes armés ont également tendu une embuscade à un détachement d'agents de
sécurité du président Muhammadu Buhari - qui n'était pas dans le convoi -, près
de sa ville natale où il doit se rendre ce weekend dans l'Etat de Katsina
(nord-ouest).
Deux agents ont été légèrement blessés dans l'attaque et
l'identité des auteurs reste pour l'heure inconnue. "Les assaillants ont
ouvert le feu sur le convoi (...) mais ont été repoussés par des militaires, la
police et les agents du DSS", a déclaré la présidence.
Cette embuscade illustre une nouvelle fois l'insécurité
quasi-généralisée dans le pays le plus peuplé d'Afrique (215 millions
d'habitants).
Au Nigeria, les prisons, souvent surpeuplées et gardées par
des membres des forces de sécurité débordés, sont la cible de fréquentes
attaques.
L'année dernière, plus de 1.800 détenus s'étaient ainsi
échappés après que des hommes lourdement armés eurent attaqué à l'explosif une
prison du sud-est du pays, en proie à des agitations séparatistes.
Par Agence France Presse
(AFP)