Le procès est inédit en Gambie, mais doit pouvoir inspirer la justice
et les consommateurs des autres pays africains, car, le mal est général sous
les tropiques. Le contrôle des produits de de grande consommation, et bien
d’autres comme les armes légères, constitue un véritable problème. La
porosité des frontières, qu’elles soient terrestres, aériennes ou maritimes est
une réalité qui se conjugue avec la corruption et la négligence pour servir de
socle à un désordre bien entretenu, car bénéficiant à des opérateurs
économiques véreux, mais aussi à certains dirigeants ayant pour devise «se servir
» et non servir. Résultat des courses, la vie des populations est constamment
en danger, comme en Gambie où 70 enfants sont passés de vie à trépas pour avoir
ingurgité des sirops, quatre pour être plus précis.
Sensés soigner le rhum et la
toux, ces produits importés de l’Inde, se sont révélés être de véritables
poisons. Selon des investigations menées par l’Organisation mondiale de la
santé (OMS) et des chercheurs américains, les sirops contiendraient du
diéthylène glycol et de l’éthylène glycol dans une teneur « inacceptable ». Un
contrôle rigoureux aurait dû s’imposer au niveau des autorités administratives
que des services compétents sanitaires. Ainsi, en amont et avant toute
commercialisation et utilisation de ces sirops, les substances toxiques en
question auraient été détectées et les actions appropriées menées. On en serait
donc pas arrivé à ce drame qui a conduit dans le box des accusés, le ministère
de la Santé et l’Agence de régulation du médicament.
Les avocats des parties dans ce
procès, qui aussitôt ouvert a été reporté, se livreront aux joutes oratoires
classiques basées sur des démonstrations et des preuves, pour mettre, certains,
hors de cause leurs clients et d’autres, pour défendre «la veuve et l’orphelin
», en l’occurrence ici, les parents de pauvres enfants innocents qui
contiennent difficilement leur colère mêlée de grande douleur. Mais, une vie
perdue peut-elle être remplacée ? Non ! Il aurait simplement fallu aux
dirigeants gambiens de jouer leur rôle en assurant à leur peuple, santé et
protection, pour éviter ce genre de drame qui ne leur fait pas honneur. Le fait
le plus ahurissant est que ce pays ne dispose pas de laboratoire et d’outils
adéquats pour examiner ce genre de produits venus d’ailleurs. Surtout que les
populations africaines et plus particulièrement gambiennes sont démunies, donc
compte tenu de leur faible pouvoir d’achat n’ont d’autre choix que de se rabattre
sur des produits moins chers, dont les médicaments de rue, pour se soigner.
Il est temps que l’intérêt
général soit la priorité numéro 1 de ceux qui nous gouvernent. Et surtout, que
des instruments adéquats soient mis en place pour assurer le contrôle des
produits de grande consommation, qu’ils proviennent de l’extérieur ou qu’ils
soient fabriqués localement. En tout cas, à l’exemple de ces 20 familles
gambiennes qui ont intenté un procès dit historique contre leurs autorités,
toute victime de ces erreurs ou négligence, doit pouvoir saisir la justice pour
faire respecter ses droits. Malheureusement, en bon Africain, on se laisse
facilement convaincre par la formule : « C’est la volonté de Dieu »! Pourtant,
Dieu n’est pas un assassin !
Justice pour les enfants morts
des…sirops de la mort !