Refondation des institutions. Justice. Retour à l’ordre constitutionnel. Le CNRD semble s’éloigner peu à peu de sa mission essentielle. Au lieu de proposer un agenda consensuel de la transition pour permettre à la Guinée de réintégrer les différentes organisations sous-régionales, l’Union Africaine et renouer avec les partenaires bi et multilatéraux, les nouveaux hommes forts de Conakry continuent ce qui ressemble à une fuite en avant en déroulant leur propre agenda. A travers ses actes, le CNRD donne l’impression de vouloir refuser d’aborder les questions et sujets importants de la transition. À dessein.
Après avoir détruit des habitations dans les quatre coins de
la Guinée sans le respect des lois en vigueur par endroit, placé des
dignitaires de l’ancien parti au pouvoir en détention sans pour autant
présenter des preuves irréfutables et tangibles à l’opinion à travers la CRIEF,
du moins jusqu’à date, le CNRD ne se fixe pas de limites. Désormais, c’est une
entreprise prospère créée et exploitée par des nationaux qui est dans l’œil du
cyclone.
Sous l’influence de plusieurs personnes dans l’entourage du
Président déchu Alpha Condé, l’État avait décidé de récupérer Guinée Games,
puis transféré toutes ses activités à la Loterie Nationale de Guinée (LONAGUI).
Finalement, après plusieurs tractations et négociations entre les deux parties,
l’entreprise a continué à fonctionner sans pour autant soupçonner qu’elle se
retrouverait quelques mois plus tard dans le collimateur des nouveaux hommes
forts de Conakry.
Au mois de mai dernier, le secrétaire général de la
Présidence de la République, le Colonel Amara Camara demande de façon
inattendue « à tous les acteurs impliqués dans la commercialisation en réseau
physique de distribution des produits visés…, de prendre attache avec la
Direction Générale de la Loterie Nationale de Guinée S.A LONAGUI), pour le transfert
de leurs activités. ». Pour quelle raison ? On ne sait toujours pas.
Tout ce que l’on sait, c’est que l’opinion publique
guinéenne a été enfumée par des rumeurs selon lesquelles les jeux d’argent et
de hasard sont, partout dans le monde, gérés par l’État. Ce qui est totalement
faux et absurde. En exemple, la France a fait sauter un monopole vieux de 471
ans à la veille de la Coupe du Monde de Football 2010 en Afrique du Sud. Bien
que la libéralisation soit strictement réglementée, 11 opérateurs des jeux
avaient pu obtenir 17 licences à cette époque. Le gouvernement français est
même allé très loin en décidant quelques années plus de privatiser et de mettre
en bourse la Française des Jeux (FDJ), l’équivalent de la Loterie Nationale de
Guinée (LONAGUI). Une opération qui avait rapporté 2 milliards d’euros dans les
caisses de l’État en 2019. Depuis cette date, l’État français ne détient plus
que 20% du capital de la FDJ.
Aujourd’hui, ce que le CNRD doit savoir, c’est qu’en plus
des taxes que cette entreprise privée paie à l’État, à côté, elle emploie de
milliers de jeunes diplômés à travers le pays. A travers sa politique de
sponsoring, plusieurs autres entreprises dans différents secteurs d’activités
ont pu renaître de leurs cendres, puis prospérer. Le soutien au monde culturel
et sportif est sans précédent en Guinée.
Si on arrache de force cette entreprise dans les mains de
ses propriétaires, il faudra s’attendre à des conséquences graves et
incommensurables. L’effondrement et la faillite de plusieurs entreprises seront
inéluctables. Ce qui signifie, les pertes d’emploi et l’appauvrissement. Sous
une forte pression de la communauté internationale et d’une grande partie des
acteurs politiques guinéens, le CNRD a tout à gagner en évitant les grognes sociales
qui ne font l’affaire de personne. Il serait intelligent et judicieux de se
mettre autour d’une table pour discuter et négocier. Le dialogue règle tout.
Tanou Diallo