La junte militaire prononce la dissolution du Front national pour la
défense de la constitution (FNDC). La coalition de syndicats, de partis
politiques et d’organisations de la société civile ne l’entend pas de cette
oreille et fait de la résistance. Mieux, le FNDC qui avait suspendu ses
manifestations, en intelligence avec la médiation de la Communauté économique
des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), relance la machine déjà à partir de
ce mercredi 17 août.
Tout porte à croire que la trêve
concédée par le Front dans le but de faciliter le passage de la transition à la
junte appartient désormais au passé. Pouvait-il en être autrement quand les
putschistes se mettent dans une transition sans limite, se donnent droit de vie
et de mort sur des populations guinéennes qui voient leur rêve de liberté
s’envoler alors qu’elles croyaient sonnée la fin du cauchemar, avec la chute de
Alpha Condé? En effet, il a vite déchanté, le peuple dont le libérateur s’est
mué en bourreau, embastillant à tour de bras et transformant la Guinée en
goulag à ciel ouvert où s’est établie la règle non écrite de ne pas contredire
les nouveaux maîtres de Conakry. La junte militaire qui ne manifeste aucun
signe de rétrocéder aux civils le pouvoir qu’elle a pris par les armes,
multiplie les exactions contre les leaders de l’ancienne opposition, les hauts
cadres du régime précédent et les responsables et militants du FNDC.
Désormais, c’est la même chape de
plomb qui continue d’écraser les Guinéens depuis, les anciens prédateurs de la
démocratie qu’étaient, entre autres, le capitaine Moussa Dadis Camara et Alpha
Condé, le putschiste civil qui a charcuté la Constitution pour s’offrir un 3e
mandat et s’ouvrir un boulevard vers la présidence à vie. D’où viendra la
délivrance pour ce peuple qui est comme condamné à vivre le martyr, si le FNDC
aussi est étranglé par le colonel putschiste, Mamady Doumbouya qui voit
l’ennemi partout et entreprend ainsi de faire place nette autour de lui? Que
pourra la CEDEAO dont la junte a récusé le premier médiateur en l’occurrence
Mohamed Ibn Chambass pour ouvrir les bras à l’ancien président béninois Thomas
Boni Yayi qui, pour l’instant est loin d’avoir posé son empreinte sur le
dossier de la transition guinéenne? Si la sentinelle qu’est le FNDC tombe, à
quel saint pourraient encore se vouer les populations contraintes par les armes
au silence?
En même temps, les putschistes en
voulant se débarrasser du FNDC ignorent peut-être qu’ils sont en train de se
tirer une balle dans le pied, vu qu’ils n’auront plus un interlocuteur précis
en face. Or, et c’est certain, la junte militaire, à force de serrer la vis,
finira par la foirer et elle tournera dans le vide. Mais le FNDC, fort de sa
capacité de mobilisation contre les assassins de la démocratie est loin d’avoir
dit son dernier mot. Et ses marches et meetings pacifiques, viendront sans
doute, un jour, à bout de la force et des actes de répression violents des
militaires. Sauf que, la dernière protestation interdite par la junte s’est
soldée par des morts suite à des échauffourées entre les forces de l’ordre et
des jeunes manifestants. La rue est incontrôlable et la junte en sait quelque
chose, elle qui a profité de son ébullition qui a fortement contribué à la
fragilisation puis la déstabilisation du régime Condé. Les putschistes en
prononçant la dissolution du FNDC jettent simplement de l’huile sur le feu,
pour tout dire. Ils vont sans doute déployer l’artillerie lourde pour empêcher
les leaders de la coalition de se mouvoir.
Mais la junte militaire
pourra-t-elle faire tomber la fièvre en cassant le thermomètre? Rien n’est
moins sûr!
WS