La vice-présidente américaine Kamala Harris arrive en Zambie ce vendredi 31 mars, dernière étape de sa visite de neuf jours sur le continent africain. Ce voyage fait suite au sommet États-Unis/Afrique en décembre à Washington, au cours duquel Joe Biden avait promis un engagement plus important des États-Unis en Afrique et annoncé 55 milliards de dollars sur trois ans pour le continent.
« Vous n’avez pas fini de nous voir en Afrique », a lancé
Antony Blinken en décembre dernier à Washington, lors du sommet
États-Unis/Afrique. Le secrétaire d’État américain s’est, depuis, rendu au
Niger et en Éthiopie. Un peu plus tôt cette année, la secrétaire au Trésor
américain, Janet Yellen, était au Sénégal, en Zambie et en Afrique du Sud.
Cette fois-ci, c’est la vice-présidente des États-Unis,
Kamala Harris en personne, qui s’est déplacée. Il s’agit d’une véritable
offensive. Dès son arrivée à Accra, en début de semaine, le ton était donné : «
Je suis très enthousiaste quant à l’avenir de l’Afrique. Très enthousiaste
quant à l’impact sur le reste du monde, y compris les États-Unis. Quand je
regarde ce qu’il se passe sur ce continent, le fait que l’âge moyen est de 19
ans, et ce que cela veut dire en termes de croissance, d’opportunités,
d’innovations et de possibilités… Je vois dans tout cela de grandes
opportunités, non seulement pour le continent, mais pour le monde entier. »
Rattraper le retard
Washington veut renforcer et développer les liens avec
l’Afrique – notamment les liens économiques – et promouvoir les investissements
pour tenter de contrer la montée en puissance de la Chine et de la Russie sur
le continent. Les États-Unis veulent rattraper leur retard, explique Ousmane
Sène, directeur du Centre de recherche ouest-africain. Un retard qui s’est
creusé sous la présidence de l’ancien président américain Donald Trump.
« L’Amérique est très présente dans les domaines de
coopérations sur le continent, souligne Ousmane Sène, mais dans le secteur
économique, sa présence est minime. Il faut que les États-Unis apprennent à
connaître l’Afrique. Le continent africain est un grand point d’interrogation
pour eux. Il faut qu’ils apprennent à découvrir cette Afrique positive, cette
Afrique qui est en train de faire des grands pas dans tous les domaines, qui
est prête à accueillir tous les investisseurs européens, américains,
asiatiques. Des investissements gagnant-gagnant. Les possibilités sont là, en
train de dormir. Et que d’autres sont en train d’exploiter. Si vous regardez
les pays qui investissent le plus en Afrique, il y a les Chinois, d’accord,
mais les Indiens et les Turcs sont là. »
Le Ghana est en proie à une grave crise économique, avec une
inflation galopante à plus de 50%. Son ministre des Finances était récemment à
Pékin pour renégocier la dette du pays. Idem pour la Zambie, dont plus de la
moitié de la dette extérieure est détenue par des banques chinoises – soit plus
de 6 milliards de dollars – et qui est en défaut de paiement. Et enfin la
Tanzanie, où la Chine est le premier investisseur avec pas moins d’une centaine
de projets en cours dans différents domaines : mines, transports, agriculture,
pêche et tourisme.
Pour Christopher Fomunyoh, directeur régional pour l'Afrique
au National Democratic Institute, les États-Unis veulent aussi mettre en avant
les pays qui ont fait le choix de la bonne gouvernance et de la démocratie : «
Le Ghana est le premier pays d’Afrique subsaharienne à avoir obtenu son
indépendance. La Tanzanie est le seul pays, à l’heure actuelle, à avoir une
femme présidente, cheffe de l’exécutif. Et la Zambie coorganise un sommet
mondial sur la démocratie et la bonne gouvernance. »
L’Afrique est à nouveau un champ de bataille entre les
grandes puissances, estime l’éditorialiste guinéen Boubacar Sanso Barry, qui
ajoute que les Africains doivent profiter de cette lutte d’influence entre les
États-Unis, la Chine et la Russie.
« On perçoit tout ça comme un moyen permettant de redéfinir
les rapports. Cela donne une marge de manœuvre au continent africain pour
pouvoir discuter, débattre, négocier avec les partenaires en question.
Maintenant, peut-être que les États-Unis, la France et tous les autres partenaires
occidentaux savent que si nous ne faisons pas attention, les places que nous
risquons de laisser vacantes peuvent être occupées par d’autres partenaires. Je
pense qu’on devient moins condescendant, on impose moins les choses, on essaye
de discuter relativement d’égal à égal, en tant que partenaire et pas en tant
qu’ancienne puissance coloniale. »
Et qui mieux, souligne un chercheur, que Kamala Harris –
première femme afro-américaine vice-présidente des États-Unis – pour porter
cette nouvelle vision américaine de l’Afrique ?
Radio France Internationale
(RFI)
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