Bien qu’elle concentre 65% de la production totale du riz en Afrique subsaharienne, la région importe plus de la moitié de ses besoins en cette denrée alimentaire de base pour satisfaire la consommation intérieure qui augmente de 3% en moyenne par an sous l’effet d’une croissance démographique vigoureuse et de l’urbanisation.
Les pays d’Afrique de l’Ouest, qui regorgent de terres
irrigables encore inexploitées, sont en mesure d’augmenter sensiblement leur
production rizicole s’ils parviennent à appliquer des tarifs douaniers
conciliant les intérêts des producteurs et ceux des consommateurs, à améliorer
le marketing du riz local et à renforcer l’accompagnement techniques et
financier des petits exploitants, souligne un rapport publié le 27 octobre par
Ecofin Pro, la plateforme de l’agence Ecofin dédiée aux professionnels.
Intitulé « Plus que jamais, l’Afrique de l’Ouest doit
booster sa production rizicole », le rapport précise que le marché rizicole de
la région est de loin le plus important du continent du point de vue de la
consommation, avec près de 20 millions de tonnes de riz absorbé chaque année.
La consommation moyenne tourne autour de 45-55 kg par an et par habitant, soit
le double de la consommation moyenne en Afrique subsaharienne.
Cinq pays d’Afrique de l’Ouest seulement (le Nigeria, la
Guinée, le Mali, la Côte d’Ivoire et le Sénégal) ont consommé près de 16,8
millions de tonnes de riz durant l’année 2021/2022, soit 45% du volume total
absorbé en Afrique subsaharienne.
La région est également le premier pôle d’importation de la
céréale sur le continent. Cinq pays de la région (Nigeria, Côte d’Ivoire,
Sénégal, Guinée et Ghana) ont acheté 7 millions de tonnes de riz, soit près de
40% du volume total des achats de l’ensemble des pays d’Afrique subsaharienne
et l’équivalent de ceux d’une région comme l’Union européenne. L’essentiel des
importations provient de l’Inde, du Vietnam et de la Thaïlande.
Alors que le riz constitue une denrée alimentaire de base en
Afrique de l’Ouest, les gouvernements déploient des efforts pour augmenter la
production et placent la céréale au cœur de leurs politiques agricoles.
Un grand potentiel
inexploité
A l’échelle régionale, la production a atteint 14 millions de tonnes de riz blanchi durant la campagne rizicole 2021/2022, soit 65% de la production totale de l’Afrique subsaharienne. Cette offre est pour l’essentiel concentrée entre le Nigeria, la Guinée, le Mali, la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Bien qu’elle progresse dans la plupart des pays de la région, la production reste encore insuffisante pour répondre à la consommation intérieure qui croît de 3% en moyenne par an.
Les premiers producteurs sont, pour la plupart, également
les plus gros importateurs et sur l’essentiel des marchés, la production
nationale couvre entre 30 et 72% de la demande intérieure. Et c’est pour cette
raison d’ailleurs que la réduction des exportations de riz annoncée en
septembre 2022 par l’Inde a suscité́ de nombreuses craintes dans la région où
la disponibilité́ permanente et à bas prix du riz est un impératif pour la
sécurité́ alimentaire.
Le rapport élaboré par notre confrère Espoir Olodo indique
cependant que les pays d’Afrique de l’Ouest disposent de nombreux atouts pour
augmenter leur production rizicole. En effet, dans la région, le potentiel en
terres exploitables est important notamment pour la riziculture irriguée. Au
Sénégal par exemple, la Vallée du fleuve Sénégal (VFS) dispose d’un potentiel
hydroagricole estimé à près de 240 000 hectares avec des rendements qui varient
entre 5 et 7 tonnes à l’hectare contre 2 tonnes dans les zones pluviales, selon
les données du Département américain de l’agriculture (USDA).
Au Mali, les superficies propices à l’irrigation sont
estimées à près de 2,2 millions d’hectares avec seulement 36% du potentiel qui
déjà est exploité. Les terres irrigables sont également abondantes dans
plusieurs autres pays tels que le Burkina Faso et la Guinée.
Plusieurs défis à
relever
Au-delà de l’irrigation et des questions de productivité des
rizières, le secteur privé s’implique de plus en plus dans la transformation,
aux côtés des gouvernements. C’est le cas par exemple au Nigeria où les usines
de traitement de riz ont fleuri depuis quelques années sous l’initiative
d’acteurs privés. La dernière en date est celle de la compagnie Darma Rice Mill
située dans l’État de Katsina et dotée d’une capacité de traitement de 120
tonnes par jour.
Malgré ces avantages dont ils disposent sur les différents
maillons de la chaîne de valeur du riz, les pays d’Afrique de l’Ouest devraient
encore relever 3 grands défis qui pèsent sur l’environnement des affaires et
les performances des opérateurs pour pouvoir augmenter leur production.
Il s’agit d’abord de l’adoption d’une politique douanière
favorable aux producteurs locaux sans pour autant pénaliser les consommateurs.
Actuellement, le Tarif extérieur commun (TEC) entré en vigueur en 2015 est fixé
à 10%, un niveau faible comparativement à celui de la Communauté est-africaine
(CEA) où ce prélèvement est de 75%. Certains pays comme le Sénégal et la Côte
d’Ivoire, ou encore le Libéria appliquent le TEC alors que le Nigeria a décidé
d’imposer des droits allant jusqu’à 60% afin de réduire ses achats et d’augmenter
l’offre locale.
Les pays de la région devraient également procéder à des
investissements dans les domaines du marketing, du packaging et du
conditionnement afin de commercialiser un riz local dont, non seulement les
qualités organoleptiques sont appréciées par les consommateurs, mais qui jouit
aussi d’une bonne compétitivité qualité-prix.
Et last but not least, les gouvernements devraient renforcer
leur soutien aux petits riziculteurs. Bien qu’ils fournissent l’essentiel des
récoltes, ces derniers souffrent encore de l’absence de crédits sur le moyen et
le long terme, du manque d’accès à des semences et des engrais de qualité et de
la faiblesse de l’accompagnement technique.
Source : Agence
Ecofin