Près de cinq mois après avoir renversé l’ordre établi, par un putsch militaire, le Conseil national pour le rassemblement et le développement (CNRD) doit dorénavant faire face aux dures réalités de l’exercice du pouvoir. C’est comme si la fin de la trêve des confiseurs avait sonné pour la junte. Une junte prise dorénavant sous les feux croisés d’une frange de la classe politique et d’une certaine opinion publique tatillonne et hérissée, qui émettent de concert, de plus en plus de réserves sur la conduite de la transition. Le tout aggravé par l’obstination d’une Cédéao autiste et décidée à faire plier les autorités de la transition.
Gérer un état n’est jamais un long fleuve tranquille. A plus
forte raison une transition. Cette période d’interrègne, généralement objet
d’agitation et de tumulte. Notre pays a certes échappé au déluge, que certains
esprits chagrins avaient prédit, après la chute brutale d’Alpha Condé. Allusion
au syndrome de Néron.
Mais les Guinéens ont su conjurer le mauvais sort, en accueillant
à bras ouverts les tombeurs du « champion » du RPG arc-en-ciel. Ce coup d’état
perçu plutôt comme une délivrance par la majorité de l’opinion, a débarrassé
notre ciel de la grisaille, qui avait fini par l’assombrir. Rendant ainsi la
météo politique plus clémente.
Comme si le colonel Mamadi Doumbouya était béni des dieux.
Mais à mesure que les jours s’égrènent, on a l’impression que cette lune de
miel entre la junte et une partie de l’opinion, prend des rides. C’est le cas
notamment de la classe politique qui, à force d’être sur des charbons ardents,
ne trouve d’autre issue que de pousser des cris d’orfraie. C’est le cas au
niveau de l’ANAD, ce mouvement qui était jusque-là un inconditionnel du CNRD,
et qui commence à voir désormais le verre plutôt à moitié vide. Sans toutefois
mettre en doute la bonne foi du colonel Doumbouya, l’alliance pilotée par
Dalein espère que les syphocantes ne parviendront pas à parasiter la mécanique.
D’où cette invite faite au CNRD, de créer un cadre de
dialogue inclusif, en vue de permettre aux forces vives d’apporter leur grain
de sel au processus de transition. C’est dans le même ordre d’idées que des
personnalités prennent d’assaut les réseaux sociaux, pour porter « l’estocade »
contre le pouvoir militaire. Qu’ils ne voient pas en peinture.
Face à cette levée de boucliers qui se dessine, le colonel
Doumbouya, habitué au chaudron, en tant que soldat, saura certainement garder
la tête froide, pour mener à bon port le vaisseau de la transition. Ce sera
l’occasion pour lui de comprendre que la fonction de président n’est pas de
tout repos. Surtout quand on hérite d’un état aussi déliquescent que le nôtre.
Où tout est quasiment à reconstruire.
Des charges aussi énormes que celles du géant Atlas,
condamné à porter pour l’éternité la voûte céleste.
Mamadou Dian Baldé