Le président russe Vladimir Poutine a annoncé jeudi le début d’une « opération militaire » en Ukraine où de puissantes explosions et les sirènes d’alerte aérienne ont retenti dans plusieurs villes, Kiev affirmant qu’une « invasion de grande ampleur » était en cours.
Dans une adresse à la nation, le président ukrainien
Volodymyr Zelensky, a proclamé la loi martiale dans tout le pays. « Pas de
panique », « nous allons vaincre », a-t-il affirmé.
Peu après la déclaration surprise à la télévision du maître
du Kremlin, qui a dit vouloir défendre les séparatistes prorusses de l’est de
l’Ukraine, une série d’explosions ont été entendues à Kiev.
Les sirènes d’alerte aérienne ont retenti dans la capitale
ainsi qu’à Lviv, la ville de l’ouest où les Etats-Unis et plusieurs autres pays
ont déplacé leurs ambassades.
Dans le métro de Kiev, des dizaines d’habitants tentaient de
se mettre à l’abri ou de prendre un train, valise à la main pour quitter la
ville.
Des explosions ont également été entendues à Kramatorsk,
ville dans l’est qui sert de quartier-général à l’armée ukrainienne, à Kharkiv,
deuxième ville du pays, et à Odessa, sur la mer Noire.
La Russie a affirmé avoir détruit des bases aériennes et la
défense anti-aérienne ukrainienne, tandis que Kiev a revendiqué avoir abattu
cinq avions et un hélicoptère russes.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro
Kouleba, a dénoncé le début d’une « invasion de grande ampleur » par la Russie.
Cette opération vise à « détruire l’État ukrainien, s’emparer de son territoire
par la force et établir une occupation », a renchéri son ministère dans un
communiqué.
L’Ukraine a également annoncé la fermeture de son espace
aérien pour l’aviation civile et les vols ont été annulés depuis les aéroports
des grandes villes du sud de la Russie, à proximité de l’Ukraine.
L’armée russe a toutefois assuré viser les sites militaires
ukrainiens avec des « armes de haute précision », ce qu’a semblé reconnaître le
président ukrainien en indiquant que la Russie avait effectué des frappes
contre des infrastructures militaires et des garde-frontières ukrainiens.
L’ambassadeur de Russie à l’ONU, Vassily Nebenzia, est allé
au-delà, affirmant que son pays ciblait « la junte au pouvoir à Kiev ».
La décision du président russe, qui intervient après des
mois de tensions et d’efforts diplomatiques pour éviter une guerre, a aussitôt
déclenché une vague de condamnations internationales.
« Président Poutine, au nom de l’humanité, ramenez vos
troupes en Russie ! », a lancé le secrétaire général des Nations unies Antonio
Guterres, visiblement éprouvé, lors d’une réunion d’urgence du Conseil de
sécurité.
Le président américain Joe Biden a dénoncé une « attaque
injustifiée » qui provoquera « des souffrances et pertes de vies humaines ». «
Le monde exigera des comptes à la Russie », a-t-il promis. Il s’est également
entretenu tôt jeudi avec le président ukrainien, lui promettant son soutien.
– « Attaque téméraire
» –
Le chef de l’Otan Jens Stoltenberg a condamné une « attaque
téméraire et non provoquée » par la Russie. Une réunion d’urgence des
ambassadeurs de l’Otan a été décidée jeudi matin.
Après s’être entretenu avec plusieurs dirigeants étrangers
jeudi matin, M. Zelensky a appelé à « une coalition anti-Poutine » mondiale pour
« contraindre la Russie à la paix ».
« J’ai pris la décision d’une opération militaire spéciale
», a annoncé à l’aube M. Poutine dans une déclaration à la télévision. « Nous
nous efforcerons d’arriver à une démilitarisation et une dénazification de l’Ukraine
», a dit le maître du Kremlin assis à un bureau en bois sombre.
« Nous n’avons pas dans nos plans une occupation des
territoires ukrainiens, nous ne comptons imposer rien par la force à personne
», a-t-il assuré, appelant les militaires ukrainiens « à déposer les armes ».
Puis, il s’est adressé à ceux « qui tenteraient d’interférer
avec nous (…) ils doivent savoir que la réponse de la Russie sera immédiate et
conduira à des conséquences que vous n’avez encore jamais connues ».
– Le pétrole s’envole
–
Quelques heures plus tôt, le Kremlin avait annoncé que les
responsables des « républiques » séparatistes prorusses autoproclamées dans
l’est de l’Ukraine avaient demandé l' »aide » de Moscou pour « repousser
l’agression » ukrainienne.
Lundi, le président russe avait reconnu l’indépendance de
ces « républiques » séparatistes de Donetsk et de Lougansk, puis obtenu le
lendemain de la chambre haute du Parlement russe son feu vert à un déploiement
de forces.
Peu après le discours de M. Poutine jeudi matin, le prix du
baril de pétrole a dépassé les 100 dollars, pour la première fois en plus de
sept ans, et la Bourse de Hong Kong chutait de plus de 3%.
Les Etats-Unis déposeront jeudi un projet de résolution sur
la table du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant la Russie pour sa « guerre
» en Ukraine
Les dirigeants des 27 pays de l’Union européenne doivent
pour leur part se réunir en sommet jeudi soir.
Beaucoup redoutent que la crise en Ukraine ne mène au plus
grave conflit en Europe depuis 1945. Une intervention russe pourrait se
traduire par « jusqu’à cinq millions de personnes supplémentaires déplacées »,
a averti l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield.
Washington et ses alliés occidentaux ont pris de premières
sanctions en réaction à la reconnaissance des séparatistes soutenus par Moscou
que Kiev combat depuis huit ans, un conflit qui a fait plus de 14.000 morts à
ce jour.
AFP