Revenu au pouvoir à l’occasion de la crise algérienne du 13 mai 1958,
le général de Gaulle se lance dans une série de réformes, dont la modification
de la constitution qui inclut un processus de décolonisation africaine avec une
idée maîtresse, réunir les futurs pays indépendants africains dans une large
communauté avec la métropole. Ce projet est inscrit dans le texte
constitutionnel qui doit être soumis à référendum, en septembre 1958, aux
Français de métropole mais aussi aux habitants des territoires coloniaux.
Pour défendre son idée, à l’été
1958, le général se lance dans une grande tournée des pays
africains, d’Alger à Dakar, en passant notamment par Conakry.
Le 24 août 1958, il engage à
Brazzaville la décolonisation de l’Afrique noire en proposant la création de la
Communauté, cadre qu’il veut donner à l’indépendance des Etats de l’Afrique
noire francophone. Lors de cette tournée africaine, de Gaulle propose «au
suffrage de tous les citoyens des territoires d’Afrique et des citoyens de
métropole» de former une Communauté dans laquelle chacun des Etats membres
accédera à l’autonomie, avec un pouvoir exécutif et législatif. La défense, la
politique étrangère, la politique économique et financière, le contrôle de la
justice relèveront de l’exécutif de la Communauté, rappelle Jeune
Afrique.
La Communauté, cela veut dire
Paris… De Gaulle est clair lorsqu’il affirme: «Il est naturel et légitime que
les peuples africains accèdent à ce degré politique où ils auront la
responsabilité entière de leurs affaires intérieures, où il leur appartiendra
d’en décider eux-mêmes». Les affaires intérieures, pas plus.
Le 28 août, de Gaulle arrive à
Conakry, capitale de ce qui n’est pas encore la Guinée. Il est accueilli par le
jeune maire et député (RDA, Rassemblement démocratique africain, apparenté PC)
du territoire, Ahmed Sékou Touré. Du haut de ses 36 ans, vêtu de son boubou
blanc, signe de son africanité, il oppose au vieux général, âgé de 67 ans, un
discours fort: «Nous ne renoncerons pas et nous ne renoncerons jamais au droit
légitime et naturel à l’indépendance.»
«Nous préférons la pauvreté dans
la liberté à la richesse dans l’esclavage»
Le chantage à l’aide française n’a pas marché avec le jeune leader guinéen qui,
fidèle aux rêves de l’époque, croit en une «Afrique libre et décomplexée,
anti-colonialiste, panafricaniste». Il lance à de Gaulle une phrase qui restera
dans la légende politique du continent: «Nous préférons la pauvreté dans la
liberté à la richesse dans l’esclavage.» (L’INA dispose de l’enregistrement de
ce passage).
Ce à quoi le général répond: «On
a parlé d’indépendance. Et bien, je le dis ici plus haut qu’ailleurs,
l’indépendance est à la disposition de la Guinée. Elle peut la prendre en
disant « non » à la proposition qui lui est faite et, dans ce cas, je
garantis que la métropole ne s’y opposera pas.» Et il ajoute: «Elle
en tirera, bien sûr, des conséquences, mais d’obstacles elle n’en fera pas et
votre Territoire pourra comme il le voudra et dans les conditions qu’il voudra,
suivre la route qu’il voudra.»
Selon les témoins
de l’époque, le général de Gaulle est furieux. Il dira à ses proches: «La
Guinée, Messieurs, n’est pas indispensable à la France. Qu’elle prenne ses
responsabilités. (…) Nous n’avons plus rien à faire ici. Le 29
septembre, la France s’en ira.» Vexé, le chef du gouvernement français
annulera toutes les réceptions prévues, ne dînera pas avec Sékou Touré comme
convenu initialement.
Un mois plus tard, le 28
septembre, lors du référendum constitutionnel, tous les territoires d’Afrique
(et surtout la métropolie) votent «oui»… sauf un: la Guinée. 95,2% des
électeurs votent «non», alors que dans quasiment tous les autres futurs pays
africains, le «oui» l’emporte avec des majorités dépassant les 90% (à
l’exception de Magagascar, 77%, la future Djibouti (75%) et le Niger (78%).
Le «non» l’ayant emporté, la
Guinée proclame son indépendance le 2 octobre. Mais les conséquences sont
rapidement visibles. La France se retire brutalement. «Le 29 septembre, le
gouverneur français informe Sékou Touré qu’à partir du 30, Paris mettra fin à
toutes les aides jusqu’alors consenties et retirera son personnel technique, y
compris les forces armées», rappelle un universitaire.
Le nouveau pays recherche des appuis
en Afrique, auprès de Kwame N’Krumah (alors Premier ministre du Ghana)
notamment, tandis que le monde soviétique propose de combler le départ des
Français. Finalement, les relations avec la France se normalisent dans le
milieu des années 60. Sékou Touré restera au pouvoir jusqu’à sa mort en 1984.
Son geste historique restera cependant terni par sa gestion dictatoriale.
Franceinfo
Abdoul Karim Diallo 02 octobre 2022 19:05
Je ne vois aucun différence entre Sékou Touré et les anciens colonisateurs, il nous a rendu plus en retard que même la colonisation.