Le juge Alphonse (Al Hussein) Charles Wright est l’un des
rares à avoir « refusé » de condamner « injustement » des
opposants au 3ème mandat d’Alpha Condé. Mieux, il est allé jusqu’à
décerner un mandat d’arrêt contre Fabou Camara de la Police judiciaire et son
homologue Mohamed Lamine Simakan de la Brigade de répression et d’investigation
(BRI). Sur sa page Facebook, le magistrat a fait une sorte de confession « pour
une prise de conscience collective »
« Ma confession
pour une prise de conscience collective !
Ma petite histoire !!
Au fond du cœur et loin de toute prétention, je remercie
l’ensemble des guinéens pour les différentes publications allant dans le sens
d’une reconnaissance nationale. Je vous avoue qu’humainement, j’ai été touché
sans pourtant crier victoire. Car de l’autre côté, j’ai lu les nombreuses
réactions d’une véritable réquisition populaire envers la magistrature en cette
période cruciale de notre histoire et j’ai personnellement dénoncé ce que je
qualifié : aveu de violation du serment.
J’ai compris deux
leçons à travers vos nombreuses réactions :
1- La nécessité pour nous les magistrats de comprendre que
lorsque nous refusons de prendre notre responsabilité envers notre nation, nous
ouvrirons la place à toutes les dérives (violations des droits humains par la
privation des libertés les plus fondamentales notamment celle d’exprimer
librement ses idées, ses opinions politiques, religieuses ou toutes autres
formes d’expression humaine);
2- La nécessité de se soumettre qu’à la seule autorité de la
loi sans se préoccuper des conséquences de représailles de la part du
politique.
J’ai compris que l’histoire n’oublie pas les œuvres des
hommes qu’elles soient bonnes ou mauvaises.
J’ai compris que la responsabilité de la fonction de rendre
la justice s’assume.
J’ai compris qu’avec la foi en Dieu aucune pression ne
trouvera le chemin de pénétrer la conscience professionnelle du juge.
C’est vrai, ma vie a été menacée, ma famille terrorisée,
déboussolée par des menaces incessantes. Mais rien de tous ces éléments n’a
ébranlé ma foi en Dieu et à son serment.
J’ai été écarté de toutes les formations de magistrats. Mais
jamais cela ne m’a fait perdre ma vision pour une justice équitable.
J’ai été déplacé d’office à chaque fois que je m’engage à
traquer les puissants qui se sentaient plus forts que la loi. Mais jamais cela
ne m’a impressionné, bien au contraire.
Certains avaient peur de dire que nous étions des collègues
de peur qu’ils ne soient considérés comme des antisystème. Alors qu’ils ne
savent pas que cela en aucun cas ne pouvait me dérouter.
J’ai été mis sur écoute parce que pour eux “je suis un
magistrat de l’opposition”. Alors que ma seule ambition était d’être un
magistrat de la République respectueux des valeurs d’indépendance et
d’intégrité.
J’ai été mis sur « écoute » sans aucune forme de
procédure légale pour chercher un lien entre mon refus de me soumettre à un
exercice contraire aux règles déontologiques et les activités des organisations
politiques et celles de la société civile qui s’étaient élevées contre le
changement de l’ordre constitutionnel.
Le surnom qui m’avait été attribué était « agent double »
(roulant tant pour le pouvoir que pour l’opposition). Alors que, en ma qualité
de magistrat, je ne faisais qu’appliquer la loi sans me préoccuper de
l’appartenance des personnes renvoyées par devant ma juridiction.
Pour ma propre sécurité j’étais obligé de prendre un
logement loin de ma famille des nuits durant avec le risque de tomber sur les
personnes qui me considéraient comme un véritable obstacle.
En toute dignité, je repartais aussitôt le lendemain en
prenant le risque de ne plus retrouver ma famille.
La seule option désormais était de m’orienter les dossiers
appelés « les dossiers signalés ».
J’avais le choix entre continuer ou me conformer. J’avais
choisi au prix de ma vie de continuer.
Ce choix ne signifiait pas que je voulais tenir tête à un
chef mais plutôt accomplir mon devoir de magistrat en toute honnêteté en dépit
de tous les risques.
J’ai été déplacé vers d’autres cieux sans aucun motif
sérieux.
POURQUOI JE N’AVAIS
JAMAIS CÉDÉ ET QUE JE NE CEDERAIS JAMAIS !!
1-Si je cède en violation de mon serment, j’endosserais
devant Dieu les conséquences de mon inaction pour éviter une injustice ;
2-Le péché d’une mauvaise décision de justice peut conduire
à la destruction de toute la progéniture du magistrat ;
3- La crainte du châtiment divin. L’enfer est plus proche du
magistrat que toutes les autres corporations. Car, le pouvoir de juger est
divin avant d’être institutionnel. Quel que soit le poste, les richesses indues
que j’amasserais ne seront pour moi que des charges lourdes devant le juge
suprême et bien avant cela un châtiment douloureux ;
4- Le mensonge est beau mais sa beauté finira par céder sous
le coup de la lumière du temps ;
5-La défense de l’honneur et la dignité attachés à mes
fonctions de juge.
Refusons de justifier le manque de constance sur les valeurs
par une « pression extérieure ».
Charles Wright
Alhusein »