Accélérer la transition pour aboutir le plus tôt possible à un retour à
l’ordre constitutionnel. Avec le respect de l’Accord d’Alger de 2015, c’est, la
principale recommandation adressée par le secrétaire général de l’Onu à la
junte malienne, selon le rapport trimestriel de l’organisation mondiale.
Antonio Guterres n’est, sans doute, pas sur la même longueur d’onde que les
militaires qui n’entendent, visiblement, pas rendre ce pouvoir arraché par les
armes, a fortiori «accélérer» le processus de la transition. Le colonel Assimi
Goïta se hâte si lentement vers ce retour du pouvoir aux civils que le souhait
du SG de l’Onu sonne comme un vœu pieux. Donnant l’illusion de marcher vers la
sortie de la transition, le pouvoir kaki de Bamako qui a sorti de son béret une
Autorité indépendante de gestion des élections et élaboré un projet de
constitution, s’est montré expert dans le «un pas en avant, deux pas en
arrière». Loin de tout œil étranger, le Mali des colonels déroule son plan.
C’est ainsi que les militaires de
Kidal ont déclaré, à tour de bras, «non grata» au Mali, les personnalités et
pays qui sont à cheval sur les principes de la démocratie et le respect des
droits humains. Dans le même temps, les autorités de la transition ont mis sous
l’éteignoir toute voix contradictoire à leurs ambitions, que cette voix soit
organe de presse ou structure de la société civile. Les intimidations et autres
menaces se multiplient également pour maintenir sur les populations, cette
chape de plomb intenable. Même pour les plus téméraires, comme le directeur de
publication du journal Le Démocrate, Aliou Touré, très critique du pouvoir des
militaires, qui vient de réapparaître ce lundi, après avoir été enlevé le
jeudi, par des hommes armés et cagoulés. Dans le même temps, l’insécurité, du
fait des attaques terroristes continue d’enfler, malgré la «montée en
puissance» de l’armée malienne, chantée au quotidien par le pouvoir et ses
affidés. En témoigne le sort inquiétant de la région de Ménaka, de nos jours
sous menace des combattants de l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS).
En tout cas, en reportant sine
die le référendum qu’ils ont, eux-mêmes projeté pour l’adoption de la nouvelle
constitution, une loi fondamentale du reste contestée par des politiques et des
personnalités de la société civile, les militaires viennent de poser les
rangers sur ce processus au bout duquel devrait avoir lieu des élections
ouvertes pour un retour des civils au pouvoir. D’ailleurs, en faisant couvrir
leurs putschs par une loi d’amnistie et en permettant aux militaires désireux
de se porter candidats à la présidentielle de le faire, en démissionnant juste
quelques mois avant l’échéance électorale, Assimi Goïta voudrait préciser son
appétit inextinguible pour le pouvoir qu’il ne s’y serait pris autrement. Le
colonel a donc toute la latitude de se donner une virginité par les urnes,
prolongeant en boubou de civil, ce qu’il a commencé en treillis de militaire,
en chassant, le 18 août 2020, le pouvoir démocratiquement élu de Feu Ibrahim
Boubacar Keïta. La méthode est bien connue et a, la plus plupart du temps, été
appliquée avec réussite par des putschistes sous les tropiques.
Quelles sont donc les chances
pour Antonio Guterres de se faire entendre par Bamako qui, en pleine lune de
miel avec la Russie, certains dénoncent plutôt un partenariat avec la société
privée de sécurité russe Wagner, ne semble plus rien craindre? Surtout que les
militaires maliens se sont revêtus de la casquette de libérateurs de l’Afrique
de ses anciens colonisateurs, en la jetant dans les bras de…nouveaux colons!
Alors le SG de l’Onu ne crie-t-il pas dans le désert, au propre comme au figuré?
WS