Comme il fallait s’y attendre et s’en réjouir, la Communauté économique
des Afriques de l’ouest (CEDAO) a éviter de sortir l’artillerie lourde contre
le Burkina Faso qui a connu un coup d’Etat le lundi dernier, alors que tout
avait commencé par des mutineries dans plusieurs camps militaires à
Ouagadougou, Kaya et Ouahigouya. Le désormais ex-président du Faso, Roch
Marc Christian Kaboré, comme dans un soulagement, à en croire ceux qui ont eu
le loisir de communiquer avec lui au téléphone, au soir de sa démission, a
retrouvé sa joie de vivre et même ce rire dont lui seul a le secret et qui en
fait un homme très affable, même trop affable. Preuve que l’homme n’a jamais pu
réellement habiter cette fonction suprême, qui, pourtant avait plus que jamais
besoin d’un chef de guerre, d’un général qui devait remonter ses troupes
égaillées par une horde de terroristes, de djihadistes, et de bandits de grand
acabit.
Cette capitulation éclair de Roch
Marc Christian Kaboré a, sans doute facilité la tâche aux putschistes du
colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, dont l’action a été applaudie par des
populations en liesse. La signature en un temps record de sa démission, par
Roch Kaboré, a également coupé l’herbe sous les pieds de la CEDEAO qui aurait
eu la main plus lourde si la situation avait pris des tournures plus
dramatiques, et n’avait reçu cette onction populaire. Mieux, l’organisation
sous-régionale qui avait, du reste, donné la même chance au Mali, en ne la
mettant, après le putsch du 18 août 2020, qu’au banc de ses instances, vu que
le colonel Assimi Goïta et ses camarades putschistes avaient l’air de donner
des gages d’un retour rapide du pays aux valeurs constitutionnelles, se range
aux côtés des nouveaux maîtres de Ouagadougou, pour accompagner le pays dans sa
lutte jusque-là désespérée contre un état sécuritaire qui va de mal en pis.
Aux côtés de ses partenaires
internationaux comme la France, à travers la Force Barkhane, sans verser dans
un optimisme béat, le vent semble bien tourner au profit de l’armée burkinabè.
C’est ainsi que dans l’opération «Laabingol», Forces de défense et de sécurité
du Burkina Faso et soldats de Barkhane ont «localisé, identifiés et
neutralisé», à quatre reprises, en une semaine, dans ce mois de janvier, des
groupes terroristes. Et les lignes devraient bouger davantage, avec la volonté
des chefs d’Etat de la CEDEAO d’accompagner, avec leurs partenaires extérieurs
le Burkina Faso à faire face aux forces du mal, la peur devrait changer de
camp.
En tout cas, avec la rencontre ce
29 janvier entre les militaires du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et
la restauration (MPSR) et la délégation de chefs d’Etat-Major des pays membres
de la CEDEAO il s’établit peut-être la volonté de l’organisation à intégrer les
aspirations légitimes des peuples abandonnés à leur triste sort par des
dirigeants corrompus et obnubilés par leurs seuls intérêts égoïstes et leurs
prérogatives indues amassées sur le dos de leurs concitoyens croulant sous le
poids de la pauvreté et des maladies, et constamment endeuillés par les assauts
meurtriers des terroristes. Malheureusement, entre le voisin du Burkina, où les
putschistes ne semblent nullement pressés de vouloir rendre le pouvoir qu’ils
ont arraché par les armes, le Mali pour ne pas le nommer, le ton continue de monter
entre la CEDEAO et des dirigeants qui ont su, à merveille, surfer sur la
querelle entre la Russie et les Occidentaux. Le gouvernement de transition du
Mali a même faire repartir chez eux, Danois et Suédois qui, sous le drapeau de
la Force européenne Takuba, devait se mettre ensemble, avec d’autres pays et
les armées nationales, pour bouter hors du Sahel, les djihadistes qui
l’écument.
Il suffit pourtant, pour les
putschistes maliens de revenir à des proportions moins ahurissantes en matière
de transition, et avoir à l’esprit que la prise de pouvoir par les armes est
interdites. Tout comme devaient l’être, du reste, les charcutages des
constitutions pour s’ouvrir des boulevards de présidence à vie par les
troisièmes mandats de tous les dangers. Mais le pays de Vladimir Poutine et de
la société Wagner, c’est bien le nouveau cœur pour lequel bat celui de la junte
malienne très fâchée avec la France qui, comme si elle aussi perdait de plus en
plus pied en Afrique, maîtrise difficilement les nerfs et surtout la langue de
ses président et ministres. En tout cas, l’escalade de la violence verbale est
loin d’arranger une situation, qui, à la longue, éprouvera sérieusement toutes
les parties en conflit. Le drame est que, à tort ou à raison, les militaires au
pouvoir à Bamako semblent refuser de croire encore aux vertus du dialogue avec
la CEDEAO qu’ils prennent pour le porte-voix de la France qui, elle, affublée
de son péché originel de pays colonisateur arrive difficilement à se
débarrasser d’une certaine condescendance désuète.
Et si le Burkina réconciliait
tout ce beau monde, avec des options plus raisonnables et bien claires, avec
l’accompagnement de l’organisation sous-régionale qui a intérêt à saisir cette
opportunité de frictions avec certaines de ses populations pour se muer pour de
bon en CEDEAO des peuples?
Si Mali savait, si CEDEAO
pouvait!
WS