Pour éteindre le feu qui brûle entre le Mali et la Communauté
économique des Etats de l’Afrique de l’ouest CEDEAO) et entre la Communauté
internationale de façon plus générale, le Togolais Faure Essozimna Gnassingbé
est appelé à la rescousse, officiellement, par la junte militaire au pouvoir à
Bamako. Une initiative que, en tant qu’Africain on ne peut que louer, non
seulement parce que les plus longues guerres finissent toujours autour d’une
petite table de négociation, mais pour le fait que des Africains prennent en
main, la résolution de leurs crises autour de leur arbre à palabres. Qui plus
est, le Togo, sans doute dans l’élan de la solidarité africaine légendaire, qui
est resté assez proche des nouveaux dirigeants du Mali depuis leur prise de
pouvoir par les armes, est un pays coutumier des négociations certes au plan
national, mais de haut-niveau. De plus, le ciel Bamako-Lomé est l’un des plus
dégagés en ce moment, sans oublier que le président togolais malgré son jeune
âge relatif est le doyen des chefs de l’Etat en exercice de l’Afrique de
l’ouest.
Toutefois, ce choix du Togo comme
facilitateur est loin d’avoir obtenu l’aval de la Communauté économique des
Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) dont le propre facilitateur, le Nigérian
Goodluck Jonathan, malgré son dévouement et ses mille et un séjours sur les
bords du Djoliba ; pour le moment, «tape poteau», comme le disent nos
voisins ivoiriens à propos de quelqu’un que la réussite fuit. Pire, les
autorités de la transition malienne qui ont mis dehors, la France et les Occidentaux,
continuent de mettre leurs désormais anciens partenaires dans l’embarras en
dénonçant, avec effet immédiat pour certains, les accords de défense signés
avec eux. Dans sa logique de va-t-en-guerre, le pouvoir kaki malien vient
également de prolonger de deux ans, une transition politique que la CEDEAO
verrait bien prendre fin au bout de 16 mois.
La route pour rallier Bamako à
Accra, chez le président en exercice de la CEDEAO, le ghanéen Nana Akufo-Addo,
passera-t-elle maintenant par Lomé, au détriment d’Abuja ou d’Alger qui s’était
proposé comme facilitateur, avec l’aval de l’Union africaine? Tout peut arriver
dans cette sous-région de tous les politiquement possibles, et peut-être que le
partage de la même langue française comme outil de négociation fera le miracle
tant attendu. Tout le monde gagnerait à déraidir les positions et désarmer les
coeurs en vue trouver le juste milieu et sortir de cette crise, qui, in fine,
n’arrange ni les putschistes de Bamako, ni la CEDEAO qui y joue sa crédibilité,
et encore moins les populations de la sous-région qui sont les premières
victimes des sanctions draconiennes prises par l’organisation sous-régionale
contre les dirigeants de la transition malienne.
Mais Faure sera-t-il assez fort
pour ramener à la normale des positions aussi radicalisées que celles du Mali,
de la France, de l’Europe et de la CEDEAO, chaque partie bandant les muscles en
réponse aux attaques et indélicatesses incessantes venues d’en face? Rien n’est
moins sûr, à moins que tous mettent désormais balle à terre pour discuter
franchement. Il faut que le facilitateur désigné par les Maliens pour ramollir
ses pairs, évite de signer un chèque en blanc à des dirigeants de la transition
malienne qui ne doivent jamais oublier qu’ils demeurent les putschistes par la
faute de qui tout est arrivé. De même, le président togolais, si son choix
passe auprès de tous les protagonistes, doit pouvoir user d’une diplomatie
hors-pair pour ramener ses homologues à de meilleurs sentiments, en leur
rappelant que les égos, n’ont plus leur place dans cette situation qui va au
pourrissement.
Reste à savoir si Faure
Gnassingbé arrivera en sapeur-pompier aguerri…ou en médecin après la mort!
WS