Les dirigeants de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) se réuniront dimanche 03 juillet 2022, lors d'un sommet très attendu à Accra au Ghana. Ils doivent statuer sur les sanctions concernant le Mali, la Guinée et le Burkina Faso, trois pays théâtre de coups d'Etat.
Les leaders ouest-africains, qui entendent peser pour un
retour rapide des civils au pouvoir, vont se pencher sur les vigoureuses
mesures de rétorsion commerciales et financières infligées au Mali depuis
janvier, et sur celles, moins lourdes, du Burkina Faso et de la Guinée.
Le Mali, pays pauvre et enclavé, exsangue d'un conflit qui
dure depuis plus d'une décennie, est confronté à un embargo sur les transactions
commerciales et financières, hors produits de première nécessité.
Le Burkina, autre pays sahélien pris dans la tourmente
jihadiste, et la Guinée ne sont pour l'heure que suspendus des organes de la
Cédéao. Mais les juntes en place entendent y rester trois ans et exposent leur
pays à un durcissement des sanctions.
D'âpres négociations sont en cours depuis des mois entre la
junte militaire au Mali et la Cédéao mais elles n'ont jusque-là pas abouti à un
compromis.
Le dernier sommet, le 4 juin, a ainsi accouché d'une souris
: aucune décision n'a été prise sur les sanctions à l'encontre des régimes
putschistes, et la Cédéao s'est donné un mois de plus pour négocier et
s'entendre sur une levée ou un maintien des sanctions.
Entre temps, le médiateur Goodluck Jonathan, ancien
président du Nigeria, est venu vendredi à Bamako rencontrer les autorités
militaires. Si rien n'a officiellement filtré des échanges, un membre de son
entourage a indiqué à l'AFP que "le Mali a fait d'énormes progrès".
Même s'il reste "quelques réglages à faire", la
junte malienne "fait du bon travail", a-t-il ajouté.
Les autorités ont annoncé mercredi un calendrier électoral
fixant la présidentielle à février 2024, le référendum constitutionnel à mars
2023, et les législatives entre octobre et novembre 2023.
Il vient compléter l'adoption le 17 juin d'une nouvelle loi
électorale : autant de prérequis indispensables pour la Cédéao dans l'optique
d'une levée des sanctions infligées le 9 janvier au pays pour stopper le projet
des militaires de gouverner cinq années.
Un potentiel point de blocage dans les négociations peut
néanmoins subsister dans la porte désormais ouverte, par la nouvelle loi
électorale, d'une candidature d'un militaire à une élection présidentielle.
Reste qu'à Bamako, le sommet de dimanche est porteur
d'espoir, "surtout à l'approche de la Tabaski (nom ouest-africain de la
fête musulmane de l'Aïd al-Adha)", à la fin de la semaine prochaine,
sourit un vendeur de bétail. Les sanctions ont largement impacté l'économie
malienne, déjà éprouvée par dix ans de conflit.
"voie du
compromis"
L'Afrique de l'Ouest a vu se succéder les coups de force en
moins de deux ans : putsch le 18 août 2020 à Bamako, nouveau fait accompli
parachevant le premier le 24 mai 2021, putsch le 5 septembre 2021 à Conakry, et
putsch le 24 janvier 2022 à Ouagadougou.
La Cédéao, alarmée du risque de contagion dans une région
vulnérable, multiplie les sommets, les médiations et les pressions pour
accélérer le retour des civils à la direction de ces pays.
Au Burkina Faso, la Cédéao a nommé un médiateur malgré son
"inquiétude" devant les 36 mois prévus pour la transition. "Nous
sommes sur la voie du compromis" avec ce pays, a dit à l'AFP un diplomate
de la sous-région.
Le médiateur, l'ancien président du Niger Mahamadou
Issoufou, doit se rendre à Ouagadougou vendredi en amont du sommet. Un
calendrier électoral, présenté par la junte aux partis mercredi, doit lui être
proposé.
Il « porte sur deux aspects : la restauration de la
sécurité et l'organisation des élections pour le retour à un ordre
constitutionnel normal », a dit le Premier ministre Albert Ouédraogo.
Pour l'ancien parti au pouvoir, la présentation de ce
calendrier est, selon son président Alassane Bala Sakandé, "du spectacle
pour la Cédéao". Plusieurs sources proches de l'organisation saluent,
elles, cette recherche apparente de compromis.
En Guinée, pays qui a refusé jusqu'alors la venue d'un
médiateur, la junte a acté une durée de transition de 36 mois. Un délai
qualifié d'"impensable" par le chef de l'Etat sénégalais Macky Sall,
président en exercice de l'Union africaine.
"La Cédéao va
devoir prendre des mesures", avait-il dit.
L'organisation avait exprimé lors du dernier sommet
"ses graves inquiétudes" devant les tensions politiques, et pressé
les autorités d'établir un cadre de dialogue avec les acteurs politiques et la
société civile.
Lundi, comme un premier pas, le gouvernement a reçu les
principales formations politiques en vue d'engager un dialogue. Plusieurs
partis ont conditionné leur participation à la nomination d'un médiateur
ouest-africain.
Agence France Presse
(AFP)