Accusé par les autorités d'« agissements déstabilisateurs et subversifs
», le directeur de la section droits de l'homme de la Minusma Guillaume Ngefa
est désormais persona non grata au Mali. Son expulsion survient alors que
l'avenir de la Minusma pose question. Décryptage.
L'annonce de l'expulsion du chef
de la section droits de l'homme de la Minusma a été faite dimanche soir par les
autorités de transition. Elles accusent Guillaume Ngefa d'« agissements
déstabilisateurs et subversifs ». Il s'agit en fait des suites de l'affaire
Aminata Dicko. Le 27 janvier dernier, la vice-présidente de l'association Kisal
dénonçait, devant le Conseil de sécurité de l'ONU, les exactions de l'armée
malienne et de ses supplétifs russes. Bamako ne reconnait ni les propos, ni la
qualité d'Aminata Dicko, et tient le chef droits de l'homme de la Minusma pour
responsable.
Car pour Bamako, la question des
droits humains est « instrumentalisée », « politisée » au service « d'agendas
cachés. » Ces termes sont employés dans les communiqués et discours officiels,
à chaque fois qu'une voix ose évoquer la restriction des libertés civiques dans
le pays ou, pire encore, les allégations d'exactions portées contre l'armée
malienne et ses supplétifs russes. Une manière de disqualifier d'office les
défenseurs des droits humains au nom, toujours, de la souveraineté nationale.
La stratégie indigne nombre
d'hommes politiques maliens, jusque dans les soutiens affichés des autorités,
mais aussi de responsables de la société civile et d'observateurs avertis.
Certains le disent ouvertement, la plupart hors micro, par crainte des
conséquences. Ce discours trouve en revanche un véritable écho dans les milieux
« néo-panafricanistes » ou « patriotes » qui l'intègrent à un argumentaire
anti-Occident de plus en plus partagé sur les réseaux sociaux comme dans les
rues maliennes et, plus globalement, ouest-africaines.
L'expulsion du chef des droits de
l'homme de la Minusma s'inscrit dans cette droite ligne. La mission onusienne
s'y attendait d'ailleurs depuis des mois. Après celle de son porte-parole, en
juillet dernier, cette expulsion survient au moment où les Nations unies
s'interrogent sur l'avenir de la Minusma. Les options vont d'une augmentation
du nombre de casques bleus à une réduction de la Minusma à un simple bureau
politique, à Bamako uniquement.
La capacité du personnel onusien à mener son travail est l'un des principaux critères de décision et le retrait intégral de la Minusma n'est, à ce stade, pas sur la table. Les autorités maliennes viennent, non sans panache, de contribuer à la réflexion en cours.
Avec Rfi