En Guinée, le procès sur les violences commises le 28 septembre 2009 au stade de Conakry s’ouvre aujourd’hui. Ce jour-là, une manifestation de l’opposition contre une candidature du chef de la junte de l’époque, Moussa Dadis Camara, avait été réprimée dans le sang. Une enquête de l’ONU dénombrait au moins 156 personnes tuées, 109 femmes violées et de nombreuses personnes blessées. Treize ans après le drame, l’ouverture de ce procès suscite de l’espoir pour les victimes.
Le 28 septembre 2009, Mariétou pensait manifester
pacifiquement pour défendre la démocratie. Mais rapidement, cette leader
politique s’est retrouvée, comme beaucoup d’autres, prise en tenaille dans
l’enceinte du stade. Elle y a été violée, en public, par des militaires.
Au-delà du choc physique et psychologique, cette femme d’âge mûr a ensuite dû
se heurter au rejet de ses proches.
« Au stade, j’ai été violée. J’ai été battue. J’ai des
blessures graves au front, j’ai maintenant des cicatrices. À mon retour à la
maison, mon mari m’a rejetée. Il m’a abandonnée avec mes enfants »,
confie-t-elle.
Treize ans plus tard, Mariétou est impatiente de voir ses
bourreaux répondre de leurs actes au tribunal. « Si le procès commence, je me
sentirais soulagée. C’est une libération. Si je vois celui qui m’a violée, je
serais à l’aise. J’aurais obtenu justice et vérité. »
Ils m'ont pris ma virginité. Après ça, je vomissais, j'avais
des maux de tête. Comme ça ne passait pas, on m'a emmenée à l'hôpital et les
médecins ont découvert que j'étais enceinte.
Une autre femme
témoigne du viol qu'elle a subi
Oumar Diallo est chauffeur. Il a été battu aux deux
avant-bras. Impossible pour lui de reprendre son travail. Pour lui, ce procès
est une lueur d’espoir. « C'est un béret rouge qui m'a tapé sur la tête avec un
fusil. J'ai toutes mes preuves, un certificat médical, j'ai les photos de mes
mains plâtrées, à côté des victimes couchées dans la salle. »
Des centaines de victimes se sont signalées auprès
d’organisations de défense des droits de l’homme. « À l'époque, le ministre de
la Justice avait la ferme volonté d'engager ce procès, mais il n'y a jamais eu
l'accompagnement et la volonté politique de M. Alpha Condé pour l'organiser
parce qu'il est parti du principe que cela allait déstabiliser son régime,
rappelle Mamadou Aliou Barry, le directeur du centre d’analyse et d’études
stratégiques. Quand il a pris le pouvoir en 2010, il a gardé tous ceux qui
étaient cités dans les évènements du 28-Septembre aux mêmes responsabilités. »
Une trentaine de victimes, présentées comme des témoins
directs des crimes commis, devrait témoigner lors de ce procès. Ces personnes
espèrent bénéficier de mesures de protection pour éviter toute pression les
semaines à venir.
Radio France Internationale
(RFI)