La fin de la chasse au gros gibier ouverte par la junte militaire au
pouvoir au Niger n’est pas prête de fermer. Même que la saison bat son plein,
et le général Abdourahamane Tiani et ses hommes semblent s’en délecter sans
modération. Arrivé aux affaires suite au coup d’Etat perpétré contre le pouvoir
démocratique du président élu Mohamed Bazoum, qui s’oppose toujours à une
quelconque démission, les militaires ont entrepris le grand ménage, au nom d’un
sentiment anti-français qui fait bien recette actuellement dans les pays
sahéliens.
Le dernier trophée encore tout
chaud dans les mains des nouveaux maîtres de Niamey n’est autre que la cheffe
du Service des Nations-Unies au Niger, Louise Aubin, sommée, ce mardi, de
quitter le territoire nigérien sous 72 heures. La Canadienne a dû finir de
faire ses valises, dans la précipitation, tout comme les 1500 soldats français
présents au Niger dans le cadre de la lutte contre le terrorisme qui, eux, ont
déjà fait leurs paquetages et ont commencé à dire au revoir à leur terre
d’accueil d’où ils ont été chassés par la junte militaire. Tous ne feront que
marcher dans les pas de l’ambassadeur français Sylvain Itté, qui, après quelque
deux mois de résistance de Paris, a dû opérer un retour forcé sur les bords de
la Seine, déclaré persona non grata par les militaires quand ils ont arraché le
pouvoir par les armes, le 26 juillet.
Louise Aubin aurait pu prendre un
vol Air France à partir de Bamako, mais l’autre junte militaire au pouvoir au
Mali, n’ayant pas acté la reprise des vols annoncée par la société de transport
aérienne française, la fonctionnaire de l’ONU, à son départ manu militari de
Niamey devra se faire transporter par une des compagnies auxquelles la junte
militaire a rouvert le ciel nigérien depuis le 4 septembre. Air France et tout
avion français, en rappel, demeurent interdits de vol dans l’espace aérien
nigérien. Louise Aubin doit encore se demander le péché immonde qu’elle a
commis pour être renvoyée des bords du fleuve Niger comme une malpropre, elle
qui y est en poste depuis janvier 2021!
En réalité, la cheffe du service
des Nations-Unies à Niamey reçoit en pleine figure, les déflagrations des tirs
contre le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, que la junte militaire
accuse de «manœuvres (…) sous l’instigation de la France», des «entraves» qui
auraient empêché la «participation pleine et entière du Niger à la 78e
Assemblée Générale des Nations Unies», un «sabotage commandité» qui «s’est
poursuivi à la Conférence générale de l’AIEA du 25 au 29 septembre à Vienne en
Autriche et au 4e Congrès extraordinaire de l’Union postale universelle (UPU)
du 1er au 5 octobre à Riyad en Arabie Saoudite». Faute lourde et impardonnable
aux yeux de la junte nigérienne!
La fronde engagée par la junte
militaire nigérienne sur qui pleuvent sanctions économiques de la Communauté
économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et autres suspensions
d’aides financières des partenaires au développement, se poursuit donc contre
la communauté internationale. Mais les fronts ouverts par la junte deviennent
probablement un peu trop, car exposant les populations à l’asphyxie économique
et au désastre humanitaire. Même si ce volet humanitaire bénéficie toujours de
l’attention de la communauté internationale qui n’entend pas abandonner, «en
plein vol» comme l’a dit l’autre, les populations nigériennes en détresse,
elles qui subissent déjà les assauts réguliers des terroristes sans foi ni loi.
Dans la foulée de leur dénonciation d’un coup d’Etat, plus de deux mois après,
pour des raisons connus d’eux seuls, c’est une suppression de quelque 500
millions de dollars d’aide économique au Niger qu’ont annoncée les Etats-Unis.
C’est certain, ces coupures inattendues du robinet de la part de la Banque
mondiale, de pays européens et désormais des Etats-Unis, ne sont pas sans un
fort impact négatif sur le quotidien des Nigériens.
Certes, la souveraineté des pays
africains, et pas que du Niger, n’est plus à négocier et le changement de
paradigme enclenché doit être irréversible pour l’Afrique qui doit, enfin,
occuper la véritable place de décision qui est la sienne dans le concert des
nations. Mais ne faut-il pas, que les différentes parties sachent raison
garder, pour aborder cette nouvelle ère des relations internationales avec plus
de sérénité? Question au général Abdourahamane Tiani et ses hommes dont tous ne
sont certainement pas dans un esprit de va-t-en-guerre!