Procès des événements du 28 septembre : le condensé de la semaine du 6 février

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  • 10 février 2023 09:40

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L’interrogatoire du Colonel Blaise Goumou a pris fin ce lundi 06 février 2023. C’était au terme de 5 cinq jours d’audience. Quand il a comparu le lundi, Blaise Goumou à continuer de répondre aux questions des avocats de la défense. Celui du colonel Moussa Tiegboro Camara a été le premier à l’interroger. Le gendarme a encore une fois réfuté les faits d'assassinat, de meurtre, de complicité de viol, de coups et blessures volontaires et de vol à mains armée dont il est reproché.

L’officier a soutenu qu'il est renvoyé devant ce tribunal parce que le rapport de la commission d'enquête internationale vise un certain Blaise Goumou qui serait l'adjoint du colonel Moussa Tiegboro Camara. Il a insisté qu'il ne s'agit nullement de lui. Plus loin, il regrette pourquoi c'est seulement lui et Moussa Tiegboro Camara qui sont inculpés dans cette affaire, alors qu’ils n’étaient pas les seuls chefs d'équipe des services spéciaux à se rendre au stade du 28 septembre en 2009. Selon lui, il n'a jamais vu Moussa Tiegboro menacer des manifestants à la rentrée du stade. Et après les événements du 28 septembre, aucun manifestant n'a été torturé en sa présence dans les locaux des services spéciaux, a déclaré Blaise Goumou.

En clamant son innocence le même jour, Blaise Goumou lui-même a sollicité une mise en liberté.

L’officier, anciennement en service aux services spéciaux, a indiqué qu’il est convaincu qu'il est renvoyé devant ce tribunal criminel à tort. Il a sollicité effectivement sa mise en liberté au terme de son interrogatoire « Je demanderai à monsieur le président et aux honorables assesseurs de me libérer, ne serait-ce que provisoirement. Je peux même rester sous la main du tribunal en venant suivre le procès les lundi, mardi et mercredi pour ne pas qu'ils pensent autrement. Mais que je sois libre les autres jours, pour que je puisse faire face au traitement de ma sœur. Je vous ai dit que ce procès a causé deux victimes chez moi. Vous ne pouvez pas imaginer l'état dans lequel je me trouve », s'est-il apitoyé sur son sort, en répondant à la dernière question de Me Jean Moussa Sovogui

L’accusé a aussi répondu aux questions de Me Salifou Béavogui, un autre avocat de la défense. Ce conseil de Kalonzo a mis l’accent sur les rapports qui avaient existé entre Blaise Goumou et ses co-accusés.

L’avocat a commencé par demander à Blaise s’il connaissait le colonel Ibrahima Camara dit Kalonzo. L’accusé a répondu par l’affirmative. Il a rappelé qu’ils ont travaillé ensemble au sein des services spéciaux. Et même bien avant, il dit l'avoir connu à l'état-major de la gendarmerie dans le cadre de la formation. Quant à Cécé Raphaël Haba, Blaise Goumou a indiqué qu'il ne l'a jamais connu. Par contre, il dit avoir connu le capitaine Marcel Guilavogui et le colonel Moussa Tiegboro Camara, bien avant la prise du pouvoir par le CNDD. L'officier de la gendarmerie a vanté les qualités d'officiers modèles de tous ceux qu'il connaît. Selon lui, pour le moment, ils n'ont nullement été confrontés à une quelconque preuve allant dans le sens de prouver leur culpabilité par rapport aux événements du 28 septembre.

Blaise Goumou s’est montré agacé d’entendre qu’il a été proche de l’ancien président du CNDD.

Cette accusation est venue du commandant Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba pour la première fois.  Il avait cité le nom du colonel Blaise Goumou comme étant un des proches du capitaine Moussa Dadis Camara, qui œuvraient par ailleurs pour le maintien du CNDD au pouvoir. L'accusé réfute et qualifie cette déclaration d'allégations. En répondant aux questions de son avocat Me Yaramossé Saoromou lundi, Blaise Goumou a expliqué qu'il n'a jamais été proche de l'ancien président du CNDD. « Je voyais le président comme tous les autres guinéens », a opposé le gendarme avant d'ajouter qu'il n'a jamais été membre du CNDD et son service n'était nullement lié à la garde présidentielle. Si quelqu'un doit revendiquer pour avoir été proche du président du CNDD estime Blaise Goumou, c'est bien Toumba Diakité. « C'est lui qui a bénéficié des avantages du pouvoir comme des véhicules, alors que moi je prenais le taxi pour aller au service », s'est-il dédouané. Revenant sur son intervention dans la formation des recrues de Kaléya, Blaise reconnaît qu'il y a formé des jeunes, mais recrutés sous le feu général Lansana Conté. En revenant aux événements du 28 septembre 2009, l'accusé défend que le fait d'être au stade, ne constitue pas une infraction à la loi pénale. Parlant du port de bérets rouges par des éléments du colonel Moussa Tiegboro Camara auxquels il appartenait, Blaise dit n'avoir jamais porté le béret rouge.

Au compte de la deuxième phase de l’interrogatoire de Blaise Goumou, des avocats des parties civiles comme Me DS Bah, ont à nouveau sollicité une expertise a Faban

Me Alpha Amadou DS Bah a sollicité un transport judiciaire à Faban dans la commune de Matoto, où seraient ensevelis des corps des victimes du massacre du 28 septembre en 2009. « À la lumière de tout ce qui a été dit concernant Faban, nous demandons qu'un transport judiciaire soit ordonné sur les lieux pour comprendre effectivement s'il y a la nécessité de faire une expertise médico-légale pour pouvoir identifier des personnes qui ont été ensevelies là », a demandé l'avocat. Est-ce que vous connaissez le lieu précis ? A interrogé le juge en s'adressant à Me DS Bah. « Oui, monsieur le président, on connaît le lieu », a répondu l'avocat. A la fin de son questionnaire, le même conseil a demandé au tribunal d'accepter d'effectuer un déplacement sur le stade où se sont produits les évènements du 28 septembre en 2009. « Il faut que le tribunal accepte, au moment venu, d'ordonner un transport pour qu'il y ait la reconstitution des faits pour que chacun soit mis devant ses responsabilités », a sollicité Me Alpha Amadou DS Bah.

Au terme de l’interrogatoire du colonel Blaise Goumou, son avocat a réitéré sa demande de mise en liberté.

Ah oui, l’avocat a soumis au tribunal une demande de mise en liberté en faveur de son sur la base de l'article 244 du code de procédure pénale. Le ministère public par la voix du procureur Sidiki Camara, s'est opposé à cette demande. Selon lui, plusieurs parties civiles et témoins ont indiqué dans leurs procès-verbaux avoir vu Blaise Goumou au stade. En attendant la comparution de ces derniers, l'accusé doit être gardé en prison, a insisté le substitut du procureur. Le magistrat a ajouté que les faits reprochés au gendarme sont tellement graves que toute mise en liberté en sa faveur, compromettrait le cours normal des débats. Les avocats des parties civiles ont abordé dans le même sens. Ils ont trouvé la demande de leur confrère, prématurée. Le juge a finalement rejeté ladite demande en application des dispositions de l'article 244 du code de procédure pénale. Même si sa demande n'a pas prospéré, le conseil de Blaise Goumou avait bénéficié du soutien des avocats de Moussa Tiegboro Camara et du colonel Ibrahima Camara dit Kalonzo.

Mardi, le tout dernier des 11 accusés qui sont pour le moment renvoyés devant le tribunal criminel de Dixinn délocalisé à la Cour d'Appel de Conakry a comparu.

Il s'agit de Paul Mansa Guilavogui. Il était 10h et demi, quand le militaire a été appelé à la barre par le juge. Il a comparu dans une chemise noire, le crâne rasé, avec un visage renfrogné. Il a décidé de s'arrêter pour se prêter aux questions des différentes parties au procès, non pas en français, mais en Sosso. Comme ses co-accusés, il a eu droit à un exposé préliminaire. L'accusé a commencé par rendre grâce à Dieu, prier pour ses parents et féliciter les autorités actuelles pour avoir organisé ce procès. Et avant de parler du fond du dossier, Paul Mansa Guilavogui a longuement expliqué la manière dont il a été arrêté après la tentative d'assassinat dont Dadis a été victime le 3 décembre au camp Koundara, actuel camp Makambo. Il témoigne avoir été brutalement arrêté par les hommes de Dadis à la quête de Toumba, avant d'être victime de toute sorte de sévices corporelles. Il aurait péri à l'époque, si les militaires qui l'ont arrêté n'avaient pas découvert qu'il est originaire de la forêt.

A la suite de son exposé préliminaire, est venu la phase des questions réponses.

Effectivement, et comme il est de coutume, c’est le juge qui a ouvert le bal. Ibrahima Sory 2 Tounkara a demandé à Paul Mansa Guilavogui, où il était le 28 septembre en 2009. « J'étais à Kankan », a répondu l'accusé. Il était allé à Kankan selon lui, pour chercher sa solde. Il ajoute qu'il est rentré à Conakry le 2 octobre 2009 avant de se présenter au camp deux jours plus tard. Même s'il affirme qu'il ne sait rien des événements du 28 septembre 2009, l’ancien militaire reconnaît qu'il travaillait à l'époque au compte du camp Koundara, actuel camp Makambo. Il ne nie pas non plus les sévices corporels dont des manifestants interpellés ont été victimes au sein dudit camp. Paul Mansa Guilavogui accuse Bégré, ancien commandant de cette caserne d’être le principal responsable de ses tortures. Malgré qu'il soit dénoncé par les rescapés, l'homme continue de nier avoir torturé qui que ce soit. Les tortures au camp Makambo ont elles débouché sur des cas de morts ? a interrogé Djènè Cissé à la suite du juge. « Je n'ai jamais vu de morts », a juré l'accusé. L'adjudant a ajouté qu'il ne sait pas si c'est au stade du 28 septembre que des citoyens torturés au camp Makambo ont été arrêtés. En plus des tortures, des cas de viol sont survenus dans l'enceinte du même camp, a rappelé la magistrate. L'accusé répond qu'il n'en n'a jamais participé encore moins assisté. L'homme a révélé qu'il est en prison depuis 9 ans. A cause de cette affaire du 28 septembre, il dit avoir perdu son boulot parce qu'étant désormais radié de l'effectif de l'armée, mais aussi sa femme aussi et l'éducation de ses enfants.

Sur le motif de son arrivée au camp Koundara, Paul Mansa révèle qu’il y est allé de lui-même alors qu’il travaillait à Kankan

Effectivement, il l’a dit mercredi. Paul Mansa Guilavogui répondait aux questions des avocats des parties civiles. C'est Me Amadou Kamano qui avait ouvert le bal. Qu'est-ce qui a motivé votre arrivée au camp Koundara ? a entamé l'avocat. « C'est moi-même qui ai décidé de venir travailler à Koundara », a répondu l'accusé. Son arrivée dans cette caserne a été facilitée selon lui, par un de ses amis du nom de Alhassane Bah. Paul Mansa Guilavogui travaillait auparavant à Kankan, en haute Guinée. Il dit avoir éprouvé le sentiment de rejoindre le camp Koundara, après son traitement suite à une maladie à cause de laquelle il a été évacué sur Conakry. Il reconnaît être venu à Koundara sans papier. Ce qui l'amenait souvent à voyager sur Kankan pour chercher sa solde, a-t-il expliqué.

Au procès des événements du 28 septembre 2009 ce mercredi, les débats ont aussi porté sur la personne qui commandait le camp Koundara.

Selon Paul Mansa Guilavogui, cette caserne était dirigée par Bégré, nommé officiellement par le président de la transition d'alors. Pourtant révèle Me Amadou Kamano, l'accusé avait bien indiqué dans son procès-verbal devant le juge d'instruction que c'est Toumba qui commandait le camp Koundara. Aujourd'hui, il jure ne l'avoir jamais dit. Tout de même est-ce que le commandant Toumba venait au camp de temps en temps ? a demandé l'avocat. L'accusé témoigne que l'ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara n'était jamais venu à Koundara en sa présence. Cependant, il était informé de son passage parfois à travers ses amis, a expliqué Paul Mansa Guilavogui. Me Amadou Kamano a ensuite sollicité auprès du tribunal, la comparution de tous les bérets rouges qui étaient en service au camp Koundara, au moment où les évènements du 28 septembre survenaient. Il estime que cela permettra à Paul Mansa Guilavogui d'indexer physiquement ceux qu'il accuse dans son procès-verbal, d'être responsables des tortures au sein de cette caserne.

Le procès des événements est renvoyé au 13 février pour la suite de l'interrogatoire de Paul Mansa Guilavogui. Mais avant, l'accusé a été interrogé par les avocats de la défense, comme celui du colonel Moussa Tiegboro Camara.

Me Moussa Sovogui a relevé ce qu'il a appelé l'incohérence dans les propos de l'accusé. Il n'a pas compris pourquoi Paul Mansa a reconnu le passage qui parle de sa radiation de l'armée dans son procès-verbal, mais pas sa signature sur ledit document. Il avait confié depuis mardi, qu'après son arrestation suite à la tentative d'assassinat du capitaine Moussa Dadis Camara, il a été conduit à la base militaire, avant d'être auditionné dans les locaux des services spéciaux dirigés à l'époque par Moussa Tiegboro Camara. Ces faits se sont produits le 4 décembre devant Tiegboro, a-t-il indiqué. L'avocat de cet officier de la gendarmerie a révélé que son client n'était pas à Conakry le 4 décembre. Il avait été évacué au le Maroc pour des raisons de maladie, a précisé Me Moussa Sovogui. Vous l’avez déjà annoncé, le procès se poursuit le 13 février prochain, Mamadou Oury Diallo.

Sékou Diatéya Camara 

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