A mesure que la date butoir fixée pour clore la page de la transition se profile à l’horizon, la junte guinéenne donne l’impression de marcher à rebours de ce chronogramme, pourtant fixé d’un commun accord avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Le discours du gouvernement semble d’ailleurs occulter dorénavant le vocable du retour à l’ordre constitutionnel, au profit de celui du développement. Et en la matière, le discours du général Amara Camara, tout puissant ministre Secrétaire général de la présidence de la République, réitérant l’engagement du chef de l’État à faire du développement de la Guinée, la pierre angulaire de sa feuille de route, n’avait rien de subliminal, ce lundi, lors de la cérémonie de lancement de la semaine porte ouverte de la Banque nationale d’investissement (BNIG).
Ces derniers temps, la durée de la transition cristallise de
plus en plus les débats dans la cité. Bien que l’opinion en soit réduite à des
conjectures, plusieurs indices concordants laissent cependant entrevoir une
possibilité de glissement du chronogramme au-delà du délai des deux ans
impartis, à cet effet.
Comme le discours onusien du colonel Mamadi Doumbouya,
révélateur des velléités du pouvoir de vouloir changer de fusil d’épaule, dans
la conduite de la transition.
Un changement de cap, qui n’aura fait qu’apporter de l’eau
au moulin des contempteurs du CNRD. Et c’est partant de ce point de fixation,
qu’une frange de l’opinion, pense désormais que le jeune loup aux dents
longues, logé sous les lambris dorés du palais, serait en train de prendre goût
au pouvoir. Ainsi en tant que maître des horloges, le colonel Mamadi Doumbouya
pourrait autant que faire se peut, bousculer le calendrier des élections,
censées ouvrir la voie vers un retour à l’ordre constitutionnel.
Ce qui pourrait allonger le chronogramme au-delà de fin
décembre 2024, considérée jusqu’à preuve du contraire, comme deadline de cette
transition.
La conjoncture étant favorable pour une telle éventualité,
avec la crise ukrainienne à laquelle vient de se greffer l’escalade du conflit
israélo-palestinien. La communauté internationale a bien des chats à fouetter,
qu’elle pourrait détourner le regard de l’intrigue qui se joue dans notre
landerneau. Sans une once de regret, ni le moindre état d’âme.
A ce « chèque en blanc » que pourrait ainsi offrir la
communauté internationale à la junte, pour mener le vaisseau à sa guise et à
son rythme, il faut ajouter le vide créé par l’aboulie des corps
intermédiaires. En effet, ces derniers pris à rebrousse-poil par les nouveaux
maîtres du pays, et faute de pouvoir se faire entendre par la rue, n’ont
d’autre alternative que des déclarations dans la presse.
Un combat d’arrière-garde, synonyme de baroud d’honneur pour
la société civile et l’aile dure des partis politiques, réunis au sein des
forces vives. Qui, à mesure que la transition s’étire en longueur, donnent
l’impression d’être mises sous éteignoir.
Leurs porte-étendards que sont Cellou et Sidya, deux vieux
routards de la politique étant dans une valse-hésitation entre rentrer bercail
ou demeurer à l’étranger.
Du pain bénit pour la junte qui pense poursuivre sa
refondation jusqu'à soif. Quitte à briser la promesse du colonel Doumbouya, qui
s'était pourtant juré de ne pas dépasser le délai imparti pour la durée de la
transition.
Mamadou Dian Baldé