A en croire une information virale sur les réseaux sociaux et confirmée
par une source à Dakar, Macky Sall s’est rendu auprès du Serigne de Touba, dans
la nuit du 5 au 6 juin. Une actualité, qui peut donner de l’espoir aux
Sénégalais, car la démarche pourrait fait tomber, pourquoi pas pour de bon, la
tension créée par les manifestations ayant déjà fait plus de 15 morts, en trois
jours, selon les chiffres officiels. En tout cas, si les leaders religieux
doivent éviter de plonger dans la politique, ils ont tout de même le devoir
d’intervenir, en temps de crise pour faciliter un retour de la paix. Du reste,
notre éditorial de ce lundi a fait la part belle à l’entrée dans la danse de
ses chefs spirituelles qui pourrait être salvatrice pour le bateau sénégalais
qui ne cesse de tanguer dangereusement.
Après trois jours de violences
meurtrières et de destruction sans commune mesure de biens publics et privés,
le Sénégal a retrouvé son calme depuis ce dimanche. Mais un calme bien
précaire, vu que le feu couve toujours sous la cendre. Il suffit juste d’un
tout petit souffle sur la braise, comme l’arrestation de Ousmane Sonko qui peut
intervenir à tout moment, ou l’entêtement de Macky Sall à faire le mystère
autour du fameux 3e mandat, pour faire exploser, de nouveau, Dakar ou
Ziguinchor. Le Sénégal, il ne faut pas avoir peur des mots, est à la croisée
des chemins ! Le pays où le thiéboudiène, cette spécialité culinaire
sénégalaise de riz et de poisson, est si délicieux. Sauf qu’en temps de houle
socio-juridico-politique qui secoue actuellement le Sénégal, même le bissap
bien sucré qui accompagne ce met onctueux, a un goût de fiel !
Il urge de transformer l’essai du
calme précaire en paix des braves. Et ça, c’est le vœu ardent de la majorité
des Sénégalais, notamment de ces étudiants dont certains vivent des moments de
détresse, parce que leurs universités sont brûlées ou qu’ils ont été sommés de
les évacuer dans la précipitation, sans savoir où déposer leurs baluchons. Que
dire de tous ces commerçants qui ont dû baisser rideau, sans oublier les
propriétaires et employés de ces établissements financiers saccagés et incendiés,
pour ne citer que ces victimes de la furia de manifestants chauffés à blanc par
des discours de politiciens aux intérêts égoïstes et parfois vils ?
Non, un mort de plus sera un mort
de trop ! Plus aucune famille sénégalaise ne doit encore être endeuillée parce
qu’un justiciable, en l’occurrence Ousmane Sonko, défie la justice et qu’un
président sortant, Macky Sall, pour ne pas dire son nom, s’entête à entretenir
un flou lourd à couper au couteau, autour de ses intentions, réelles ou
supposées, de flirter avec une «3e candidature » à la fin de ses deux mandats
constitutionnels. Mais où sont donc passés tous les ressorts sociaux dont le
Sénégal, à l’instar d’autres pays sur le continent noir, dispose et qui savent
ramener la paix en cas de troubles causés par des membres de la communauté ?
Pourquoi ce silence des leaders religieux qui, pourtant, ont seuls l’art d’user
de leur grande influence auprès de leurs ouailles pour les rendre dociles ?
Combien de morts faut-il encore
pour dire « y’en marre » aux pyromanes qui confondent manifestation et vandalisme
? En somme, pourquoi les Serignes, ces grands guides spirituels sénégalais,
s’emmurent-ils dans ce mutisme incompréhensible, face à cette vague
destructrice qui menace le Sénégal, pays d’hospitalité légendaire ? A
moins que les maîtres de la religion et des choses de la vie soient devenus
subitement impuissants au point de ne pouvoir ramener les uns et les autres à
la raison, pour des raisons que la Raison ignore.
Certes, la politique n’est pas un
jeu d’enfant. Cependant, l’intérêt de la nation doit toujours être placé
au-dessus des visées singulières de personne ou de conglomérat de personnes qui
se servent du pouvoir pour porter leurs bretelles pendant que le peuple, le
vrai, se serre la ceinture jusqu’à étranglement ! Que des mains invisibles
soient derrière l’un et l’autre des protagonistes ne doit pas constituer un
obstacle pour l’action des leaders religieux qui savent se muer en « sages»
pour renforcer le ciment de la cohésion sociale.