Décidé à porter le fer contre le système oligarchique et de gouvernance à la petite semaine, ayant conduit à la déliquescence de l’Etat, le Conseil national pour le rassemblement et le développement (Cnrd) ne veut pas rester l’arme au pied. Mais pour remettre le navire à flot, la junte doit user de tacts, avec les moyens du bord, en ayant à l’idée que la transition ne sera pas un long fleuve tranquille. D’où cette constance dans l’effort, dont il faudra faire preuve, pour faire face au lot des défis quotidiens.
Une transition politique est synonyme de rupture avec
l’ancien monde. Pour le cas guinéen, ce vieux monde se résumait quasiment à des
privations de libertés, à un ostracisme de l’opposition et à une déprédation
des ressources.
Cet inventaire à la Prévert, non exhaustif, est à mettre à
la décharge de la junte, pour justifier son coup de force. Pour porter
l’estocade contre son mentor, le colonel a dû s’affranchir des tabous et totems
du premier cercle.
Maintenant qu’il est frais dans les premiers rôles, pour
réussir son pari, de remettre la Guinée sur les rails, il lui faudra avoir les
pieds sur terre. Ce changement de paradigme doit reposer sur la justice qui
constitue l’épine dorsale d’une démocratie.
Les Guinéens attendent donc de la junte, qu’elle redonne au
pouvoir judiciaire ses lettres de noblesse. Afin qu’on en soit pas encore à
pédaler dans la mélasse de ces interpellations arbitraires de citoyens par des
commandos encagoulés. Comme ce rapt en pleine nuit du porte-parole de l’ancien
gouvernement. Des pratiques surannées, issues de l’héritage toxique du
président déchu.
Heureusement que le Cnrd a su raison garder, en renonçant à
la mise sous mandat de dépôt du ministre Tibou Kamara. Sans toutefois manquer
de préciser les raisons de sa brève interpellation. Qui serait liée selon la
junte, à une violation de l’interdiction faite aux membres de l’ancien régime
de s’abstenir de toute « action séditieuse ». Seul son de cloche dont on doit
pour le moment se contenter.
A la veille de cet incident, le Cnrd s’était aussi fendu
d’un communiqué, déplorant la forte mobilisation ayant marqué le retour des
leaders du Fndc en exil, en cette période de pandémie. Tout en exhortant les
autorités compétentes à en tirer les conséquences de droit. Ce qui a déchaîné
les passions dans la cité et sur les réseaux sociaux.
En tout état de cause, certains observateurs pensent que
pour garder la main, la junte doit user d’une main de fer dans un gant de
velours. Tout en évitant de reproduire les mêmes travers que sous l’ancien
régime.
Quand on sait que c’est pour sortir le pays de l’emprise de
la politicaillerie, que le colonel Mamady Doumbouya et ses hommes disent avoir
pris leur responsabilité, pour trancher le nœud gordien.
Avec la ferme volonté de guérir « le mal guinéen ». Terme
générique repris à son compte par le président du Cnrd.
Vivement que le remède ne soit pas pire que le mal.
Mamadou Dian Baldé