«La durée de la Transition est fixée à 24 mois pour compter du 26 mars
2022 conformément à l’article 22 de la Loi no 2022-0001 du 25 février 2022
portant révision de la Charte de la Transition». Ainsi en a décidé le président
de la transition politique malienne, à travers un document viral sur les
réseaux sociaux depuis la nuit de ce lundi. Assimi Goïta aurait voulu faire un
pied de nez à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest
(CEDEAO) qu’il n’aurait pas agi autrement. En effet c’est seulement 48 heures
après le sommet extraordinaire des chefs de l’Etat et du gouvernement de
l’Afrique de l’ouest, réunion qui devait décider de l’assouplissement ou du
durcissement des sanctions contre le Mali, dont, à l’instar du Burkina Faso et
de la Guinée, la durée trop longue de la transition n’est pas du tout du goût
de l’organisation sous-régionale, que le nouveau maître de Bamako, habitué des
coups de force, a décidé de décider en solo.
Ce n’est d’ailleurs pas mauvais
que le pouvoir kaki malien, opère ce énième passage en force, le temps ayant
horreur du vide et les populations, qu’elles soient du Mali ou des pays
voisins, commençant à étouffer sous le poids des sanctions drastiques pour
faire plier la junte militaire à qui il est enjoint de remettre le pouvoir aux
civils dans un délai raisonnable.
Quelle sera la réaction de la
CEDEAO? L’organisation présidée actuellement par le Ghanéen Nana Akufo-Addo
va-t-elle voir en cet acte un affront, elle qui préconise une transition de 16
à 18 mois? Les têtes couronnées de la Communauté, qui n’arrivent pas à obtenir
le consensus en leur propre sein, vont-ils plutôt considérer, mettant leur
«orgueil» de côté, que l’«arrogant» colonel a tout de même cédé à leur
désidérata, se confinant désormais à deux ans au lieu des quatre ou cinq ans
qu’il réclamait? Questions pour l’instant sans réponse, ceux qui nous
gouvernent ayant à peine eu le temps de digérer le «banku», le plat national
ghanéen, mélange de maïs fermenté et de manioc contenu dans une pâte
consistante blanchâtre lisse, cuit à l’eau bouillante.
Certes, tout auteur de prise de
pouvoir par les armes, moyen anticonstitutionnel s’il en est encore de prendre
possession du palais présidentiel, n’est point en mesure de braver les
principes d’une organisation à laquelle son pays a adhérée librement. Assimi
Goïta étant de surcroît un double putschiste devrait faire profil bas. Sauf
qu’après ses félonies, deux autres colonels, en l’occurrence le Guinéen Mamadi
Doumbouya et le Burkinabè Paul-Henri Sandaogo Damiba, qui ont également pris le
pouvoir kalach en l’air, ont mis davantage à mal la fragile démocratie dont
s’enorgueillissait l’ouest du continent. D’où quelque peu, le cruel dilemme qui
s’imposait à la CEDEAO et à la Communauté internationale de sévir sans
ménagement, au risque d’entraîner d’irréparables dégâts collatéraux, notamment
pour les pays sahéliens dont les populations ploient déjà sous le poids des
crises sécuritaire et humanitaire.
Et si entre les 18 mois de la
CEDEAO et les 24 mois d’Assimi Goïta, et tenant compte des presque deux années
que ce dernier a déjà passées au palais de Koulouba, les deux parties
s’accordaient sagement sur un délai de 20 mois? Le modus vivendi,
n’écorcherait, ainsi, ni l’«arrogance» du colonel putschiste, ni l’«orgueil» de
la communauté internationale qui a régulièrement montré sa volonté d’accompagner
ne les transitions au Mali, en Guinée et au Burkina Faso.
Comme le dit l’adage, il y a un
temps pour tout, celui de la guerre et celui de la paix. Il est surtout temps
de ne tenir compte que des souffrances des populations et de les alléger, voire
y mettre fin.