Le double sommet de la Communauté économique des
Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et de l’Union économique et monétaire
ouest-africaine (UEMOA) a-t-il vraiment servi à quelque chose?
Répondre par la négative serait faire offense à ceux qui nous gouvernent qui
ont laissé en plan toutes ces tâches de grande importance qu’exigent leurs
hautes fonctions, pour rallier Accra, chez leur hôte Nana Akufo-Addo, le
président en exercice de la CEDEAO. Même le Nigérian Muhammadu Buhari qui
brillait par son absence à ces rencontres a fait le déplacement. Toute chose
qui confortait les analystes politiques, et même les populations que de grandes
décisions étaient dans l’air, dans le sens de la levée, ou tout au moins de
l’assouplissement ou a contrario, le durcissement des sanctions, selon le cas,
contre le Mali, la Guinée et le Burkina Faso, les trois pays dirigés par des
juntes militaires en quête de transition politique à durée indéterminée.
Même au Mali où il est en place
depuis près de deux ans, le pouvoir kaki du colonel Assimi Goïta compte faire
la loi pour quelque temps encore. Certes, de 4 ou 5 ans de transition, les
militaires auraient revu à la baisse, leurs ambitions, mais le compte n’est
toujours pas bon pour la CEDEAO qui s’arc-boute sur son tarif classique de 16 à
18 mois. Quid de la proposition par les Maliens du Togolais Faure Gnassingbé,
comme médiateur? Question sans réponse, sauf que la CEDEAO a renouvelé sa
confiance à l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan pour poursuivre ses
efforts, jusque-là infructueux sur les berges du Djoliba.
La fumée blanche que tous
attendaient ne s’est donc pas dégagée du ciel ghanéen relativement à
l’assouplissement de sanctions qui commencent à devenir insupportables, non
seulement pour le Mali, mais également pour ses voisins qui commercent avec
lui. Coincés entre les la cherté de la vie accentuée par la crise ukrainienne
et les conséquences des attaques terroristes meurtrières, les pays de l’Afrique
de l’ouest, notamment ceux sahéliens ne savent plus où donner de la tête, entre
crise sécuritaire et humanitaire. Comme l’a si bien dit l’imam Mahmoud Dicko,
les militaires sont dans leur «arrogance» et la communauté internationale dans
son «orgueil». Et au bout du rouleau, ce sont les pauvres populations qui
doivent se serrer la ceinture au point de s’étrangler. Les différentes
transitions politiques en cours au Mali, en Guinée et au Burkina Faso à des
degrés différents, constituent, simplement, des équations à multiples inconnues
pour l’Afrique.
Car, pour paraphraser le Nigérien
Mohamed Bazoum, qui est visiblement en train d’avoir raison trop tôt, les
militaires, sont loin d’être une digue contre les attaques armées et, encore
moins une assurance tout-risque pour la gouvernance et la démocratie. Ainsi,
pour les schémas de sortie de crise pour les pays sous la coupe des militaires,
il n’y a rien à voir, repassez le 3 juillet! Et là encore, rien ne garantit un
recul des militaires au pouvoir, qui en sont même arrivés à oublier qu’ils sont
des putschistes, donc arrivés aux affaires par effraction!
Mais le tableau n’était pas que
noir à Accra. La CEDEAO qui entend accompagner les pays en transition dans
leurs efforts, a donné sa confiance à l’ancien président nigérien, président
démocratiquement élu qui a passé la main à un autre président lui aussi
démocratiquement élu et bien au fait des dossiers de la paix, pour gérer la
médiation avec la junte militaire au pouvoir au Burkina. Mahamadou Issoufou
aura pour tâche de convaincre le Burkinabè à ramener à des proportions plus
raisonnables, sa transition fixée à 36 mois. En tout cas, cette durée de trois
années ne passe pas auprès d’une CEDEAO qui, tout en mesurant les avancées
opérées au Burkina, et mesurant la double situation sécuritaire et humanitaire
en dégradation continue, n’est tout de même pas prête à être plus large que
d’accoutumée sur le temps imparti pour remettre aux civils, un pouvoir arraché
par les armes. Et l’UEMOA qui cherche toujours président aura trouvé, son
président de la Commission. Dès juillet, Jean-Claude Kassi Brou, quittera, en
effet, son fauteuil de patron de la Commission de la CEDEAO à Abuja, pour
déposer ses valises à Dakar, désormais coiffé par son président Alassane
Ouattara, de la casquette de gouverneur de la Banque centrale des Etats de
l’Afrique de l’ouest (BCEAO).
Rien, par contre, n’est précis
sur la patate chaude qu’il refilera à son successeur dans la capitale
nigériane, sur les transitions politiques au Mali, en Guinée et au Burkina!