Yves de M’Bella avait invité dans son émission "La Télé d’ici vacances" du lundi 30 août un ex-violeur, à montrer comment il abusait de ses victimes. L’ex-violeur, Kader Traoré, qui avait été condamné par le passé pour viol et coups et blessures, s’est, quant à lui, vu infliger vingt-quatre mois de prison ferme et 500 000 FCFA (750 euros) pour les mêmes motifs.
Marie Emilienne Adiko de la ligue ivoirienne des droits des
femmes, ne comprend cependant pas pourquoi c’est seulement l’animateur qui est
sanctionné.
« Avant d’aller jusqu’à l’émission, il y a quand même
des phases qui sont respectées. Il y a un script, il y a une validation de sa
hiérarchie. Donc aujourd’hui, je pense que Yves de M’Bella, il est mis
au-devant. Mais ce n’est pas la seule personne. Mais la chaîne doit sanctionner
toutes les autres personnes et je ne parle pas seulement de suspension. Mais de
vraies sanctions. Parce que c’est uniquement de cette manière-là, qu’on pourra
faire bouger les choses », explique l'activiste des droits de l'homme.
« Une petite
victoire »
L’invité de l’animateur qui a fait la simulation de viol a
été quant à lui, condamné à vingt-quatre mois d’emprisonnement ferme avec cinq
cent mille francs CFA d’amende et interdiction de voyager sur le territoire
national.
Même si Benedict Joan de l’ONG "chat-noir" dit ne
pas être satisfaite par toutes ces peines, elle soutient en revanche que c’est
déjà une petite victoire de leur lutte.
« Ce sont douze mois avec sursis. Donc ces personnes
n’écopent pas de peine de prison réelle. Par contre, c’est une avancée. Une
avancée dans la lutte des droits des femmes qui sont liés à la culture du viol »,
estime Benedict Joan.
« Le droit n'a
pas été dit »
Tout en condamnant l’émission incriminée, Jean Claude
Coulibaly, président de l’Union des journalistes de Côte d’Ivoire, se dit
inquiet du non-respect de la loi sur la dépénalisation des délits par voie de
presse dans cette affaire. Jean Claude Coulibaly s’étonne cependant qu’on
sanctionne l'homme de média et on ne sanctionne pas le média par lequel il a
commis sa grosse bévue.
« Ce verdict ne me satisfait pas. Nous pensons que
c’est une décision juridique qui ma foi n’est basée sur aucun fondement
juridique. Parce que l’acte posé par le confrère est un délit par voie de
presse. Il l’a fait dans l’exercice de son métier. Et la loi sur la presse de
2017 est très claire. C’est-à-dire on ne peut pas vraiment condamné par une
peine privative de liberté, même si c’est avec sursis, un journaliste ou un
homme de média. Nous estimons qu’ici, le droit n’a pas été dit. C’est une
jurisprudence qu’on installe. C’est jurisprudence dangereuse. On a voulu plus
faire plaisir à une bonne partie de la population qui s’indigne. Et cela c’est
à juste titre », déclare Jean Claude Coulibaly.
Cette émission avait immédiatement suscité l’indignation de
personnalités, d’anonymes et de victimes de viol qui réclamaient des sanctions
contre l’animateur et sa chaîne. Deux jours après, l’indignation ne faiblissait
pas et une pétition lancée lundi soir par Désirée Dénéo, secrétaire générale de
la Ligue ivoirienne des droits des femmes, pour dénoncer les faits et réclamer
des sanctions, avait récolté hier mercredi plus de 46 500 signatures.
La Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA)
avait, dès mardi, suspendu Yves de M’Bella pendant trente jours, de toutes les
antennes et télévisions de Côte d’Ivoire. Il a, en outre, été décidé par le
comité d’organisation du concours Miss Côte d’Ivoire qui a lieu samedi, qu’il
n’animerait pas la soirée comme initialement prévu.
Avec DW