Le capitaine Moussa Dadis Camara, ancien président du CNDD, personnage haut en couleur, dont le caractère fantasque n’échappe guère à ses détracteurs, vient de se rappeler au bon souvenir de ses compatriotes, par son coup de menton, lors de l’audience du mercredi, dans le procès du massacre du 28 septembre 2009. En jetant un gros pavé dans la marre du tribunal, chargé de faire la lumière sur le massacre du 28 septembre, Dadis a dû comprendre que ce procès n’aura rien d’un long fleuve tranquille. Et qu’à l’allure où va le train judiciaire, la partie sera âprement disputée dans ce prétoire.
Réputé pour ses colères légendaires, servies dans les «
Dadis-Show », sortes de vaudevilles, qui avaient forgé sa réputation au-delà de
nos frontières, durant son magistère, l’ancien chef de l’État vient de ruer
dans les brancards contre sa détention à la Maison centrale. Dans une vidéo,
devenue virale sur les réseaux sociaux, le capitaine Dadis qui s’attendait sans
doute à ce que ses conditions carcérales soient allégées, par une mise en
résidence surveillée, telle que sollicitée par ses conseils, flétrit Dame
Thémis. Cette colère trahit la sérénité que le capitaine affichait jusque-là.
On a l’impression désormais d’avoir affaire à un homme désabusé. Lui, qui
pourtant n’a cessé de clamer son innocence, tout le long de son exil forcé dans
la capitale du pays des « Hommes intègres ». Réclamant à cor et à cri la
justice, pour laver son honneur. Honneur souillé par le sang des victimes de
cette folie meurtrière survenue le 28 septembre dans le stade éponyme, par le
fait d’hommes en uniforme. Moussa Dadis Camara, président à l’époque est
poursuivi « des faits de complicité » dans le massacre.
Ce procès historique, qui a démarré le 28 septembre dernier,
par le fait des autorités de la transition qui semblent ainsi avoir le
fétichisme des dates, sera une opportunité à saisir par l’ancien chef de l’État
pour se blanchir.
En attendant l’issue de ce jugement, pour une question
d’équité, bien des gens pensent que le capitaine devrait se soumettre au même
régime carcéral que ses coaccusés. Sa casquette d’ancien président ne devant en
aucun cas être perçue comme une prime à l’impunité.
Des anciens chefs d’Etat, rattrapés par leurs turpitudes,
peuvent bien défiler devant des prétoires. Hissein Habré, l’ancien dictateur
tchadien n’y a pas échappé, après 15 ans de cavale. C’est au Sénégal où il
avait trouvé refuge avec l’appui de l’Oncle Sam, qu’il a été rattrapé par la
justice. Charles Taylor, purge une peine de 50 ans d’emprisonnement en Grande
Bretagne. Le dernier cas en date est la condamnation par contumace de l’ancien
président burkinabè Blaise Compaoré, à la perpétuité. Quant au sort de Dadis, à
ce stade du procès, on ne pourrait présumer de rien. Son coup de menton de ce
mercredi serait à mettre au compte des mauvaises conditions carcérales, telles
que décrites par certains proches des détenus. Une grosse pierre dans le jardin
du département de la Justice.
Mamadou Dian Baldé