Suspendre un Procureur général, parce qu’il a osé remonter les bretelles à un haut gradé de la gendarmerie, qui s’est arrogé la tunique d’officier de police judiciaire, prouve qu’il y a quelque de pourri au royaume du Danemark, pour parler comme William Shakespeare. L’onde de choc provoquée par la suspension de M. Charles Wright, Procureur général près la Cour d’Appel de Conakry ne s’est toujours pas estompée. Par cet acte impopulaire, le CNRD s’est simplement tiré une balle dans les brodequins. Comme pour dire que la transition est devenue claudicante, avec la victoire des géants sur les Dieux de l’Olympe. Donc de la force voire de la barbarie sur la loi et l’ordre.
On en sait un peu plus sur les bisbilles entre le Procureur
général près la Cour d’Appel de Conakry et le Haut commandant de la
gendarmerie. Brouille qui a donné lieu à la suspension des deux grands commis
de l’Etat. Il ressort des différents témoignages recueillis autour de cette
affaire qui déchaîne tant de passion dans la cité, que ce n’est nullement sur
un simple coup de tête que M. Charles Wright s’est épanché dans la presse. Pour
dénoncer ce qui s’apparenterait à une usurpation de fonction sur fond d’abus
d’autorité.
C’est après avoir épuisé toutes les cartes, en tentant en
vain de ramener le colonel Balla Samoura à la raison, en lui signifiant entre
quatre yeux, qu’il n’avait pas qualité d’OPJ, donc par conséquent ne devrait
pas se hasarder sur des plates- bandes qui n’étaient pas les siennes, que le
Procureur général a sonné le tocsin.
En portant ce coup de semonce contre le Haut commandant,
considéré comme un des maillons forts de la nomenklatura, Charles Wright a fait
preuve d’un courage digne du lion. Sachant pertinemment qu’il avait à faire à
un officier pugnace et retors. Qui l’aurait d’ailleurs qualifié de « gamin »,
devant le chef d’Etat. Preuve qu’il a l’oreille du colonel Doumbouya.
Mais en bon magistrat, chez qui, seule prime la défense du
bien commun, il a décidé de croiser le fer avec M. Balla Samoura. Et comme si
c’était la ligne jaune à ne pas franchir, l’épée de Damoclès judiciaire n’a pas
tardé à s’abattre sur Charles Wright.
La suspension du Procureur général est le seul haut fait
d’armes qu’on connait du ministre de la Justice, Moriba Alain Koné, qui semble
se délecter des ennuis du procureur général. Qu’il ne pouvait plus voir en
peinture. D’où son empressement à le chasser de son bureau, et à confisquer son
véhicule de service, avant même de lui notifier sa suspension. Sous le regard
amusé du directeur général de la police, Abdoulaye Sampil qui, avec le zèle
d’un converti, a tenu en personne à diriger cette expédition, visant à punir le
Procureur « rebelle ».
C’est dire qu’il y a quelque chose de pourri au royaume du
Danemark, comme le disait Shakespeare. Au président de la transition de savoir
ce qu’il veut pour la Guinée. Mais de tels comportements liberticides, nous
n’en voulons plus.
Mamadou Dian
Baldé