Les assises nationales censées poser les jalons de la réconciliation nationale, et servir de ciment à l’unité nationale, risquent de n’être qu’une symphonie inachevée. Face au refus de certains membres des forces vives de prendre part à ces travaux, dont le démarrage est prévu ce mardi. C’est le cas notamment du club des 58 partis politiques, présidé par Cellou Dalein Diallo, tête de file de la classe politique guinéenne. Outre ces 58 formations politiques, le FNDC, sans rejeter le principe d’une réconciliation, prônée par la junte, émet toutefois des réserves sur l’opportunité de ces assises. Parmi les structures rétives à l’appel du CNRD, figure aussi l’Association des victimes du camp Boiro (AVCB) qui tout comme le FNDC, invite les autorités de la transition à potasser les résultats issus des travaux de la Commission provisoire de la réconciliation nationale (CPRN), mise en place en 2016 par Alpha Condé. En nous faisant l’économie de cette grand-messe qui risque d’accoucher d’une souris.
« Un peuple qui oublie son passé est condamné à le revivre »,
disait Winston Churchill, célèbre Premier ministre britannique. Cet aphorisme
sied bien à notre pays, dont le sombre passé continue de nous hanter, avec
comme symbole le camp Mamadou Boiro. Un passé méconnu de la majorité des
Guinéens, par la faute des pouvoirs successifs, qui ont géré les destinées de
la Guinée depuis 58.
Des pouvoirs qui ont préféré une
fuite en avant, en faisant dans la procrastination et le révisionnisme à tous
crins. Alors que l’idéal aurait été d’ouvrir les pages de cette histoire, qui a
connu des hauts et des bas, pour les lire, avec le grand bout de la
lorgnette.
C’est cette initiative que
viennent de prendre les autorités de la transition, sous l’égide du colonel
Mamadi Doumbouya. Malheureusement, les travaux qui démarrent ce mardi ont été
boycottés par maints acteurs sociopolitiques.
C’est le cas du club des 58
partis politiques, réunis sous la férule de Dalein, le leader de l’UFDG. Des
formations politiques qui, en lieu et place de ces assises, qu’elles assimilent
à une manœuvre dilatoire, appellent la junte à organiser plutôt un dialogue
inclusif. Une plateforme qui permettrait de sortir du brouillard de la
transition, dont aucun chronogramme n’est à ce jour disponible.
L’AVCB, regroupant les victimes
du régime de Sékou Touré serait dans la même logique du boycott. Si jamais leur
revendication n’est pas prise en compte. Revendication portant sur la remise
sur la table du rapport final produit par la Commission provisoire pour la
réconciliation nationale (CPRN), en 2016. On se souvient que les résultats des
travaux de cette Commission, pilotée par le duo composé du grand imam de la
mosquée Fayçal et l'archevêque de Conakry, avaient été gardés dans les tiroirs
du président déchu.
La coordination nationale du
FNDC s’inscrit dans la même démarche, appelant à faire recours au
travail de cette Commission. Dont les recommandations portaient sur la
mise en place d’une Commission, Vérité, justice et réconciliation (CVJR).
A l’allure où vont les choses,
ces assises risquent de produire une symphonie inachevée, au lieu de servir de
tribune cathartique aux victimes de la violence d’état qui ont jalonné le
parcours de la Guinée depuis la nuit des temps.
Mamadou Dian Baldé