Le divorce entre la France et le Mali est consommé! Ce
secret de polichinelle se confirme désormais au quotidien, non plus par des
invectives par voie de presse interposée, mais par des actes qui montrent à
quel point, les deux pays «amis» d’antan sont devenus des ennemis jurés. Le dernier
coup de sang de la junte militaire au pouvoir à Bamako s’est manifesté ce lundi
de Ramadan, jour qui marquait la fin d’une période de jeûne, de pénitences
diverses, de partage, mais aussi de pardon. Un pardon qui, visiblement, est
sorti du répertoire des protagonistes qui ne manquent plus aucune occasion pour
se lancer des salves imparables.
Pire, chaque
camp bande davantage les muscles, comme pour dire à une certaine opinion que
c’est lui qui prend les initiatives. Sinon, comment comprendre que, c’est alors
que les Français ont fait leurs paquetages et sont en train de remettre
progressivement les clés des bases qu’ils occupaient dans le cadre de la lutte
contre le terrorisme, que les autorités de la transition malienne, annoncent la
dénonciation d’accords de défense signés avec la France et des partenaires
européens? Un nouvel épisode du bras-de-fer qui, visiblement, pour l’instant
peut-être, n’émeut pas Paris et les Occidentaux qui avaient décidé d’aller voir
ailleurs.
Si la
dénonciation du traité de coopération en matière de défense signé le 16 juillet
2014 avec la France, tout comme les accords qui encadrent le statut des forces
Barkhane et Takuba, devrait prendre officiellement effet dans six mois, c’est
avec «effet immédiat» que les autorités maliennes ont rompu le Sofa de mars
2013 qui sert de pilier à l’engagement de la force française Serval sur les
cendres de laquelle est née Barkhane, de même que le protocole additionnel de
mars 2020 relatif à la présence des détachements européens de Takuba. S’il l’on
peut reconnaître au Mali sa volonté réitérée de faire respecter sa
souveraineté, c’est difficile d’expliquer cet empressement soudain à chasser
les Occidentaux des bords du Djoliba.
Cette nouvelle
montée de fièvre entre Paris et Bamako, tire, probablement, sa source des
derniers développements de la crise, alors qu’accusée par la partie malienne de
«subversion», d’«espionnage» et de «viol d’espace aérien malien», la France a
réfuté ces arguments avec la dernière énergie. En effet, avec comme preuve des
images de drone, les Français ont battu en brèche les accusations selon
lesquelles ils seraient responsables de charnier découvert dans le périmètre du
camp de Gossi fraîchement remis entre les mains des Forces armées maliennes
(FAMa). Paris a, d’ailleurs, pointé du doigt, les éléments de la société privée
de sécurité russe Wagner, d’être à l’origine de cette opération macabre
d’enfouissement de cadavres.
Sans s’ériger en
avocat de Français, qui refusent ce bébé et d’autres qui pourraient leur être
faits dans le dos, on peut se demander pourquoi cette dénonciation subite
d’accords, pendant que l’autre partie contractante est déjà en train de sortir
du ménage devenu invivable pour elle. Le dessein inavoué est-il de jeter un
gros caillou dans la machine de réarticulation, dans le Sahel, des forces
occidentales, les pestiférées de Bamako dont l’expertise, notamment en
formation des armées locales, l’affinement des services de renseignement, et
les interventions aériennes, s’avèrent importants dans la lutte contre l’hydre
terroriste qui enlace désormais toute l’Afrique de l’ouest?
Certes, la
France porte le péché originel de nation colonisatrice, et fait peu ou prou,
pour s’en débarrasser et considérer les pays africains dans une nouvelle
relation de partenariat véritable gagnant-gagnant. Faut-il pour autant jeter le
bébé avec l’eau du bain et se priver des avantages que l’Afrique pourrait tirer
de l’appui des Occidentaux dans la lutte contre le terrorisme? En tout cas, la
culture du sentiment anti-occident constitue du pain béni pour les militaires
maliens dans leur entreprise de garder le pouvoir qu’ils ont confisqué à l’aide
de deux coups d’Etat.
W S