Vous voulez engager des poursuites contre une personne pour enrichissement illicite (article 776 du Code pénal), mettez-la devant la réalité des faits en constituant un dossier consistant sur son patrimoine et en la mettant en demeure de justifier l’origine licite des ressources qui lui permettent de posséder un tel patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux.
L’impossibilité de donner cette justification, après une
mise en demeure, est le délit d’enrichissement illicite.
Pour constituer un dossier sur une personne que l’on
soupçonne de s’être enrichie illégalement, il faut mener des investigations
très sérieuses afin de pouvoir identifier les éléments constitutifs de son
patrimoine et avoir une idée exacte de ses revenus légaux. Cette mission peut
être confiée par le procureur spécial à des officiers de police judiciaire ou à
des brigades spécialisées.
Tout cela demande du temps, beaucoup de temps parfois, si
l’on veut faire un travail sérieux. Il suffit de prendre comme exemple le temps
que l’on met à retrouver les biens mal acquis par des dirigeants africains ou
l’argent qu’ils planquent à l’étranger. Ce n’est donc pas en demandant à des
gens d’indiquer eux-mêmes les biens dont ils sont propriétaires, les projets
publics qu’ils ont eu à gérer qu’on peut parvenir à engager des poursuites
crédibles. S’il faut chercher à aligner le calendrier judiciaire sur d’autres
calendriers, il y a des risques que les résultats ne soient pas ceux espérés à
moins que ce ne soit fait à dessein. Et d’ailleurs, tout avocat digne de ce nom
pourrait détruire en une seule audience un dossier qui ne serait pas basé sur
des éléments solides.
Me Mohamed Traoré, Conseiller
National, Ancien Bâtonnier