Le non-respect de la loi portant sur la liberté de la presse en
Guinée est dénoncé dans une déclaration publiée, ce lundi 3 mai 2021, par les
associations de professionnelle de presse. C’est à l’occasion de la journée
internationale de la liberté de la presse.
Ci-dessous une copie de ladite déclaration :
DECLARATION CONJOINTE DES
ASSOCIATIONS PROFESSIONNELLES DE PRESSE A L’OCCASION DU 03 MAI 2021, JOURNEE
MONDIALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE
Ce lundi 03 mai 2021, l’Humanité célèbre la 28ème Journée mondiale de la liberté de la presse. Une date devenue partout dans le monde, l’occasion propice pour les professionnels de la presse d’informer les citoyens et d’interpeller les pouvoirs publics sur des violations flagrantes du droit à la liberté d’expression. C’est également le moment de se rappeler que plusieurs journalistes risquent la mort ou la prison en informant les citoyens. Aujourd’hui, par nos célébrations ici et dans d’autres régions de notre pays et du monde, nous conférons tous gloire et espoir à la liberté de la presse. Notre engagement est aussi la garantie de l’optimisme.
Cette
année, le thème retenu par l’Unesco est : « L’information comme un bien
public ». Un thème d’une pertinence accrue, d’une réelle actualité et, qui
cadre parfaitement avec l’idée de la liberté de la presse devenue l’une des principales
libertés publiques et une condition nécessaire à l’exercice de la démocratie.
Elle procède du droit d’expression et de critique dont disposent tous les
citoyens vivant dans les pays démocratiques.
Il
faut rappeler que ce thème fait observer trois impératifs à savoir :
Des
mesures pour assurer la viabilité économique des médias d’information ;
Des
mécanismes pour assurer la transparence des sociétés Internet; et le
renforcement des capacités en matière d’éducation aux médias et à
l’information, permettant au public de reconnaître et de valoriser, ainsi que
de défendre et d’exiger, le journalisme en tant qu’élément essentiel de
l’information comme bien public.
La
liberté de la presse en toile de fond, un journalisme indépendant permet
d’exposer aux citoyens des faits, afin que ces derniers se forgent leur propre
opinion. La liberté de la presse garantit des sociétés où règnent la
transparence, où chacun peut accéder à l’information. Un journalisme
indépendant analyse le monde et le rend accessible à toutes et à tous, œuvrant
pour la diversité des opinions.
Ainsi, nous profitons de cette journée pour énoncer quelques
écueils qui assaillent la presse guinéenne. Ce sont entre autres :
Sur
la liberté de la presse et d’expression: La loi 002 relative à la liberté de la
presse a le mérite de dépénaliser les délits de presse en Guinée dans sa
dimension privation de liberté. Il convient cependant de mentionner que des
actes allant dans le sens contraire de cette loi sont encore posés par des
procureurs, des juges et la Direction centrale de la police judiciaire. C’est
dans ce registre que nous pouvons citer le cas des journalistes privés de leur
liberté de façon arbitraire. Nous, associations professionnelles de la presse
dénonçons cette pratique rétrograde qui n’honore pas la Guinée. Une pensée à
nos confrères Amadou Diouldé Diallo et Ibrahima Sadio Bah, qui, depuis
plusieurs mois croupissent en prison. En appelant à leur libération, cela ne
veut pas dire que nous demandons l’impunité pour eux ou d’ailleurs pour tout
autre journaliste qui commettrait un délit de presse, mais simplement qu’ils
doivent être jugés sous l’emprise de la Loi 002 sur la Liberté de la presse.
Nous
sollicitons une amélioration de la promotion de la presse et la protection des
journalistes dans l’exercice de leur métier. De nos jours, des journalistes
sont encore battus et ou maltraités. D’ailleurs c’est l’opportunité de rappeler
que le dossier de la bastonnade des journalistes par des gendarmes de l’Eco 3
de Matam en octobre 2017 n’a toujours pas trouvé d’issue. Insultés et
bafouillés dans leur dignité avec la perte de leurs matériels de travail, 4 ans
après, aucune forme de justice n’a été rendue pour ces journalistes et les
médias victimes. Ce, malgré la plainte régulière portée auprès de la Cour
d’appel de Conakry.
L’impunité des exactions et parfois des crimes commis contre les
journalistes demeurent une menace qui entrave la liberté de la presse et
d’expression qui constituent pourtant l’un des fondements d’un État de droit et
démocratique. Cette menace réelle faut-il le souligner impose aujourd’hui à
nombre de professionnels de médias à la résignation et même à l’autocensure, de
peur d’avoir à subir des représailles.
Sur le droit à l’information: L’adoption et la promulgation de
la loi sur l’accès à l’information publique. Ce texte avait été rédigé au même
moment que ceux sur la liberté de la presse et sur la haute autorité de
communication en 2010. Depuis une décennie donc cette loi est en souffrance
dans les circuits notamment, sa publication dans le Journal Officiel. Ce, en
dépit de la mobilisation des organisations de la société civile dont les
associations professionnelles de médias, pour plaider en faveur de son adoption
et de sa mise en application. Aujourd’hui encore, nous réitérons cet appel. Car
comme vous le savez, cette loi est aussi une autre garantie de démocratie,
puisqu’elle permet à tout citoyen d’accéder aux informations publiques non
confidentielles. Ce qui répond au principe de redevabilité des pouvoirs
publics.
Sur
le fonctionnement économique des entreprises de presse : nous saluons les
efforts consentis dans la diminution considérable de l’assiette de la redevance
annuelle de l’audiovisuel privé au titre de la location des fréquences, des
efforts peuvent encore y être déployés. Nous attirons parallèlement l’attention
des autorités sur la précarité des entreprises de presse écrite. En effet
l’édition de journaux se trouve actuellement confrontée à une hausse drastique
des prix des intrants d’impression.
Sur
le plan infrastructurel : La presse guinéenne a besoin de rattraper son
retard infrastructurel à l’image de beaucoup de pays de la sous-région. La
construction d’une Maison de la presse digne de nom devient de plus en plus une
nécessité. Hier, la Maison des journalistes était à Coléah-Moussoudougou,
aujourd’hui, elle est à Kipé-Dadia, toujours en location et dans un état
vétuste. Et, si des actions urgentes ne sont pas entreprises, de déménagement
en déménagement, la Maison de la presse risque bientôt de se retrouver en dehors
des zones de prédilection et pire, elle pourrait même fermée par manque de
budget conséquent pour son fonctionnement. Cette situation ne nous honore point
si on considère que la presse constitue aussi l’une des vitrines d’un pays.
C’est pourquoi, nous profitons une fois de plus de cette occasion, pour lancer
un appel solennel à l’endroit de Monsieur le Président de la République et à
son Gouvernement, pour aider la corporation à se doter d’une Maison de la
presse (mise à disposition d’un terrain, construction de l’édifice et
équipements).
Nous profitons également de l’occasion de cette journée particulièrement
symbolique pour notre corporation, pour informer les hommes de médias de la
reprise prochaine des travaux d’amendement de la convention collective de la
presse privée de Guinée en vue de son adoption par tous les acteurs concernés.
C’est le lieu d’ailleurs de remercier vivement la commission de rédaction de
ladite convention.
On
ne saurait terminer cette allocution sans toucher d’un mot aux hommes de
médias. Car cette journée est également l’occasion de de leur rappeler le sens
de la responsabilité sociale, du respect strict de l’éthique et de la
déontologie sacerdotale. Les professionnels des médias devant tous être
conscients de l’impact combien important de la presse sur les populations. Une
virgule mal placée, par exemple, peut avoir des conséquences inimaginables et
dangereuses sur la paix.
Nous
devons à cet égard, agir ensemble pour protéger la liberté d’expression et la
sécurité des journalistes, afin que ces derniers exercent dans la plus grande
tranquillité leur métier au bénéfice exclusif de la nation toute entière et
pour tout le pays.
Vive
la liberté de la presse !
Vive la presse Guinéenne !
Vivement un environnement économiquement propice à l’évolution des médias
guinéens !
Merci de l’attention !
Conakry,
le 3 mai 2021
URTELGUI, AGEPI, AGUIPEL, SPPG, REMIGUI, UPLG, UFSIG, APAC
Hadja Kadé Barry