Ils sont trois. Ils sont des patriotes indécrottables. Ils aiment
tellement la Côte d’Ivoire, qu’ils ont pris sa vie politique en otage, depuis
des décennies. Pendant le long règne de Félix Houphouët Boigny, ils étaient
déjà aux affaires, en tant que ministre, Premier ministre, président de
l’Assemblée nationale ou opposant. Suite au départ du Vieux, deux d’entre
eux se sont érigés en héritiers de droit et de fait. Instaurant entre eux une
querelle de coépouses aux grands remous, ils se sont disputés sans ménagement,
le fauteuil du «sage» de Yamoussoukro, se jetant, et sans modération, de
grosses peaux de banane sous les pieds.
Tous les coups étant permis en
politique, même ceux en dessous de la ceinture, les trois gladiateurs de
l’arène des berges de la lagune Ebrié, au gré des alliances, des divorces et
des remariages puis des re-séparations, ont fait de la «terre d’espérance» et
«pays de l’hospitalité», leur chose. Se succédant au pouvoir, en marchant
souvent dans le sang de leurs compatriotes, le président Alassane Ouattara et
ses prédécesseurs, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo, puisque c’est d’eux
qu’il s’agit, se trouvent toujours une autre jeunesse, dès que le pouvoir est
en jeu.
Et comme l’actuel locataire de la
Maison Blanche avec qui ils partagent, non seulement la même tranche d’âge,
mais aussi le goût pour les honneurs de la fonction suprême, les dinosaures de
la politique ivoirienne, s’apprêtent à jauger leurs forces dans l’arène
électorale. En attendant que Joe Biden, qui, du haut de ses 80 piges, compte
défendre son fauteuil présidentiel en 2024 soit positionné à cet effet, si les
Démocrates ne le mettent pas à la retraite forcée, les leaders de la politique
ivoirienne s’affronteront déjà le 2 septembre prochain, par municipales et
régionales interposées. Ensuite, si une modification constitutionnelle ne vient
pas mettre fin à leur boulimie du pouvoir, Alassane Ouattara, 81 ans,
retrouvera probablement son «cher aîné», Henri Konan Bédié, 89 ans le 5 mai, et
son «cher cadet, Laurent Gbagbo, 78 ans le 31 mai, dans la course à la
présidentielle de 2025.
Tous les trois, comme si un
élixir de jouvence ou une potion magique dont ils ont le secret, s’occupaient
de faire une mise à jour systématique de leurs logiciels biologiques, répondent
toujours présents, à ces grands rendez-vous de la vie de la nation ivoirienne.
Toutefois, la Côte d’Ivoire est loin de détenir la palme d’or des dirigeants du
4e âge! Le Cameroun qui a fêté, en février, les 90 ans officiels de Paul Biya,
l’inusable locataire, pour ne pas dire l’éternel propriétaire du palais
d’Etoudi, peut se targuer de figurer en pole position dans le classement!
En tout cas, tant que la
Constitution le permet, que le peuple n’est pas contre, et que d’autres
candidats plus jeunes continuent de ronger tranquillement leur frein, les
présidents octogénaires et même centenaires peuvent, dans la sérénité totale,
tenir le gouvernail. Surtout qu’ils semblent bien garder la maison. Sauf que
les longs règnes portent rarement bonheur aux pays dits de démocratie! Et ce
n’est, sans doute pas à la Côte d’Ivoire d’après Feu Félix Houphouët Boigny,
qui a traversé des zones de fortes turbulences marquées par un coup d’Etat, une
rébellion et des violences post-électorales aux allures de guerre civile, qu’il
faut en conter!
WS