Disponible en France depuis le 9 octobre, Arafat DJ : histoire et
légende d’une comète, est disponible depuis jeudi en Côte d’Ivoire.
Un peu plus de trois ans après la mort du roi du coupé-décalé à l’âge de 33
ans, le livre coordonné par l’universitaire Josué Guébo revient sur son influence
sur la jeunesse à travers la musique, mais aussi la langue et la
communication.
Que retiendra-t-on de DJ Arafat ?
C’est la question posée par les cinq auteurs de cet ouvrage de 78 pages, cinq
amis émus par la mort tragique du roi du coupé-décalé le 12 août 2019 et désireux de
rendre hommage à cet artiste charismatique et controversé.
Les auteurs sont chercheurs,
juriste, communicante et traducteur et ont chacun voulu raconter l’influence,
encore vive, de l’artiste dans la société ivoirienne. « Arafat a nourri
considérablement la "besace", comme on l’appelle en Côte d’Ivoire.
Arafat a "resémantisé", il a réorienté la langue, il l’a
instrumentalisé. Je veux dire qu’Arafat est une sorte de créateur, j’allais
dire, immédiat, de mots. Et donc, cela a été important pour nous parce qu’il a
une influence sur l’expression, sur la façon dont le français est utilisé par
les jeunes, d’Abidjan à Kigali », raconte Josué Guébo, universitaire et
coordinateur de l’ouvrage.
DJ Arafat a notamment nourri le « français ivoirien » et développé
le coupé-décalé sur les réseaux sociaux. Surnommé le « Daïshikan » (grand
prêtre, ange du dessin animé Dragon Ball), il faisait parler de lui à travers
ses buzz, ses clashs et nourrissait la critique.
Une communication très efficace
qui a fait école, selon la communicante Lala Meïta Soumahoro, une des autrices
du livre : « Aujourd’hui, par exemple, tous les artistes, mais tous sans
exception, ont le même type de communication. Ils s’attachent entre eux, ils se
taguent entre eux, ils se postent les photos des uns des autres, ils se moquent
et ils font même de l‘auto-critique, ce qui n’était pas le cas avant. Mais
Arafat a révolutionné la communication digitale ».
Si certains des auteurs ont
critiqué le roi du coupé-décalé de son vivant, ils n’hésitent pas aujourd’hui à
l’ériger en icône, malgré ses frasques et ses excès de violences. Ils estiment
que DJ Arafat est un objet d’étude encore vaste et pensent déjà à un prochain
ouvrage sur l’artiste.
En tout cas, le coupé-décalé
reste aujourd’hui un genre musical qui persiste et se développe sous
différentes formes depuis une vingtaine d'années en Côte d'Ivoire. Un genre
dansant, festif, que certains jugent sans message alors que toute une jeunesse
s'est identifiée à cette musique et à ses artistes.
Le coupé-décalé est un peu à
l’image d’une certaine dépolitisation de la jeunesse, enfin une dépolitisation
apparente. C’est-à-dire qu’assez rapidement, les jeunes qui suivent beaucoup le
coupé-décalé ont le sentiment que les autres genres sont un peu contaminés ou
corrompus par la politique. Et le coupé-décalé arrive à donner l’impression
qu’ils ne sont pas achetés.
RFI