À la demande de Bamako, le Conseil de sécurité de l'ONU a mis un terme immédiat, ce vendredi 30 juin, à la mission de maintien de la paix des Casques bleus au Mali (Minusma), un retrait réclamé par Bamako qui se déroulera sur six mois.
C’est désormais sûr : les Casques bleus et policiers de la
Minusma auront quitté le Mali pour la fin de l’année. D’ici là, la plus
importante des forces de maintien de la paix de l’ONU ne peut s’occuper plus
que de son départ, elle n’aura plus de mandat d’accompagnement politique ou
d’enquête en matière des droits de l’homme. Et à partir du 1ᵉʳ octobre, les
Casques bleus n’auront plus le droit de protéger les civils.
En deux minutes, 15 bras se sont levés et le Conseil de
sécurité a démantelé la Minusma après presque une décennie de maintien de la
paix au Mali. Contrairement à la tradition, la France, qui coordonne le
dossier, n’a pas commenté le vote. C’est l’ambassadeur du Ghana qui a
immédiatement reconnu son rôle crucial pour sécuriser le pays. Il a rappelé à
la junte malienne ses responsabilités vis-à-vis de ses voisins, espère une
meilleure coordination avec la Cédéao et annonce d’ores et déjà que le G5 Sahel
sera affecté par le départ de la Minusma.
Le Mali regrette que
le Conseil voie la situation du pays comme menaçante
Puis un groupe d’ambassadeurs, États-Unis en tête, a prévenu
que ce retrait allait « nuire » aux Maliens en première ligne. « Bien que nous
regrettons la décision du gouvernement de transition d’abandonner la Minusma et
le fait que cela va nuire à la population malienne, nous avons voté en faveur
de la résolution, vu que nous sommes satisfaits du plan de retrait adopté », a
déclaré le représentant américain Jeffrey DeLaurentis après le vote.
Ils ont appelé les autorités de la transition à ne pas
rompre le processus électoral, et à coopérer pleinement au départ : toute
entrave, tout chaos, pourrait profiter aux terroristes, selon eux. Les Nations
unies craignent aussi que leurs bases ne soient tout simplement récupérées par
les paramilitaires Wagner dans 6 mois.
L’ambassadeur malien Issa Konfourou a tenté de rassurer sur
les conditions du retrait, qui vont être affinées ces 6 prochaines semaines. «
Le gouvernement de la République du Mali veillera au respect des engagements
pris à cet égard. Le gouvernement regrette que le Conseil continue de
considérer la situation au Mali comme une menace à la paix et à la sécurité
internationale en dépit des résultats tangibles enregistrés d'une part sur le
terrain par les forces armées maliennes et d'autre part concernant le retour à
l'ordre constitutionnel apaisé et sécurisé. »
Si le représentant malien a insisté sur l’échec militaire de
la Minusma, il a tout de même reconnu l’utilité de la force en matière
d’assistance humanitaire et les bons offices du secrétaire général. Les
ambassadeurs russes et chinois se sont félicités que le Conseil se prononce en
faveur de la souveraineté de Bamako.
La mission la plus
coûteuse de l'ONU
Le 16 juin, dans un discours devant le Conseil de sécurité
qui avait fait l’effet d’une bombe, le ministre malien des Affaires étrangères
Abdoulaye Diop, dénonçant l’« échec » de la mission de maintien de la paix de
l’ONU (Minusma), avait exigé son « retrait sans délai ».
Le Conseil de sécurité, qui se préparait à examiner une
reconduction du mandat possiblement modifié, a donc dû se résoudre à signer
l’arrêt de mort de la mission la plus coûteuse de l’ONU (1,2 milliard de
dollars par an) et qui compte une dizaine de bases réparties sur le territoire.
Elle avait été créée en 2013 pour aider à stabiliser un État menacé
d’effondrement sous la poussée jihadiste, protéger les civils, contribuer à
l’effort de paix et défendre les droits humains.
Les relations entre Bamako et la mission s’étaient largement
détériorées depuis la prise de pouvoir des militaires en 2020. « La
séquence a été une accélération un peu inattendue de l'histoire de la Minusma. On
n’attendait pas une fin aussi soudaine. On aurait pu avoir, du fait de cette
accélération, un divorce dans le déchirement. Et finalement, ce qu'on a ce
soir, c'est un contrat de divorce en bonne et due forme, adopté par consensus.
Même si y a des regrets de part et d'autre. Reste à savoir si ce contrat sera
appliqué à la lettre, dans quelles conditions... », a déclaré Jean-Hervé
Jezequel, directeur du projet Sahel à l'International Crisis Group
Moscou renouvelle son
« soutien indéfectible » au Mali
Le chef de la diplomatie russe a renouvelé son « soutien
indéfectible » au Mali lors d'un entretien téléphonique avec son homologue
malien juste après l'annonce du retrait de la mission de l'ONU (Minusma) dans
le pays, selon un communiqué publié ce vendredi par le ministère malien des
Affaires étrangères.
Sergueï Lavrov a « renouvelé le soutien indéfectible de son
pays en faveur du Mali tant dans le domaine militaro-technique qu'en matière
d'assistance humanitaire et économique », écrit le communiqué publié sur les
réseaux sociaux peu après l'adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU de la
résolution mettant un terme à la Minusma.
Radio France Internationale
(RFI)