« Il a tenu bon, c’était très dur, mais c’était un combat de principe qu’il menait et qu’il a gagné ». La justice sénégalaise a ordonné mardi la remise en liberté du journaliste Pape Alé Niang, critique du pouvoir en détention pendant environ deux mois, ont indiqué ses avocats.
Le juge a ordonné la remise en liberté provisoire sous
contrôle judiciaire, avec interdiction stricte de s’exprimer sur le dossier,
interdiction de quitter le territoire, et obligation de remettre son passeport
et de se présenter au cabinet du magistrat instructeur une fois par mois, a dit
à l’AFP l’un de ses conseils, Me Moussa Sarr.
Le journaliste, dont le cas a mobilisé un certain nombre de
confrères et de personnalités, est « extrêmement éprouvé » par sa grève de la
faim « mais il a un moral inoxydable », a-t-il dit. Il est toujours
hospitalisé, a-t-il ajouté, une information qui n’a pas été confirmée d’autre
source.
Un autre de ses avocats, Me Ciré Cledor Ly, a indiqué que
son client devrait cesser sa grève de la faim.
« Il a tenu bon, c’était très dur, mais c’était un combat de
principe qu’il menait et qu’il a gagné », a-t-il dit, tout en déplorant que son
client reste bridé par le contrôle judiciaire alors que, selon lui, l’affaire a
des motivations « politiques ».
Patron du site d’informations Dakar Matin, le journaliste a
été inculpé et écroué le 9 novembre.
Les autorités lui reprochent d’avoir diffusé des messages
confidentiels selon elles sur le dispositif sécuritaire autour de
l’interrogatoire de l’opposant Ousmane Sonko le 3 novembre dans une affaire de
viols présumés. Elles l’accusent aussi de diffusion de fausses nouvelles.
Il a alors cessé de s’alimenter pendant une douzaine de
jours. Il avait été remis en liberté sous contrôle judiciaire le 14 décembre,
mais renvoyé en prison moins d’une semaine après pour avoir manqué aux
obligations de son contrôle judiciaire en s’exprimant sur l’affaire.
Il a repris sa grève de la faim et a été hospitalisé en
raison de la détérioration de son état de santé.
La détention du journaliste a suscité une vague de critiques
de la presse et de la société civile contre les autorités, et la crainte d’un
tour de vis en vue de la présidentielle de 2024.
Le Sénégal est volontiers loué par ses partenaires pour ses
pratiques démocratiques, mais les défenseurs des droits humains nuancent cette
appréciation.
Le Sénégal est 73e sur 180 au dernier classement sur la
liberté de la presse, établi par Reporters sans frontières. Le pays a perdu 24
places par rapport à 2021.
La Coordination des associations de presse (CAP), une
organisation professionnelle qui a mobilisé en sa faveur, a estimé dans un
communiqué qu’après la première « victoire » représentée par sa remise en
liberté, « l’heure est à la seconde phase du combat : l’annulation des charges
fantaisistes et politiques qui lui ont valu plus de 60 jours de captivité ».
AFP