Dans une interview accordée au magazine Jeune Afrique, le Premier
ministre Guinéen, Mohamed Béavogui s’est prononcé sur plusieurs sujets d’actualité
du pays. En première la relation entre la Guinée et le Mali, au moment où les
deux pays frontaliers vivent une période
transitoire.
Depuis sa nomination le 6 octobre
2021, lit-on dans JA, les relations de Mohamed Béavogui avec son
patron n’ont pas toujours été au beau fixe. Le Premier ministre de la
transition guinéenne s’était lui-même plaint publiquement de ne pas avoir été
associé à certains arbitrages de Mamadi Doumbouya et du Comité national du
rassemblement pour le développement (CNRD). Il le reconnaît d’ailleurs : « On
ne peut forcer l’armée à prendre ses décisions comme le feraient des civils. »
Pour autant, l’homme n’entend pas quitter son poste, en dépit de ce
qu’annonçaient les rumeurs.
Après des années de carrière à
l’étranger, estime le confrère, ce
spécialiste du développement a pris à bras le corps les défis posés par la
transition. Désolé de voir la Guinée aux
prises avec certains de ses partenaires, le locataire du palais de la Colombe
le martèle : « La Guinée n’est pas un petit pays pauvre. » Mais pas question,
pour l’instant, de revoir les conventions minières signées sous Alpha Condé :
la junte s’y est engagée lorsqu’elle a pris le pouvoir le 5 septembre. Mohamed
Béavogui entend tout mettre en œuvre pour que ces contrats soient respectés, ce
qui permettra d’augmenter les recettes fiscales du pays. Il rêverait aussi de
créer un fonds d’investissement pour financer son programme.
Enfin, s’il faut assainir
l’économie et lutter contre l’impunité, le Premier ministre n’ignore pas que
les priorités sur lesquelles les Guinéens l’attendent sont aussi politiques :
élaborer une nouvelle Constitution avec le Conseil national de la transition
(CNT, l’organe législatif), la faire adopter par référendum et organiser des
élections pour transmettre le pouvoir à un régime civil.
En réponse à une question du
confrère, Mohammed Béavogui déclare qu’il a d’emblée réalisé que l’administration
publique marchait sur la tête et qu’il y avait du nettoyage à faire. Par
exemple, dit-il, le fichier du nombre de
fonctionnaires était différent de celui des soldes : les salaires n’étaient pas
versés sur la base des gens recrutés – sur 117 000 fonctionnaires, 14 000
personnes étaient payées à ne rien faire.
En ce qui concerne les relations entre Conakry
et Bamako, le Premier ministre
Guinéen avoue : « nous ne pouvons
pas affamer les Maliens ». En dépit des
exigences de la CEDEA0, la frontière Guinéo-Malienne reste ouverte. La Guinée étant l’une des premières voix discordantes au sein
de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sur les sanctions
prises contre le Mali le 9 janvier 2022 à Accra au Ghana, à l’occasion du
sommet extraordinaire des chefs d’État de l’organisation ouest-africaine.
GMC