La part de contribution des sociétés et établissements publics au produit intérieur brut (PIB) atteint à peine 7%, soit moins de 50 milliards GNF. Preuve que cet important patrimoine est exploité à minima. Une brèche par laquelle s’engouffrent les cols blancs de tout acabit. Dans une administration publique où des vertueux comme Nestor se comptent sur les doigts d’une main.
Nous allons d’ailleurs le découvrir au fur et à mesure de cette plongée dans les méandres de quelques-unes de ces EPA et EPIC. Tels que le Crédit rural de Guinée ou la SOGUIPAH entre-autres. Mais avant d’en arriver à ces entités, un détour s’impose par la Guinéenne de large bande (Guilab), la Société de Gestion et d’Exploitation du Backbone National (Sogeb) et le Fonds d’entretien routier (Fer).
Dans l’enquête
rendue publique ce vendredi, 18 juin 2021, on fait un gros plan sur la
Guinéenne de large bande (Guilab), la Société de Gestion et d’Exploitation du
Backbone National (Sogeb) et le Fonds d’entretien routier (Fer). En attendant
d’en savoir sur le fonctionnement de ces EPIC, on va commencer par planter le
décor !
Cela passe
forcément par la présentation de la Direction Nationale du Patrimoine de l’État
et des Investissements Privés (DNPEIP), structure peu connue de l’opinion dont
le rôle est pourtant capital dans la gestion du patrimoine de l’État.
La Direction
Nationale du Patrimoine de l’État et des Investissements Privés (DNPEIP) a pour
mission principale, la conception, l’organisation, l’élaboration et la mise en
œuvre de la politique du gouvernement en matière de gestion du patrimoine de
l’État et de la coordination des investissements privés. La DNPEIP s’occupe
également de la gestion du patrimoine de l’État en assurant le suivi et en
présentant un rapport au Ministre en charge de l’Économie et des Finances.
Il s’avère pourtant que le cadre
législatif qui régit le fonctionnement des organismes publics, à savoir les
Sociétés et établissements publics comporte des lacunes. Ce qui nécessite
forcement des réformes ?
C’est
justement pour permettre aux décideurs (tutelle technique et financière), et au
législateur (Assemblée Nationale), d’avoir un éclairage sur la gouvernance des
sociétés, ainsi que leurs situations sociale, économique et financière que
traduisent leurs états financiers, que le gouvernement guinéen a entamé depuis
2015, la rénovation du cadre législatif et règlementaire des Organismes publics
(Sociétés et établissements publics). L’objectif étant de compléter les
dispositions prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LORF)
et corriger les dysfonctionnements constatés dans leur gouvernance.
Comment comprendre que ce ne soit
qu’en 2016 qu’une loi portant gouvernance financière des sociétés et
établissements publics a été adoptée ?
La loi
n°2016/075 portant Gouvernance Financière des Sociétés et Établissements
publics en République de Guinée a été adoptée et promulguée le 30 décembre
2016. Suite à quelques remarques pertinentes, elle a été modifiée en certaines
de ses dispositions et remplacée par la loi n°056 du 08 décembre 2017. Cette
Loi fixe un certain nombre d’obligations à l’État et aux organismes publics
concernés. Tout ce temps c’est le
vide juridique qui prévalait, bien que l’Etat soit dans l’actionnariat de ces
sociétés.
A combien s’élève la participation de
l’Etat guinéen dans le portefeuille de ses sociétés ?
Selon un
rapport financier couvrant 23 sociétés en lien avec le portefeuille de l’État
d’octobre 2019, consulté auprès d’un service du Ministère de l’Économie et des
Finances, les participations de l’État guinéen dans les sociétés du
portefeuille sont de 2 713, 69 milliards GNF en 2018 contre 2 013, 87 milliards
GNF en 2017, soit une hausse de 25%. Le constat général a été que les sociétés
disposant de tous les organes de gestion participent efficacement au budget de
l’État.
Cependant,
certaines d’entre elles méritent une attention particulière : Crédit rural de
Guinée(CRG) et Société Guinéenne de Palmier à Huile et d’Hévéa (SOGUIPAH) sur
lesquelles sociétés, il sera consacré ultérieurement des enquêtes approfondies.
Ne faut-il pas tout de même noter que
ces sociétés étaient dépourvues pour la plupart d’organes de gouvernance, au
moment de leur évaluation ?
Il y a bien
sûr des sociétés publiques qui ne disposaient pas à l’époque de leur
évaluation, de tous les organes de gouvernance. C’est le cas de la Société
Nationale des Chemins de Fer de Guinée (SNCFG), de la Société Guinéenne de
Palmier à Huile et d’Hévéa (SOGUIPAH), de l’Office National du Tourisme (ONT).
Que dire des états financiers de l’ONT ?
A combien s’élève l’enveloppe engrangée par cet établissement public en 2016
?
Selon les
termes d’un rapport synthèse de la situation financière des entreprises en
portefeuille de septembre 2017, les états financiers fournis par l’ONT ne
permettent pas de faire une analyse de l’organisme parce que les chiffres
donnés sont uniquement de 2016. Alors que les informations financières devaient
être présentées sous la forme année n et n-1. Il faudra néanmoins noter que cet
établissement a fait un résultat net positif de 417, 45 GNF en 2016.
Ces évaluations ont-elles permis
d’améliorer la part des dividendes perçus par l’Etat auprès de ces entreprises
?
Le constat
qui se dégage est que des dividendes perçus par le trésor public au compte de
l’exercice 2018 se sont chiffrés à 46, 65 milliards GNF, représentant 6,35% du
produit intérieur brut (PIB).
Cette
première évaluation du Patrimoine de l’État a permis surtout d’avoir une idée
sur l’importance du potentiel des sociétés en portefeuille évoluant dans les
secteurs clés de l’économie guinéenne, ainsi que leurs faiblesses à corriger
pour leur meilleure performance.
La Guilab et ses performances
La Guinéenne
de large bande (GUILAB) est une société anonyme à participation publique, son
capital social se chiffre à 199, 07 milliards GNF en 2018 contre 227, 13
milliards GNF en 2017, soit une baisse drastique de -12,35%. Cette société
dispose des organes de gouvernance, notamment un Conseil d’Administration et un
commissaire aux comptes et sa mission est d’améliorer la gestion des
télécommunications en Guinée et l’accès à l’internet à haut débit, par la
connexion au câble sous-marin en fibre optique.
Dans
l’exercice de ses activités commerciales, la Guilab a réalisé un chiffre
d’affaires de 54 milliards GNF en 2018 contre 38,66 milliards en 2017 soit une
hausse de 39,67%. Une performance soutenue par les travaux et service vendus
passant de 19,48 milliards en 2017 à 15,34milliards en 2018.
Signe d’une bonne santé financière de
cet EP ?
En 2018,
dans le but d’alléger son coût d’investissement, la Guilab a bénéficié d’une subvention
d’investissement de 1,72 milliards. Son résultat d’exploitation s’est soldé par
un résultat encourageant de 15,30 milliards en 2018 contre GNF 3,03 milliards
en 2017 soit une progression de 404,95%. Du résultat financier est ressorti une
valeur positive de 694 milliards pour 2018 contre une valeur négative en 2017
de GNF (147) millions.
En
définitive, la Guilab ressort un résultat net positif de12,51 milliards en 2017
contre celui de 2016 qui se chiffre à 2,96 milliards.
En 2016 tout
comme en 2015, la Guilab a enregistré un résultat consécutivement négatif de
-8,24 milliards GNF, et -8, 66 milliards GNF, le montant de la perte s’est
accru de -419, 56 millions GNF en 2016.
En termes d’impôts et taxes, la
Guilab reste-elle devoir à l’Etat guinéen ?
Les impôts
et taxes dus à l’État restent négatifs sur toutes les deux périodes de 1,810 milliards
GNF en 2017 à 2,76 milliards GNF en 2018. Pour 2018, la Guilab n’exprime pas un
besoin d’exploitation à financer.
Les voyants de la Guilab au vert…
Son fonds de
roulement étant positif de 35,89 milliards, cette valeur doit être conduite au
niveau de sa trésorerie pour une éventuelle charge. Elle ne présente pas un
indicateur de solvabilité respectueux, mais à cause de la positivité de son
fonds de roulement, elle pourra certainement corriger cette situation. En
définitive, la Guilab présente une situation globalement positive et
progressiste et que les dettes Financières pèsent moins dans les ressources
stables que les capitaux propres qui constituent une indépendance financière
importante.
Que dire de la Société de Gestion et
d’Exploitation du Backbone National (Sogeb) et de sa mission ?
En ce qui
concerne la SOGEB, il est à noter que c’est une société Anonyme de gestion du
patrimoine des télécommunications, des technologies de l’information et de la
communication. Son capital Social est à 100% État qui se chiffre à 50 milliards
(encours de libération). Elle relève du Ministère des Postes,
télécommunications et de l’Économie Numérique.
La Sogeb a
pour mission de mettre à la disposition de tous les opérateurs de réseaux et de
tous les utilisateurs des services de télécommunications pour le transport de
la voix des données et de la vidéo, accessible sur toute l’étendue du
territoire national. Elle dispose de tous les organes de gouvernances à l’occurrence
un conseil d’Administration, une Direction Générale et un commissariat aux
comptes.
Des subventions de l’Etat pour la
SOGEB pour couvrir ses charges…
Au cours de
l’exercice 2018, la Sogeb a bénéficié d’un avis de crédit de 1,91 milliards
contre une prévision de 1,93 milliards. Ce montant lui a permis de couvrir ses
charges du personnel. Il important de rappeler que la situation financière
transmise à l’époque par la Sogeb n’est qu’un état d’exécution budgétaire. Donc
qui ne permettaient pas d’approfondir l’analyse.
Il faut
noter que le financement de ce projet a été assuré par un prêt d’Eximbank de
Chine. Et que dans ce cadre depuis 2013, suite à un appel d’offres
International, un contrat de réalisation de Backbone et un composant TIC a été
signé entre la société Huawei Technology et le Gouvernement Guinéen pour un
montant de 238 millions $. La contribution locale représente 10% du coût total
du contrat soit 23,8 Millions $ (166,6 milliards GNF).
Du Fonds d’Entretien Routier (FER)…
Le Fonds
d’Entretien Routier (Fer) est un Établissement Public à caractère Industriel et
commercial (EPIC) (en cours de transformation juridique, au sens de la loi 056.
Son domaine d’intervention est celui des Travaux publics dont le Ministère est
sa tutelle technique et celui de l’Économie et des finances qui assure sa
tutelle financière. Les produits du Fer proviennent essentiellement des recettes
affectées sur la vente des produits pétroliers.
Le Fer
dispose des organes de gouvernance notamment le Conseil d’Administration, une
Direction Générale et un commissariat aux comptes.
Le Fer a
pour mission, de recueillir et d’administrer les fonds destinés à l’entretien
du réseau routier éligible à la charge de l’État et des collectivités
décentralisées.
Au cours de
cet exercice 2018, le FER a réalisé comme chiffres d’affaires, 393 millions GNF
en 2018 contre 122 millions en 2017, soit une hausse de 122,13%.
Baisse des charges d’exploitation du
FER au moment où il connait une explosion des charges…
Ses charges
d’exploitation ont baissé de -1,80%, de 260,53 milliards GNF en 2018 contre
265,32 milliards en 2017, soit une variation de son résultat financier qui
présente des cases entièrement vides. Les charges du personnel sont passées de
3,59 milliards GNF en 2017 à 4,06 en 2018, soit une augmentation de 13,09%,
sans une moindre justification dans les états financiers. Aussi, une hausse des
autres charges qui sont passés de 61,81%, de 872 millions en 2017 à 1 411
milliards en 2018.
Les impôts
et taxes de la société sont quant à eux, en baisse de -84,33%. Enfin, nous
relevons que certains postes de charges sont en très forte augmentation sans la
moindre justification dans les états financiers.
Explosion des dettes des fournisseurs
durant l’exercice 216…
Curieusement,
pour l’exercice 2016, les postes de charges augmentent de manière
exponentielle, c’est le cas, entre autres des dettes fournisseurs qui passent
du simple au triple, de 25, 90 milliards GNF en 2015 elles s’élèvent à 81,
99GNFen 2016, soit 68,41%.
Enquête réalisée par Akoumba Diallo
pour FIM FM