En Guinée, le procès du massacre du 28 septembre 2009 a repris ce lundi
9 janvier. Celui qui dirigeait la junte à l'époque, Moussa Dadis Camara, est
encore à la barre. Quel bilan faire de ses premières prises de parole ? Sa
ligne de défense a-t-elle réussi à convaincre ? Y voit-on d'ores et déjà plus
clair sur ceux qui ont donné les ordres ? Interrogée par la RFI, Me Halimatou
Camara, l'une des avocates de la partie civile et défenseure des droits de
l'homme aborde toutes ces questions. Lisez
A la lumière des audiences
précédentes, Me Halimatou Camara pense
que la ligne de défense de Moussa Dadis se résume au fait qu’il n’était responsable de rien et
qu’il n’était au courant de rien de ce qui est arrivé. « Ce qui est
incroyable », s’exclame l’avocat de la partie. Selon elle, le président de la Guinée au moment du massacre du 28
septembre 2009 a le droit d’avoir la ligne de défense qu’il souhaite mais, souligne Me Halimatou Camara, nous nous sommes dans l’optique de démontrer
le contraire.
Durant les audiences passées, Moussa Dadis a rejette la
responsabilité du massacre sur son ancien aide de camp et sur son ex-ministre
de la défense de l’époque. Pour l’avocate, il sera
difficile pour le capitaine de faire prospérer
la thèse qu’il développe actuellement, i
parce que les évènements du stade se sont déroulés dans un contexte où il a eu
à faire des déclarations dans la soirée même de ces évènements : « quand
il dit qu’il n’était au courant de rien, c’est difficile à établir. Les exactions se sont poursuivies des jours
après ; on a continué à piller les quartiers constituant le siège de l’opposition,
on s’est attaqué à des blessés, à des femmes violées dans des hôpitaux. Il y a
eu des cas de disparitions forcés durant
les jours qui ont suivi les évènements du stade. Cette situation fragilise la
thèse de Moussa Dadis Camara ».
« Pourquoi Dadis n’a-t-il pas démissionné quand il s’est
rendu au constat qu’il n’avait plus les rênes du pouvoir comme il le prétend »
s’interroge Me Halimatou. Soulignant que l’homme a continué à dire qu’il était
le président de la république et qu’il était d’ailleurs le père de la nation :
« C’est un homme qui s’est dit être patriote, qu’il a une certaine probité
morale. Il est temps que Moussa Dadis
Camara assume ses responsabilités. S’il
ne les assume pas, la justice, elle, fera son travail ; d’ailleurs elle
est en train de faire son travail.
Selon Me Halimatou Camara, la partie civile va d’abord
démontrer le contexte des évènements du
stade : « nous avions à l’époque
un homme politique qui était certes militaire, mais qui voulait par tous les
moyens rester au pouvoir. »
Pour elle, ‘’ce procès a démontré que nous étions dans
un contexte ou l’Etat ne fonctionnait
presque pas, ou la gouvernance était du pilotage à vue, c’était des personnes
qui faisaient ce qu’elles voulaient et n’étaient soumis à aucun schéma de
gouvernance. Je pense que ce procès, c’est aussi le procès de la société
guinéenne, une société qui est restée longtemps en vase clos.
Au finish, l’avocate de la partie
civile se demande : « Comment un état peut être aussi déliquescent
pour que des hommes avec un niveau comme
ceux qui sont à la barre, ont pu gouverner ce pays ? Je pense que ce sont
des questionnements que la société
guinéenne elle-même devrait se poser. »
Gilles M C