Le procès des événements du 28 septembre 2009 s’est poursuivi cette semaine devant le tribunal criminel de Dixinn délocalisé à la Cour d'Appel de Conakry. Paul Mansa Guilavogui a de nouveau comparu à la barre. Son interrogatoire s’est poursuivi avec les avocats de la défense.
Lundi, il a commencé par répondre aux questions de Me Abdoulaye Keita,
un des conseils du colonel Moussa Tiegboro Camara. Précédemment, l'accusé avait
affirmé que derrière les sévices corporels dont il a été victime après son
arrestation en 2009, il y avait le colonel Moussa Tiegboro. L’avocat de ce
dernier a défendu que son client était à l'époque au Maroc pour des raisons de
maladie. Me Abdoulaye Keïta est allé jusqu’à demander à Paul Mansa Guilavogui
si après quelques jours, il n’a pas réalisé qu'il a fortuitement accusé Moussa
Tiegboro et ses hommes. L'accusé répond qu'il n'a aucun regret et qu'il ne peut
nullement être poursuivi par Tiegboro pour accusations fortuites. Il a continué
de répondre aux questions d’autres avocats de la défense. L'accusé a alors
rappelé que lorsque Toumba Diakité tirait sur le capitaine Moussa Dadis Camara
au camp Koundara, il était chez lui à Sangoyah dans la commune de Matoto. Il
sera arrêté à 19 h le même jour, non loin de la même caserne, par des
militaires à la trousse de Toumba. Il reconnaît avoir été reçu par le doyen des
juges d'instruction, mais n'a apposé aucune signature. Il avoue également qu'il
a refusé d'engager un avocat devant le juge d'instruction parce qu'il ne lui a
pas montré la personne qui a porté plainte contre lui, pour non-assistance à
personne en danger, a-t-il expliqué. Il ressort du procès-verbal de Paul Mansa
Guilavogui, que Toumba Diakité et Beugré, ancien commandant du camp Koundara sont
tous allés au stade avec chacun son équipe. Interrogé à propos ce lundi,
l'accusé a répondu qu'il ne l'a jamais dit. Son interrogatoire a mis fin à la
première phase du procès. Celle qui consiste à interroger individuellement les
accusés à la barre.
Mardi, la deuxième
phase a été amorcée. Elle consiste à entendre les parties civiles aussi, sur le
motif de leurs plaintes. Et le tout premier plaignant qui a invité à la barre
s'appelle Oury Baïlo Bah.
Oury Baïlo Bah est un avocat de profession né en 1970 à
Pita. Il dit s'être constitué partie civile dans cette affaire, pour avoir
perdu son petit frère du nom d'El hadj Hassan Bah. Selon Oury Baïlo, son petit
frère s'est retrouvé au stade sans le savoir pour avoir été emporté par la
vague des manifestants. Il a expliqué que Hassan Bah est sorti de la maison le
28 septembre en 2009 pas dans l'intention d'aller au stade, mais pour aller
assister à un baptême dans la belle famille d’un de ses amis. Oury Baïlo
déclare qu'il est resté en contact avec son petit frère, de son arrivée au
stade jusqu'au moment où il a cessé de répondre à ses appels. El Hassan Bah lui
rapportait selon lui, l'arrivée des gendarmes et des bérets rouges au stade, le
retentissement des premiers coups de feu et la fusillade de deux victimes par
des gendarmes en présence du colonel Moussa Tiegboro Camara. Constant que son
petit frère ne répondait plus aux appels, et qu'il y a eu des massacres au
stade, Oury Baïlo dit avoir mené des recherches durant tout le reste de la
journée, en vain. C'est finalement à 18h qu'il sera informé du décès de son
petit frère. Il se met alors en mouvement dans le but de retrouver son corps.
Le plaignant dit l'avoir identifié à la morgue du CHU Donka où il a récupéré
7000 gnf et une clef qui lui restaient dans la poche. Il témoigne que lui et
d'autres personnes qui cherchaient leurs proches, ont été chassés des lieux par
des bérets rouges, en présence de l'ex-ministre de la santé, Abdoulaye Chérif
Diaby. Depuis lors, a-t-il regretté en pleur, le corps de son petit frère n'a
plus été retrouvé même à l'esplanade de la mosquée Fayçal où certains corps ont
été restitués à leurs parents. « Nous n’avons même pas une tombe où nous
recueillir monsieur le président », a-t-il déploré en larmes à la barre.
Oury Bailo Bah a déclaré
qu’il poursuit le CNDD et l’armée guinéenne, mais au même moment il dit qu’il
ne sait comment son petit frère a trouvé la mort au stade
Après ses explications préliminaires, le plaignant a été
interrogé par le juge, des magistrats du parquet, les avocats de la défense et
ceux des parties civiles. En répondant aux questions de Me Bomby Mara, le
conseil du colonel Abdoulaye Chérif Diaby, Oury Bailo Bah a expliqué que les 57
corps qui avaient été annoncés par les autorités du CNDD, n'ont pas été tous
exposés à l'esplanade de la mosquée FAYÇAL. N'ayant pas retrouvé le corps de
son frère à l'esplanade de la mosquée Fayçal, il dit avoir procédé à un test
ADN sur le corps d’une victime qui lui ressemblait. Ce test qui a été fait à
Lyon, en France, s'est révélé négatif a-t-il rapporté. Ensuite le plaignant a
révélé qu’il poursuit le CNDD et l'armée guinéenne pour avoir perdu son petit
frère le 28 septembre en 2009. Mais est-il mort par balle ou pas ? la question
lui a été posée par Me Salifou Béavogui, un des avocats de la défense de
Kalonzo. Oury Baïlo a répondu qu'il ne sait pas jusqu'à présent comment El hadj
Hassan Bah est mort exactement. Puisque sa plainte vise le CNDD et l'armée
guinéenne, est-elle précise ? a enchainé Me Moussa Sovogui, avocat du colonel
Moussa Tiegboro Camara. Le plaignant pense que sa plainte est précise parce que
dit-il, c'est un crime de masse, perpétré sous le magistère d'un groupe de
personnes bien connues. Selon Oury Baïlo Bah, son petit frère était marié, mais
n'a pas fait d'enfants. Son départ
prématuré a plongé sa maman dans un choc sans précédent. Elle en est décédée
par la suite, a relaté l’avocat plaignant.
Le procès des
événements du 28 septembre 2009 est renvoyé au 20 février pour la suite des
débats. Il s'est déroulé ce mercredi à huis clos devant le tribunal criminel de
Dixinn délocalisé à la Cour d'Appel de Conakry.
Le huis clos a été décidé par le juge sur la base de
l’article 397 du code de procédure pénal. Parce qu’après avoir comparu à la
barre, la plaignante née en 1977 à Conakry a sollicité qu'elle soit entendue à
huis clos pour avoir été victime de viol au stade. Avant cette décision de
Ibrahima Sory 2 Tounkara, le sujet a été mis en débat. Les avocats des parties
civiles ont opté pour le huis clos en vue de protéger la dame et sa dignité
arguant que c'est une mère de famille. « Nous sommes dans un procès pénal qui
obéit à des règles. Et en la matière, il est clairement indiqué à l’article
397, que si des poursuites sont engagés du fait des violences sexuelles et de
tortures, le huis clos est de droit si la partie civile le réclame » a rappelé
Me Alpha Amadou DS Bah. Les différents avocats de la défense n’ont pas entendu
de cette oreille. Ils ont plutôt sollicité la comparution de la victime à
visage découvert pour permettre au public de comprendre ce qui s'est réellement
passé. « Nous on n’est pas sûr que la nécessité puisse s’imposer. Dès lors que la victime
elle-même parle tous les jours de cette affaire dans les médias. C’est pour
cela que nous pensons qu’il faut faire droit à ce qu’ont dit le parquet et les
avocats de la défense. On va continuer avec les débats en ce qui la concerne »
a répliqué Me Jocamey Haba. En dépit de la réplique de l’avocat, le juge a
ordonné le huis clos. Au sortir de l'audience, les avocats de la défense comme
Me Pépé Koulémou ont indiqué n'avoir pas été convaincus des propos de la
victime. Pendant ce temps, les avocats des parties civiles ont parlé de
victoire parce que la victime a eu droit à la parole. Les débats se poursuivent
le 20 février prochain.
Sékou Diatéya Camara
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ziouyn