Un simple petit jeu ! C’est à cela que le ministère de la justice semble réduire sa communication sur l’état de santé de certains détenus politiques. A coups de communiqués confus et de démentis peu convaincants, il réplique à leurs familles et avocats. Laissant davantage perplexes et indignés de nombreux Guinéens qui se demandent à quelle justice à vouer. Notre éditorial du jour en dit long.
On pourrait parler de mésaventure carcérale sur fond de polémique sanitaire. Une polémique dont le principal animateur reste le ministère de la Justice. Qui se dresse sur ses ergots à la moindre information faisant état de soucis de santé de l’un des actuels détenus politiques.
C’est comme si le département de
Maitre Mory Doumbouya, cherchait à se défausser des tirs croisés des avocats,
des défenseurs des droits de l’homme, de l’opposition et d’une frange de
l’opinion. L’inquiétude et la stupeur grandissent
chez les observateurs face à une justice guinéenne qui laisse ces personnalités
politiques croupir à la Maison centrale depuis six mois. Sans liberté
provisoire ni jugement.
Effarouché par l’annonce de
l’hospitalisation de l’ex-député de l’UFDG, le ministère de la Justice, à
travers un communiqué de son Service de presse, a démenti ce mardi son
placement sous soins intensifs. Citation : « Cette présence de M.
Ousmane Gaoual Diallo dans une cabine située au sein des services des urgences
n’est nullement liée à son état de santé, mais s’explique plutôt par la
nécessité de lui trouver un cadre convenable et approprié pour son suivi
médical », marmonne le ministère de la justice.
Cette sortie est inopportune
voire vaine, puisqu’après tout, elle confirme manifestement l’admission du responsable
de la communication de l’UFDG dans une structure hospitalière. Où il peut être soumis
à un suivi médical dans une cabine climatisée ou à des soins intensifs en salle
de réveil. Il y a quelques jours, le ministère de la justice avait aussi rué
dans les brancards pour démentir la femme de Chérif Bah, hospitalisé depuis
plusieurs semaines.
Le moins que l’on puisse dire,
c’est que cette avalanche de démentis est fortement contreproductive. D’autant
que le ministère de la justice tente généralement de noyer le poisson. Sans
jamais réussir à démentir l’hospitalisation des concernés. N’en déplaise à
l’équipe de Me Mory Doumbouya, les conditions lugubres des prisons guinéennes
exposent déjà tout détenu à la maladie. A plus forte raison, quand s’en suit
une hospitalisation, pour une maladie bénigne ou grave. Le tout, alors que
l’opinion reste sidérée par la récente mort de détenus politiques ou non,
tantôt à la maison centrale tantôt à l’hôpital.
Après la piteuse querelle
sémantique créée autour du statut de ces détenus politiques, voilà donc le temps
de la négation systématique, misérablement opposée aux nouvelles
d’hospitalisation ou d’aggravation de l’état de santé des compagnons de Chérif
Bah.
Déjà englué dans une grosse crise
avec les huissiers et le barreau de Guinée, qu’il gère avec beaucoup d’à
peu-près, le ministre de la Justice devrait donc mettre un terme à cette
rhétorique médicale et contre-médicale. Surtout quand l’avocat qu’il est, doit
porter ce malencontreux exercice contre d’autres avocats, qui ne font que leur
travail. C’est-à-dire défendre des détenus politiques, réellement voire
gravement malades.
Hélas, depuis six mois, au mépris
de l’Etat de droit et de l’indépendance de la justice, ces pères de familles sont
emprisonnés, sans possibilité d’être jugés ou de bénéficier d’une liberté
provisoire. Puisque, au moins, en attendant leur jugement, aucun de ces détenus
politiques n’a l’air de quelqu’un qui prendrait la poudre d’escampette. Alors,
libérez ou jugez-les !