La grève de la faim devient-elle l’arme privilégiée dans l’affaire
Ousmane Sonko qui polarise, depuis quelques mois, toute l’attention des
Sénégalais, surtout à quelque six mois de l’élection présidentielle ? Tout en a
l’air ! Alors qu’il se trouvait lui-même incarcéré, pour « vol avec violence » et
« atteinte à la sûreté de l’Etat et appel à l’insurrection », et qu’il a
commencé une grève de la faim, Ousmane Sonko s’est vu offrir un cadeau dont il
se serait volontiers passé.
C’est pendant qu’il méditait sur
son sort de prisonnier, que l’opposant a eu la mauvaise surprise de voir son
avocat français se faire mettre le grappin dessus pas la justice sénégalaise
qui avait lancé un mandat d’arrêt contre lui. Les choses sont allées à une
vitesse vertigineuse pour le franco-espagnol. Arrêté ce vendredi 4 août à la
frontière maritime entre le Sénégal et la Mauritanie, Me Juan Branco, a été
incarcéré le samedi 5, inculpé le dimanche 6 pour « attentat et complot » et
libéré et expulsé le lundi 7.
Comme son célèbre client, Me
Branco a également aussitôt entamé une grève de la faim suite à son incarcération
! Si la faim l’a conduit, lui, hors des geôles, il n’en sera pas de même pour
le leader du parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail,
l’éthique et la fraternité, le Pastef dissout depuis lors par le gouvernement.
Ousmane Sonko, lui, est passé des mains des geôliers à celles des médecins,
d’où il retournera certainement dans les mains des premiers, avant un procès.
Un autre jugement qui s’ajoutera à deux autres et condamnations pour
diffamation, corruption de la jeunesse et maintenant huit chefs d’inculpation
dont l’accusation d’« atteinte à la sûreté de l’Etat et appel à
l’insurrection».
Ce feuilleton de l’été dans
lequel l’opposant n’est guère en posture de héros, en tout cas pas pour
l’instant, est loin de connaître son dénouement. En effet, le Sénégal est
devenu coutumier de remous socio-politiques avant chaque élection
présidentielle, et celle de février 2024, n’échappe pas à la règle. En témoigne
les nombreuses violences meurtrières, au moins 16 morts selon les chiffres
avancés par le gouvernement, une trentaine à en croire l’opposition, qui ont
déjà émaillé les manifestations résultant des appels à «la résistance », lancés
par Ousmane Sonko.
L’opposant Sonko qui se dit
victime de cabales juridico-politiques orchestrées par le pouvoir de Macky
Sall, dans le seul but de lui barrer la route à la course au fauteuil
présidentiel, s’est, plus que jamais, mis dans la peau de favori alors qu’une
donne nouvelle, en plus de son inéligibilité que pourraient causer les
décisions de justice contre lui, peut bien contrarier ses plans. Certes, le
président sortant, qui lui, a déclaré solennellement qu’il ne se présentera pas
pour la troisième fois à sa propre succession, est hors-jeu. Mais, pour coller
aux recommandations issues du dialogue national initié par le chef de l’Etat,
les députés ont adopté une réforme du code électoral.
Cette nouvelle disposition du
code électoral, qui permet à une personne condamnée et ayant bénéficié ensuite
d’une amnistie ou d’une grâce de pouvoir se présenter à des élections, si elle
est promulguée par le président de la république, doit écarter les obstacles
qui empêchaient d’autres opposants de non moins grosse pointure, en
l’occurrence l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall et l’ancien ministre Karim
Wade, de s’aligner pour la présidentielle de février 2024. Les cartes sont donc
rebattues et si Ousmane Sonko devrait prendre part à cette présidentielle, il
sera loin de partir avec le statut de super candidat qu’il s’arrogeait
jusque-là. Pour le moment, l’atmosphère est bien lourde au pays de la Teranga
où la moindre étincelle ne peut que mettre le feu aux poudres !
En attendant, plus que la grève de la faim, Ousmane Sonko doit pouvoir, avec son pool d’avocats nationaux et étrangers, trouver la stratégie de défense idoine pour se dépêtrer des liens de la justice et vivre en acteur, et non en spectateur, la prochaine présidentielle qui, elle, s’annonce palpitante.
WS