Que d’effusions à l’aéroport international de N’Djamena ces derniers
jours, à l’occasion du retour au bercail de nombre de rebelles qui avaient pris
les armes contre le Tchad et plus particulièrement les dirigeants, pour exiger
d’eux, une meilleure gouvernance et l’alternance démocratique qui sont les
vertus les moins partagées dans ce pays. Le langage des canons étant le mieux
parlé, que ce soit dans la conquête du pouvoir que dans sa sauvegarde, tous les
régimes de fer qui se sont succédé au pays de François Tombalbaye ont nagé
entre coups d’Etat et guerre civile.
Le leader des Forces de la
résistance (UFR), Timan Erdimi et celui de l’Union des forces pour la
démocratie et le développement (UFDD), Mahamat Nouri avaient, quant à eux,
mille et une raisons d’être heureux, eux qui sont revenus sans être inquiétés,
sur la terre de leurs ancêtres, ce jeudi, à l’occasion du dialogue national
inclusif (DNI) qui s’ouvre le 20 août dans la capitale tchadienne. Tant attendu
depuis son annonce par le pouvoir de transition, ce raout national rassemblera
1400 délégués issus des organisations syndicales, du parlement de la
transition, de groupes armés et de partis politiques. L’initiative est louable
et porte déjà des fruits appréciables, notamment avec le retour d’un Timan
Erdimi qui a conduit une offensive jusqu’au nez de son oncle Idriss Deby Itno
qu’il voulait chasser du pouvoir en 2019. Mais les avions de l’armée française
en ont décidé autrement, stoppant cette avancée fulgurante de celui qui a
retrouvé, après 17 années d’exil au Qatar, un Tchad qui veut se donner des
chances de paix et de cohésion sociale.
Comme la quarantaine de groupes
armés qui ont signé l’accord de Doha, suite à cinq mois de discussion dans la
capitale qatari, Timan Erdimi, tout comme Mahamat Nouri qui revient également
au Tchad après 16 ans d’exil en France, ont foi que le DNI qui s’étalera sur 21
jours, permettra de tourner la page de la transition et de mettre en place un
régime démocratique et une alternance. Peu ou prou convaincus de ces résultats
prêtés au dialogue national inclusif au cours duquel est prévu l’adoption d’une
nouvelle constitution qui sera soumise à référendum, deux grands groupes de
rebelles dont le Front pour l’alternance et la concorde du Tchad, le Fact de
Mahamat Mahdi Ali, brilleront par leur absence. Il en sera également ainsi pour
une partie de l’opposition battant pavillon Wakit Tamma, pour qui le dialogue
national n’est sorti des laboratoires de la junte militaire au pouvoir, que
pour donner un blanc-seing à la transition et délivrer un ticket gagnant à son
président, Mahamat Idriss Déby, pour récupérer par les urnes, le fauteuil
laissé par son père.
Questions: 21 jours seront-ils
suffisants pour mettre sur la table toutes les questions d’intérêt national, et
surtout leur trouver solution, comme l’a promis, le pouvoir en treillis de
N’Djamena? Avec 80% des représentants acquis, le pouvoir, comme le pressent le
patron du parti Les Transformateurs de Succès Masra, ne risque-t-il pas de
peser d’un poids de mastodonte sur les débats et donc de les biaiser? Quel sera
l’impact du retrait annoncé depuis avril de Wakit Tamma, et de ses partis
politiques et société civile, qui accuse la junte de multiplier les violations
des droits humains et de vouloir mettre en orbite pour la prochaine
présidentielle Deby fils, alors que celui-ci, au début de la transition, se
serait engagé à ne pas se présenter à la course pour le palais
présidentiel qui prendrait alors les allures d’un héritage familial?
Un questionnement dont les
réponses, sauf tsunami, donneront raison aux contempteurs de Mahamat Idriss
Deby qui n’aura mis en branle la machine du dialogue national inclusif que pour
garder, au finish, les clés de la maison! Attention donc à l’éternel
recommencement !
ws