Après l’attaque d’un
avion de chasse congolais par l’armée rwandaise ce mardi 24 janvier, la tension
est encore montée d’un cran en République démocratique du Congo. Des tensions
sans cesse alimentées par la désinformation sur les réseaux sociaux. La
dernière infox en date est un communiqué faussement attribué au Rwanda.
Non, Kigali n’a pas officiellement suspendu sa participation
à l’accord militaire signé avec Kinshasa sur le retrait des rebelles du M23 en
RDC. C’est pourtant ce que veut faire croire un communiqué partagé en masse sur
les réseaux sociaux depuis ce mercredi 25 janvier.
Ce document avance également, à tort, que le Rwanda a
annoncé son intention « de faire progresser l'occupation d’autres territoires
». Une décision qui ferait suite à « l'occupation illégale du village Cyangugu
par les forces spéciales de l'armée congolaise ».
En réalité, ce communiqué est un faux. Il n’a jamais été publié
par le Rwanda. Nous l’avons vérifié en épluchant le site internet du
gouvernement rwandais et l’ensemble de ses comptes sur les réseaux sociaux.
Kigali a d’ailleurs publié un démenti officiel, quelques heures seulement après
l’apparition de ce faux document en ligne.
Il s’agit en vérité d’un montage relativement bien fait,
comportant presque toutes les caractéristiques d’un communiqué officiel : une
mise en forme soignée, une signature manuscrite, ou encore un tampon officiel.
Détecter la supercherie
Pour analyser ce document, nous l’avons comparé à plusieurs
dizaines de véritables communiqués publiés par le gouvernement rwandais. La
comparaison permet immédiatement de distinguer une importante différence de
qualité. On remarque également plusieurs fautes d’orthographe grossières dans
le texte en anglais. Il est écrit, par exemple, « Prime ministre », au lieu de
« Prime minister ».
Nous avons enfin passé ce document au crible à l’aide de
logiciels d’analyse des données de l’image (voir ici comment procéder, NDLR).
Cela nous a permis de relever plusieurs indications de manipulation, notamment
autour de la signature et du logo du gouvernement.
Un infox relayé en
masse
D’après nos recherches, l'infox apparaît pour la première
fois dans la soirée du mercredi 25 janvier, sur le compte Facebook d’un homme
se présentant comme un Congolais expatrié en Afrique du Sud. Immédiatement, le
faux communiqué est repris en masse sur WhatsApp, Twitter et Facebook. Il est
presque toujours accompagné du même commentaire : une traduction en français
avec la mention « alerte » ou « flash info » pour attirer l'œil des
internautes.
Parfois, ce sont des pages très suivies avec plusieurs
centaines de milliers d’abonnés qui relayent ce faux document. S’il est
impossible de dire qui est derrière cette manipulation, on constate que l’infox
est partagée par de nombreux comptes pro-RDC, dont certains sont habitués à
relayer des fausses informations.
Désinformer pour
attiser les tensions
Ce que l’on constate, c’est que cette fausse information
participe à échauffer encore davantage les esprits. Si certains internautes
vigilants ont rapidement débusqué l’infox, comme le traduisent les
commentaires, les réactions sur les réseaux montrent aussi que cela participe à
alimenter la haine anti-Rwandais. Un engrenage particulièrement dangereux en
cette période de fortes tensions.